VELDZLAND Maurice

Par Daniel Grason

Né le 6 juin 1914 à Paris (XVIIe arr.), fusillé comme otage le 30 avril 1942 au champ de tir de Biard près de Poitiers (Vienne) ; tailleur, ajusteur ; militant communiste ; résistant.

Maurice Veldzland et sa soeur Germaine Ebenstein en 1939
Maurice Veldzland et sa soeur Germaine Ebenstein en 1939
Cliché communiqué par Bernard Ebenstein

Fils de Chlioma (Salomon) Veldzland, réfugié russe, tailleur (ce tailleur moustachu se flattait d’avoir été un camarade de chambrée de Trotsky-Bronstein, souvenir ou légende ?), et de Henna, née Gourvitch, sans profession, Maurice Veldzland alla à l’école primaire. Il habitait chez ses parents 111 rue de Montreuil à Paris (XIe arr.).
Il devint français après une déclaration de ses parents devant un juge de paix. Il tint un atelier de confection de tailleurs 210 boulevard Voltaire (XIe arr.), où son père vint travailler avec lui. Il fit la connaissance puis se maria avec Francine Fromond, militante communiste, qui, selon la mémoire familiale l’entraîna dans l’action communiste légale puis clandestine. Dans le dossier du Komintern de Francine Fromond, importante collaboratrice de l’Internationale et en particulier de Giulio Ceretti, il est dit qu’elle avait épousé le fils d’un émigrant russe, membre du PCF, mais celui-ci après vérification, "ne méritait pas la confiance politique" et que, d’après les informations qu’elle donna à la commission des cadres, elle aurait divorcé.
Mobilisé au 4e régiment de dragons le 26 août 1939, il fut ensuite affecté spécial le 8 décembre comme ajusteur à la Société nationale des constructions aéronautiques du Sud-Est (SNCASE) à Argenteuil (Seine-et-Oise, Val-d’Oise) ou Courbevoie (Seine, Hauts-de-Seine).
Il avait adhéré au Parti communiste en février 1938 et fut membre de la cellule Sainte-Marguerite dans le quartier Saint-Antoine, mais aurait cessé toute activité dès la dissolution du parti. En juin 1940, il rencontra l’un de ses ex-camarades qui diffusait l’Humanité clandestine dans le quartier et offrit ses services pour reprendre l’activité militante. Quelques jours plus tard, lors d’un rendez-vous au métro Ménilmontant, il entra en contact avec Fredo. Celui-ci lui confia l’impression de tracts à la ronéo.
Maurice Veldzland loua une chambre 25 rue d’Angoulême (aujourd’hui rue Jean-Pierre-Timbaud), un militant y apporta deux machines à ronéotyper à main ainsi qu’un millier de feuilles de papier. Quelques jours plus tard, Maurice Veldzland rencontra Paulette au métro Philippe-Auguste, elle lui remit deux stencils tapés ; deux jours plus tard, au même endroit, Maurice Veldzland lui apporta les tirages. Il effectua ainsi en juillet et début août 1940 plusieurs tirages pour l’organisation clandestine. Dans le même temps, il forma sur son lieu de travail avec quelques ouvriers un comité populaire d’entraide et de solidarité dont il était le secrétaire. Tous les soirs, il prenait ses repas chez ses parents.
Des inspecteurs des Renseignements généraux se présentèrent le 6 août au domicile de ses parents, saisirent une serviette en cuir contenant des tracts et un tube d’encre. Ils trouvèrent dans la chambre de Maurice Veldzland des exemplaires de l’Humanité, des stencils vierges, du papier blanc, des stencils utilisés, des papillons demandant la libération des élus communistes et des tampons en caoutchouc.
Arrêté, interrogé Maurice Veldzland reconnut les faits, déclara qu’il n’était pas rétribué pour effectuer ce travail, que ses frais de transport lui étaient simplement remboursés. Julien Kempinaire, vingt-neuf ans, de Vitry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne) qui participait au tirage des tracts fut également appréhendé. Maurice et Salomon Veldzland, cinquante-huit ans, ainsi que Julien Kempinaire furent inculpés pour infraction au décret-loi du 26 septembre 1939, mis à la disposition des autorités allemandes, incarcérés le 6 août à la prison de la Santé (Paris, XIVe arr.), puis à Fresnes (Seine, Val-de-Marne).
Le 8 février 1941, Julien Kempinaire fut condamné à huit mois de prison pour propagande communiste et Salomon Veldzland, inculpé de recel, relaxé par la 15e chambre du tribunal correctionnel. Le premier fut interné à l’issue de sa peine, puis déporté le 28 octobre 1943 à Buchenwald (Allemagne), d’où il rentra. Le second fut interné à la caserne des Tourelles (Paris, XXe arr.). Sa femme intervint, demandant sa libération. Il fut libéré le 10 juin en raison de son état de santé. La famille déménagea à Fontenay-sous-Bois (Seine, Val-de-Marne). Salomon Veldzland ne se présenta pas au contrôle mensuel du 31 août 1943, pour échapper éventuellement à un nouvel internement, et la famille quitta son domicile.
Maurice Veldzland fut condamné le 9 avril 1941 à seize mois de prison par la cour d’appel de Paris. Le 28 septembre, il fut interné au camp de Rouillé (Vienne).
Un train de permissionnaires allemands reliait régulièrement Maastrich (Allemagne) à Cherbourg (Manche) en passant par Caen (Calvados). Le 16 avril 1942 vers 3 heures du matin, des résistants communistes le firent dérailler à la hauteur d’Airan, près de Moult-Argences. Vingt-huit marins furent tués, dix-neuf autres blessés. Un nouvel attentat eut lieu au même endroit dans la nuit du 30 avril au 1er mai : dix soldats allemands perdirent la vie, il y eut vingt-deux blessés.
Dès le 21 avril 1942, le commandant en chef des forces d’occupation en France et chef de l’administration militaire, Karl Heinrich von Stülpnagel, dressa une première liste de trente otages, Juifs et communistes, à fusiller en représailles à l’attentat contre le SF-Zug 906 (le train 906). Six d’entre eux furent passés par les armes le 30 avril 1942, au champ de tir de Biard : Maurice Veldzland, René François (de Cachan, Seine, Val-de-Marne), Bernard Grinbaum, Isidore Pentier, Pierre Déjardin et Fernand Bréant (de Levallois-Perret, Seine, Hauts-de-Seine).
Maurice Veldzland fut enterré à Vouneuil-sous-Biard (Vienne). Après la Libération, son inhumation eut lieu dans le carré militaire du cimetière communal de Fontenay-sous-Bois. Son nom écrit Vezelande fut gravé sur la plaque commémorative des victimes civiles de la ville. Dans la Vienne, son nom est inscrit sur le monument érigé à la mémoire des 128 fusillés sur le champ de tir de Biard, inauguré le 8 mai 1949.
Son beau-frère, Simon Ebenstein, français, titulaire de la Croix de guerre et de la médaille militaire, travaillait comme coupeur en cuirs dans l’entreprise aryanisée Krzykowski, 14 rue de Paradis à Paris Xe arr. Il fut arrêté pour "atteinte au matériel de l’armée allemande" en février 1943, puis interné à Drancy et déporté à Auschwitz où il mourut en octobre 1943.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article143131, notice VELDZLAND Maurice par Daniel Grason, version mise en ligne le 19 novembre 2012, dernière modification le 29 octobre 2021.

Par Daniel Grason

Maurice Veldzland et sa soeur Germaine Ebenstein en 1939
Maurice Veldzland et sa soeur Germaine Ebenstein en 1939
Cliché communiqué par Bernard Ebenstein

SOURCES : Arch. PPo, BA 2117, Carton 12 activité communiste pendant l’occupation, 77W 1414. — SHD AVCC, Caen, B VIII dossier 3 (Notes Thomas Pouty) et Service historique de la Défense, Vincennes GR 16 P 588069 (nc). — RGASPI, Moscou, 495 270 6853, dossier de Francine Fromond ; il a lui-même un dossier au Komintern, pas encore consulté, 495 270 4726. — Bureau Résistance GR 16 P 588069 (non homologué). — Jean Quellien, Résistance et sabotage en Normandie, Éd. Charles Corlet, 1992. — Site Internet CDJC. — Site Internet Vienne Résistance Internement Déportation (VRID). — Mémorial GenWeb. — État civil, Paris (XVIIe arr.). — Notes de son neveu, Bernard Ebenstein, 2017. — État civil.

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