Par Daniel Grason
Communiste ; volontaire en Espagne républicaine ; partisan yougoslave ; ministre.
Né le 7 avril 1914 à Trebinje en Bosnie-Herzégovine (Yougoslavie), Cedomir Kapor habitait en France, il s’engagea dans les Brigades internationales de l’armée républicaine espagnole.
Après le retrait des Brigades d’Espagne, il fut interné en France, au Vernet (Ariège), où il suivit scrupuleusement les consignes du KPJ : pas d’évasion individuelle, refus de partir dans les Compagnies de travailleurs étrangers (CTE), déclaration comme volontaire pour aller travailler en Allemagne en mai 1941, de façon à pouvoir rentrer plus facilement en Yougoslavie pour animer la résistance contre l’occupation allemande, italienne, hongroise et bulgare. En dépit de la promesse faite par les autorités nazies à leur départ, selon laquelle ils pourraient travailler librement s’ils ne faisaient pas de politique, un groupe de sept Španci (anciens d’Espagne yougoslaves), fut isolé à son arrivée dans le Reich. Outre Čedo Kapor, le groupe comprenait les Serbes Stevan Varga (1920-1988), Milan Mirčević (1912-2000) et Petar Stokić (1905-1942), le Croate Mirko Horvat (1911-1992), le Slovène Franc Prevc (1905-1977) et le Bosniaque Ahmet Fetahagić (1914-1944). Ils furent emmenés à Riesa (Saxe) dans une usine de canons, mais furent rapidement arrêtés et emprisonnés à Dresde, dans la geôle où le dirigeant du Parti communiste d’Allemagne (KPD) Ernst Thälmann avait été incarcéré avant son transfert à Buchenwald. En juillet 1941, ils furent internés dans le camp de concentration de Königsbrück, où ils furent à un régime des plus sévères : appel à 4h du matin, travail forcé de 5h au crépuscule, 25 coups de fouet en cas d’arrêt, manque d’eau et de vivres. Ils furent ensuite ramenés en septembre dans une usine à Dresde, où ils parvinrent à organiser une cellule clandestine dirigée par Čedo Kapor. Cela permit de saboter discrètement la production, et d’organiser la solidarité entre travailleurs étrangers, dont une vingtaine de jeunes Espagnols et environ 120 Soviétiques. Mais leur isolement les empêcha de bénéficier du canal d’évasion mis en place durant l’été 1941 par le KPJ plus à l’Ouest entre Dessau (Saxe-Anhalt) et Zagreb via Graz et Maribor.
Le passage dans la Résistance fut donc l’affaire d’initiatives individuelles ; si les militants communistes Ahmet Fetahagić, Mirko Horvat, Čedo Kapor et Petar Stokić parvinrent à rentrer au pays, les sans parti Milan Mirčević et Franc Prevc restèrent en Allemagne jusqu’en 1945. Stevan Varga quant à lui passa en août 1942 en Hongrie.
Čedo Kapor rejoignit pendant la guerre la Yougoslavie, fit partie des partisans qui chassèrent les nazis.
Il fut ministre pour la Bosnie-Herzégovine quand Josip Broz dit Tito dirigeait la Yougoslavie. En 1994, il fêta son quatre-vingtième anniversaire dans Sarajevo encerclée. Malgré deux ans passés sous les bombes, il restait optimiste.
Dans un entretien avec le correspondant de l’Humanité, il estimait que les peuples de l’ex-Yougoslavie pouvaient « Vivre ensemble de nouveau. Nos peuples se sont affrontés au cours de l’Histoire, pourtant, avec Tito, il y a eu cinquante ans de paix. En détruisant la Yougoslavie, on a détruit la paix. »
Par Daniel Grason
SOURCES : Arch. PPo., RG77W 1443, liste de 379 volontaires yougoslaves. – L’Humanité, 13 mai 1994. — Notes Hervé Lemesle.— Čedo Kapor, « Torture u nacističkoj Nemačkoj » [Torture dans l’Allemagne nazie], in Španija 1936-1939, op. cit., vol.4, pp.467-470.