SCHULPEN André

Par Jean-Claude Bonnin

Né le 28 janvier 1926 à Aix-la-Chapelle (Allemagne), fusillé le 23 novembre 1943 au polygone de Bourges (Cher) ; résistant dans le Cher.

André Schulpen
André Schulpen
Musée de la résistance de Bourges

Né dans une famille belge très unie, très pieuse, André Schulpen était l’aîné de six garçons. À quatorze ans, alors qu’il résidait toujours à Anvers, il assista à l’invasion allemande de la Belgique.
Ne pouvant se résigner à l’occupation nazie, aux privations qu’elle imposait et à l’ordre nouveau qui se mettait en place, il se lança dans l’action clandestine et s’engagea dans les rangs de l’Armée secrète (AS). La police allemande étant sur ses traces et sur celles de plusieurs de ses camarades, ils tentèrent de gagner la Grande-Bretagne en avion, mais l’appareil, accidenté, dut se poser en catastrophe. Les passagers se dispersèrent pour échapper aux recherches. André Schulpen choisit de passer en France et franchit clandestinement la frontière.
Il se fit arrêter en mars 1942 et fut considéré comme vagabond par la Feldgendarmerie, à laquelle il se déclara orphelin car il avait peur pour ses parents dont il ignorait le sort. Il fut alors confié à l’Assistance publique, qui l’engagea à l’Hôtel-Dieu de Bourges où il effectua divers travaux. Le 20 octobre 1942, il écrivit à sa famille, de l’Hôtel-Dieu, pour la rassurer.
À partir du 5 décembre 1942, il fut placé dans différentes fermes du Cher, la dernière en date étant celle de M. Chantereau, au Subdray. Il n’avait qu’une seule idée en tête : combattre le nazisme. En septembre 1943, il s’enfuit de chez M. Chantereau à qui il expliqua, pour brouiller les pistes, qu’il retournait en Belgique en auto avec un ami. Il parvint à entrer en contact avec les Francs-tireurs et partisans (FTP) de Roland Champenier.
C’est dans l’île d’Herry que le maquis, composé d’une trentaine d’hommes, s’était réfugié.
L’intervention de deux gendarmes français en août 1943, dans un village voisin, incita les FTP à lever le camp. Sur les conseils de deux de leurs dirigeants départementaux, André Laloue (« Joseph Dubois » ou « Desfougères »), instituteur à La Bréviande, et Roger Melnick, responsable des FTP du Cher, les maquisards décidèrent, par prudence, de scinder leur groupe en trois.
Le premier groupe gagna la Nièvre ; le deuxième, commandé par Eugène Goësse (« Spada »), se réfugia sur la commune d’Ivoy-le-Pré, près du hameau de La Bréviande ; tandis que le dernier rejoignit le bois Caché à Feux, puis le bois des Usages à Gron, non loin de la N 151, entre Bourges et La Charité-sur-Loire. C’est dans ce maquis, commandé par Jean Vaireaux (« Bourdiche »), qu’André Schulpen entra totalement dans la clandestinité. Mais pour peu de temps.
Le 17 septembre 1943, de nombreux convois allemands furent repérés sur la nationale. Vers 18 heures, les bruits des moteurs s’amplifièrent et André Schulpen fit la liaison avec le guetteur afin de rapporter des informations précises. Les deux hommes revinrent et signalèrent que plusieurs camions allemands s’étaient arrêtés en bordure de route. Sans nul doute, les partisans avaient été repérés et risquaient d’être encerclés. Jean Vaireaux ordonna aussitôt d’évacuer le bois pour en gagner un autre, presque contigu. Mais il fallait franchir un espace découvert. Lorsqu’ils y parvinrent, l’ennemi y avait déjà pris position, le piège se referma sur les patriotes. Après avoir fait feu, les résistants réussirent à s’enfuir, sans se rendre compte qu’André Schulpen ne les avait pas suivis. Il s’était tapi dans un fossé, s’était mis à prier, et se laissa capturer par les Allemands, une grenade à la main, sans opposer de résistance, sur la commune du Subdray.
Emmené au siège de la Gestapo de Bourges, le jeune résistant subit de si terribles tortures que lorsqu’on l’enferma à la prison du Bordiot il n’avait quasiment plus d’ongles, ni aux mains ni aux pieds. Dans le quartier des politiques, où on l’incarcéra, il ne vit pas les personnes des cellules voisines, mais, grâce aux tuyaux de chauffage, il apprit que ses compagnons de détention s’appelaient Michel Pluquet, Roger Melnick, Julien Guillaume, Eugène Goësse, Georges Roger, Gabriel Dordain, Raymond Savan et Eugène Poulard. André Schulpen les connaissait presque tous, car il les avait rencontrés au maquis.
Il fut condamné à mort par le tribunal militaire allemand FK 776 de Bourges le 11 novembre 1943. Il a été fusillé avec ses huit compagnons le 23 novembre 1943 au polygone de Bourges. Il n’avait que dix-sept ans.
Une rue de Saint-Germain-du-Puy porte son nom.

Dans la nuit du 22 au 23 novembre 1943, André Schulpen dicta une lettre d’adieu à sa voisine de cellule. Yvette Bonnet alors âgée d’une vingtaine d’années.
« Mes très chers parents,
« Et voici ma dernière lettre ; par la volonté de Dieu. Voilà où conduit de ne pas vouloir écouter ses parents. J’ai été condamné à mort par le conseil de guerre pour port d’armes en temps de l’Occupation et ça, il n’y a rien à faire. Sachez que j’aurais encore voulu vivre un peu, mais le Bon Dieu en a décidé autrement comme vous voyez. À présent, j’attends monsieur l’aumônier qui va venir nous confesser et communier et puis après… [...]
« Excusez-moi, je vous en prie, pensez souvent à celui qui est mort dans la France quelque part. Sachez que je meurs sans pleurer, car je sais que c’est celui qui nous a faits qui nous rappelle, Dieu donne, Dieu prend, que son Saint Nom soit sanctifié.
Je vous aime encore tous beaucoup et j’aurais voulu vous revoir avant de mourir, mais il ne faut pas que ce soit comme ça. Faîtes donc à toute la famille de mon nom le bonjour : à l’oncle Charles, à la tante Alma et à tous les autres qui ne me viennent pas à l’esprit pour le moment. " [...]

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article143900, notice SCHULPEN André par Jean-Claude Bonnin, version mise en ligne le 31 décembre 2012, dernière modification le 23 novembre 2021.

Par Jean-Claude Bonnin

André Schulpen
André Schulpen
Musée de la résistance de Bourges

SOURCES : DAVCC, Caen, B VII 4 (Notes Thomas Pouty). – Musée de la Résistance de Bourges, Fonds « Louise Belleray » (2686), Dossier FTP (2684), carte de résistant d’André Schulpen (27581). – Collection du journal Le Berry républicain.

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