MAZY Paul [dit Cluny]

Par Daniel Grason

Né le 23 août 1909 à Limoges (Haute-Vienne), fusillé par condamnation le 21 novembre 1942 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; électricien monteur à la SNCF ; militant communiste ; résistant, membre des FTPF.

Paul Mazy
Paul Mazy

Fils d’Henri Mazy, conducteur au chemin de fer, et de Marie, née Chaubier, couturière, Paul Mazy obtint à l’issue de l’école primaire son certificat d’études primaires. Il effectua son service militaire en 1929 à Périgueux. Venu en région parisienne, il travaillait comme électricien à l’atelier de la SNCF, 7 bis boulevard Masséna à Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne). En septembre 1939, il fut affecté spécial sur son lieu de travail jusqu’en juin 1940. Il épousa le 27 avril 1940 Raymonde Mellet en mairie du XIIIe arrondissement de Paris. Le couple habitait 4 rue des Champs-Familiaux à Ivry-sur-Seine.
Quelque temps après l’attaque des troupes allemandes contre l’Union soviétique le 22 juin 1941, Raymond Müller, un collègue d’atelier, lui demanda d’adhérer au Parti communiste. Paul Mazy donna son accord. En juillet 1942, il le sollicita pour distribuer des tracts de l’organisation et il donna une nouvelle fois son accord. Puis, selon Mazy, en juillet 1942, Müller lui dit qu’il fallait y aller à fond, participer à des distributions de tracts à l’extérieur de l’entreprise, mais dans les ateliers d’entretien de la SNCF, faire le plus de destruction possible. Paul Mazy prit peur et se tint à l’écart de toute action de ce type.
Le 27 août trois prises de parole se déroulèrent rue Balard, près des usines Citroën dans le XVe arrondissement, aux abords de l’usine SNCASO à Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine), et aux usines Renault de Boulogne-Billancourt. Dans ce dernier lieu, plusieurs militants furent appréhendés dont trois armés. Le responsable des groupes de protection, René Sevi, fut arrêté à proximité des usines Citroën. Lors de la perquisition de son domicile 4 square Emmanuel-Chabrier (XVIIe arr.), des inspecteurs des Brigades spéciales saisirent une liste de militants : Paul Mazy y figurait avec le pseudonyme de Cluny.
Le samedi 5 septembre, René Villars, un autre collègue membre du groupe, vint le voir, il ne savait comment se débarrasser d’explosifs. Un train devait partir à Bordeaux ; il lui suggéra de placer la bombe sous la banquette d’un compartiment dans un wagon de 2e classe réservé à des soldats allemands. Paul Mazy accompagna Villars qui plaça la bombe sans s’assurer que le système d’horlogerie fonctionnait. Le train fit l’aller et retour Paris-Bordeaux, sans que l’engin n’explose.
Trois inspecteurs de la BS1 arrêtèrent Paul Mazy le 8 septembre à son domicile ivryien. Conduit dans les locaux des Brigades spéciales, il y fut détenu une huitaine de jours, battu lors des interrogatoires. Détenu au Dépôt, incarcéré ensuite à la prison de la Santé, mis le 12 octobre 1942 à la disposition de la Geheimfeldpolizei (GFP) chargée de la lutte contre la Résistance intérieure et extérieure. Cet organisme de répression qui comptait une centaine d’hommes siégeait à l’hôtel Bradford.
Paul Mazy fut jugé par un tribunal militaire allemand et condamné à mort le 11 novembre 1942 pour « appartenance aux francs-tireurs et intelligence avec l’ennemi ». Fusillé le 21 novembre à Suresnes avec quatre camarades, dont René Villars et Antoine Thomas, il fut inhumé au cimetière d’Ivry-sur-Seine.
Marie Mazy, son épouse déposa plainte contre les auteurs de l’arrestation de son mari le 5 décembre 1944. Elle témoigna devant la commission d’épuration de la police que son mari « portait la trace de coups qu’il avait reçus ». « Mon mari [fut] maltraité » déclara-t-elle. Le soir de son arrestation, appréhendée aussi, elle l’avait vu dans les locaux des Brigades spéciales ; il lui fit signe qu’il souffrait des coups reçus.
Elle porta plainte contre les inspecteurs qui arrêtèrent son mari.
Le 5 décembre 1944, elle témoigna devant une Commission rogatoire. Elle rappela qu’il avait « été arrêté à son travail, 8 boulevard Masséna, à Paris XIIIe, par trois inspecteurs, sous l’inculpation d’activité communiste. »
« Ces trois inspecteurs l’ont immédiatement conduit à notre domicile où ils ont effectué une perquisition qui est demeurée sans résultat. »
« Mon époux a été ensuite conduit dans les locaux des Brigades spéciales où il a été maltraité ; en effet, le soir même de son arrestation, je me suis présenté sur convocation, à la Préfecture de police, et j’ai pu apercevoir mon mari, qui, a demi dévêtu, m’a fait signe qu’il souffrait dans le côté et j’ai alors remarqué qu’il portait au visage la trace de coups. »
« Mon mari a été gardé aux Brigades spéciales pendant une huitaine de jours. Il a été ensuite mis à la disposition des Allemands et incarcéré à Fresnes. »
« Il a été jugé par un tribunal allemand et condamné à mort comme FTP. »
« J’ai alors été autorisé à venir le voir. Il paraissait avoir beaucoup souffert, tant des coups que des privations endurées. J’ai appris huit jours plus après qu’il avait été fusillé le 21 novembre 1942 au fort du Mont-Valérien. »
Raymonde Mazy porta plainte contre les inspecteurs qui procédèrent à l’arrestation de son mari.
Paul Mazy a été homologué au titre des Forces françaises combattantes (FFC) d’obédience gaulliste, et Interné résistant.
Le nom de Paul Mazy figure sur une plaque commémorative à la Bourse du Travail de Paris (Xe arr.) avec la mention « Résistance-Fer », ainsi que sur le monument aux morts d’Ivry-sur-Seine ; le conseil municipal donna son nom à la rue où il habitait, rue des Champs-Familiaux.
La mention « Mort pour la France » fut ajoutée à son acte de décès en 1947 ; en qualité de chargé de mission 3e classe, il a été homologué Interné résistant sous-lieutenant des Forces françaises combattantes (FFC) en 1963 : l’attestation circonstanciée a été établie par P. Docquois, chef de réseau.

Dernière lettre (version partielle)
« Ma femme chérie, mon amour.
Je n’ai plus que quelques heures à vivre. A midi, je ne serai plus. (...) Je n’irai pas à la mort en chantant mais en pensant à toi, à vous tous (...) Mon dernier souhait est que tu sois heureuse car tu le mérites et que tu trouves un jour un autre petit mari qui t’aimera comme je t’ai aimé (...)
Adieu, adieu amour, mon aimée, dans une heure tout est fini. »

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article144241, notice MAZY Paul [dit Cluny] par Daniel Grason, version mise en ligne le 20 janvier 2013, dernière modification le 22 novembre 2022.

Par Daniel Grason

Graffiti dans la chapelle des fusillés du Mont-Valérien.
Source : exposition Un jour, un graffiti, 2019, Mont-Valérien.
Paul Mazy
Paul Mazy

SOURCES : Arch. PPo. BA 2117, PCF carton 13 rapports hebdomadaires sur l’activité communiste, GB 107, KB 30, KB 48, KB 74, KB 96, 77 W 5357-301497. – Arch. com Ivry-sur-Seine. – DAVCC, 21 P 595 218 (Notes Thomas Pouty et Annie Pennetier). – SHD, Vincennes (Bureau Résistance), GR 16 P 407813. – Site Internet du Mont Valérien. – Site Internet Mémoire des Hommes. – Mémorial GenWeb. – État civil, Limoges.

Photographie : Arch. PPo. GB 160

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