PINTELON Ferdinand. [Belgique]

Par Jean Puissant

Bruxelles (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale), 26 janvier 1862 − Houdeng-Goegnies (aujourd’hui commune et arr. La Louvière, pr. Hainaut), 28 (?) septembre 1934. Cordonnier, militant anarchiste, gérant d’un magasin coopératif, conseiller communal et bourgmestre, représentant le Parti ouvrier belge, de Houdeng-Goegnies.

Ferdinand Pintelon, ouvrier cordonnier, vit au centre de Bruxelles, rue de la Mâchoire, puis en 1880 à la rue de la Grande Île. Une note de police de 1886 le qualifie d’indigent, même s’il bénéficie d’une instruction primaire et qu’il a fréquenté l’école d’enfants de troupe de 1874 à 1879, et d’anarchiste actif depuis 1885 dans un petit groupe en croissance à l’époque. Il participe ainsi à la naissance et à l’existence d’un nouvel organe, Ni Dieu, ni maître, qui parvient à se doter d’une imprimerie. Mais les événements de mars 1886 en ont raison. Le groupe diffuse un tract appelant « à la reprise » révolutionnaire dans les « galeries » et au quartier Léopold, en écho aux pillages qui ont suivi la commémoration de la Commune par les anarchistes liégeois le 18 mars. Les enquêtes judiciaires provoquent la disparition du journal.

En octobre 1886, Ferdinand Pintelon est gérant d’un nouveau titre, La Liberté, dont le premier numéro paraît le 23 du même mois. En 1887, il participe, dans le Centre (pr. Hainaut) en particulier, au soutien d’anarchistes à la tentative d’Alfred Defuisseaux* de créer le Parti socialiste républicain. Si cette opération est potentiellement « révolutionnaire », ce qui attire les anarchistes, elle est strictement politique (revendication du suffrage universel). Le Parti ouvrier belge (POB) résiste dans l’ensemble, en particulier grâce à ses coopératives comme Le Progrès à Jolimont, près de La Louvière. Les 7 et 8 octobre 1888, Pintelon participe, avec Paul Conreur*, à des meetings de protestation contre l’expulsion de Emmanuel Chauvière à La Louvière et à Frameries (pr. Hainaut, arr. Mons).

En juin 1891, une fédération anarchiste se crée dans le Centre. Fort de ses contacts antérieurs, Ferdinand Pintelon participe au débat dans les sections locales qui se manifestent. Lors du Congrès de l’Internationale socialiste à Bruxelles en août 1891, les anarchistes européens tentent de se faire entendre et de proposer une motion défendant la dissolution de toutes les organisations centrales. Ils (dont Pintelon) sont exclus du Congrès. Ils organisent conférences et meeting (500 personnes ?) pour protester et défendre les positions anarchistes. Ferdinand Pintelon fait partie des orateurs, avec Henry Wysmans et l’espagnol Fernandez Ramos. En 1890, un nouvel hebdomadaire, dont il est une des chevilles ouvrières, paraît : L’Homme libre mais pour six mois seulement.

En 1893, la lutte pour la révision constitutionnelle est à l’origine d’une importante agitation. Les anarchistes publient La débâcle dont Ferdinand Pintelon est signalé comme imprimeur, puis administrateur. Elle est sous-titrée Organe de combat pour l’émancipation des travailleurs. Il disparaît des observations à cette époque. Jan Moulaert signale qu’il se serait installé dans le Centre, ce qui expliquerait l’efflorescence régionale. Pintelon a donc été, pendant près de dix ans, un des anarchistes les plus actifs de la capitale.

Le Centre offre à Ferdinand Pintelon une nouvelle vie. En effet en 1910, il prend la gérance du magasin coopératif, Le Progrès, à Houdeng-Goegnies. Il est élu conseiller communal en 1921 et devient bourgmestre dans la foulée. Le POB détient désormais la majorité absolue avec sept sièges contre deux au Parti libéral, jusqu’alors dominant, et deux au Parti catholique, et la conserve ensuite.

Dans la notice qui est consacrée à Ferdinand Pintelon dans La Belgique active (inspirée par lui), il n’est pas question d’activité politique, mais d’un profil « d’homme d’œuvres… philanthrope ». « Il s’est toujours occupé d’œuvres sociales. » Il est membre du Comité de la société coopérative de logement Le Home familial, du Comité de patronage des habitations ouvrières de l’arrondissement de Soignies, de la Compagnie intercommunale de distribution d’eau. Il préside la Consultation des nourrissons. Il s’intéresse à la défense du commerce local à la création et à l’organisation de la Braderie de la Pentecôte (1926). « Sa grande bonté l’a incité à s’occuper d’œuvres de protection animale » : protection du cheval de mine, des oiseaux. Il s’occupe également de développer les sociétés horticoles, il conférencie volontiers à ce propos. Il s’agit d’un des objectifs de la Commission provinciale des loisirs ouvriers. Il se serait « acquis la sympathie et la considération générale de tous ses administrés. » (La Belgique active, 1934).

Ferdinand Pintelon décède durant son mandat « après une courte maladie ». Parcours contrasté d’un militant anarchiste radical dans sa première vie, se donnant l’image d’un notable provincial par la suite mais de gauche. Parcours sans doute plus commun qu’on ne le pense.

En 1902, on signale un Pintelon dans un meeting antimilitariste et un conseiller communal de ce nom à Chapelle-lez-Herlaimont (pr. Hainaut, arr. Charleroi) toujours dans le bassin du Centre.

À consulter également ENCKEL M., SNEYERS H., Pintelon Ferdinand, dans Dictionnaire des anarchistes, Site Web : maitron.fr.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article144630, notice PINTELON Ferdinand. [Belgique] par Jean Puissant, version mise en ligne le 3 février 2013, dernière modification le 4 octobre 2023.

Par Jean Puissant

SOURCES : Archives de la ville de Bruxelles, fonds de la Police, n° 177 18 − Archives de la ville de La Louvière − La Belgique active. Monographie des communes belges et biographie des personnalités. Province de Hainaut, Bruxelles, 1934 − MOULAERT J., Le mouvement anarchiste en Belgique 1870-1914, Ottignies-Louvain-la-Neuve, 1996 − DELPLANCQ T. (dir.), La Louvière aux urnes. Vie et combats politiques dans l’entité louviéroise du 19e siècle à l’an 2000, La Louvière, 2007.

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