CLAJOT Jean.

Par Jean Neuville - Jean-Paul Mahoux

Hollogne-aux-Pierres (aujourd’hui commune de Grâce-Hollogne, pr. et arr. Liège), 4 septembre 1873 – Liège (pr. et arr. Liège), 29 mai 1950. Ouvrier mineur, gérant de magasin et de café dans le mouvement coopératif socialiste, militant puis dirigeant fédéral socialiste dans le secteur de la mine et à la Commission syndicale, conseiller communal et échevin de Liège, conseiller provincial de Liège.

Né dans une famille de mineurs liégeois, Jean Clajot entre à la mine en 1885 à l’âge de douze ans. Selon Nicolas Dethier*, les grèves de mars 1886 déterminent son engagement dans le mouvement ouvrier. Ne sachant ni lire ni écrire, il s’instruit grâce aux leçons données par sa femme, M. Dejace. Licencié en octobre 1900 en raison de ses activités syndicales, Jean Clajot devient gérant d’un des magasins de l’Union coopérative de 1901 à 1904 puis gérant de la Maison du peuple de Liège et tenancier du café de la coopérative La Populaire de 1904 à mars 1913. Durant cette période, il est secrétaire du Syndicat des mineurs de Hollogne-aux-Pierres au nom duquel il dépose, le 22 juillet 1907, devant la Commission d’enquête sur la durée du travail dans les mines de houille (section de Liège, groupe de Seraing). Il est délégué du syndicat Le Réveil des métallurgistes de son village natal aux congrès de la Commission syndicale de 1907 et de 1908.

Le 3 mars 1913, Jean Clajot est élu à l’unanimité secrétaire de la Fédération des mineurs de Namur (pr. Namur). Bien que remplaçant Albert Désiré, il devient le premier secrétaire permanent de cette fédération. Celle-ci tient un congrès à Tamines (aujourd’hui commune de Sambreville, pr. et arr. Namur) afin de relancer le syndicalisme dans les mines de la province, en crise depuis l’échec du Syndicat général des mineurs de la Basse-Sambre, créé en 1906 et dissous en 1912. La grève générale en faveur du suffrage universel de 1913 est un succès dans la région mais l’action syndicale de Jean Clajot est interrompue par l’invasion allemande d’août 1914. La Maison du peuple de Tamines qui abrite les organisations socialistes de la région, est détruite.

L’occupation allemande qui s’ensuit n’empêche pas Jean Clajot de poursuivre son action syndicale. Au printemps 1915, avec d’autres, il s’élève contre le maintien des salaires réduits. Des lettres dans ce sens sont envoyées aux directeurs des charbonnages du bassin, sans résultat. Suite à la décision du Bureau de la Fédération namuroise du 16 novembre 1915, Clajot entreprend officiellement la reconstruction syndicale en dépit des injonctions de l’occupant allemand. Le 19 août 1916, le mouvement tient une séance d’information sur la question des salaires à Ham-sur-Sambre, au cours de laquelle il est décidé de réclamer une augmentation journalière de 50 centimes et 200 kilos de charbon gratuit pour tous les chefs de famille. Ce dernier point est accepté par les directeurs qui rejettent l’augmentation salariale. La grève éclate le 1er septembre. Elle dure jusqu’au 16 septembre, date à laquelle une convention est finalement passée. Les mineurs obtiennent gain de cause.

De février à mars 1917, Jean Clajot conduit la grève des mineurs du puits Saint-Paul appartenant aux Charbonnages de Gives et Ben réunis à Ben-Ahin (aujourd’hui commune de Huy, pr. Liège, arr. Huy). Le salaire versé à ces mineurs étant inférieur à celui payé avant-guerre, il réclame le versement d’indemnités de chômage involontaire aux grévistes par le Comité local de secours et d’alimentation. Ce dernier refuse mais Jean Clajot obtient gain de cause auprès du Comité de secours de Huy, dirigé par H. Debarsy*. Entre 1916 et 1918, il s’emploie à faire appliquer les lois sociales votées avant la guerre : neuf heures de travail pour les ouvriers mineurs, pensions des mineurs, réparation des accidents de travail. Les succès engrangés pendant la guerre et la propagande menée avec Alexandre Hubert*, président de la Centrale des mineurs, rendent le taux de syndicalisation du bassin de Namur proportionnellement comparable à ceux des autres bassins et ce, malgré la dispersion de la main-d’œuvre dans la région.

Après l’Armistice de 1918, Jean Clajot remet en route la Fédération des mineurs de Namur, ce qui lui vaut d’être, à partir de 1921, membre du Comité national de la Centrale syndicale des travailleurs des mines de Belgique. Il garde ce mandat jusqu’en 1939. Il est également rapporteur de sa fédération aux congrès bisannuels de la Centrale qu’il représente à la Commission paritaire mixte des mines. Il est délégué au Congrès international des mineurs à Prague en 1937. De 1913 à 1938, il est correspondant, pour Namur, du journal mensuel, L’ouvrier mineur, où il tient occasionnellement la rubrique nécrologique.

Au cours des années 1930, Jean Clajot tente d’enrayer le recul des effectifs de la Centrale de Namur, dû au déclin économique du bassin minier, aux démêlés avec les communistes notamment des incidents aux Charbonnages de Tamines en juillet 1935, et à la rivalité avec le Syndicat chrétien des francs-mineurs. Cette perte de membres confère à sa Centrale un rôle de plus en plus réduit au sein de l’organisation nationale.

Simultanément à son travail au sein du syndicat des mineurs, Jean Clajot exerce la fonction de secrétaire de la régionale interprofessionnelle des syndicats de Namur. En 1939, son temps de travail est toujours réparti entre ces deux fonctions. Au titre de secrétaire de la régionale, il représente celle-ci au Comité de la Commission syndicale (CS) de 1921 à 1923, période « très prospère » pour la fédération de Namur. En 1924, il ne figure plus comme délégué au comité de la CS. Cette année-là, le terme « socialiste » est supprimé dans l’appellation de la fédération qui est devenue Fédération générale des syndicats de l’arrondissement de Namur. La Fédération des mineurs de Namur s’est, à cause de cette modification, désaffiliée de la fédération interprofessionnelle. En 1924 encore, la Fédération de Dinant-Philippeville, fondée en 1921, fusionne avec celle de Namur. Le 13 novembre 1928, Jean Clajot est à nouveau membre du Comité de la CS. Les mineurs s’affilient à la régionale interprofessionnelle qui adopte une nouvelle appellation : la Fédération des syndicats socialistes et indépendants de la province de Namur. Le 1er septembre 1931, la Fédération de Dinant-Philippeville est rétablie et dotée d’un secrétaire permanent.

Fondateur d’une amicale des mineurs pensionnés en mars 1937, Jean Clajot abandonne progressivement la lutte syndicale. Il devient président d’honneur de la Centrale des mineurs de Namur de février 1938 - suite au départ de A. Hubert - à octobre 1944. En 1939, il cède son siège au Comité national à Joseph Dedoyard.

L’action syndicale intense de Jean Clajot se complète d’une action politique. Conseiller communal à Liège depuis le 15 février 1915, il devient échevin des Travaux publics en 1944. Il est conseiller provincial de 1925 à 1949.

Jean Clajot décède d’une congestion en mai 1950. La ville de Liège lui organise des funérailles officielles.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article144693, notice CLAJOT Jean. par Jean Neuville - Jean-Paul Mahoux, version mise en ligne le 5 février 2013, dernière modification le 8 décembre 2019.

Par Jean Neuville - Jean-Paul Mahoux

ŒUVRE : Centrale syndicale des mineurs de la province de Namur. Son action pendant la guerre, Auvelais, 1919.

SOURCES : DETHIER N., Centrale syndicale des travailleurs des mines de Belgique - 60 années d’action 1890-1950, La Louvière, 1950, p. 254-255 – L’ouvrier mineur, 1913-1950 – La Meuse, 31 mai 1950, p. 2 et 2 juin 1950, p. 2 – SERWY V., La coopération en Belgique, t. IV : La vie coopérative - Dictionnaire biographique, Bruxelles, 1952, p. 112 – Juin 1912 à Liège. Textes présentés et recueillis par Léon-Élie Troclet, s.l., 1980, p. 21, 41-44, 76 – GANY B., Histoire des fédérations 1885-1985. Namur-Dinant-Philippeville, Bruxelles, 1985, p. 58 (Mémoire ouvrière, 9).

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