PACINI Alfred

Par Michel Pigenet

Né en 1921 à Marseille (Bouches-du-Rhône), manœuvre, métallurgiste, puis docker, primeuriste, syndicaliste, communiste, membre du comité de la fédération des Bouches-du-Rhône du PCF (1952-1955).

Alfred Pacini naquit à Marseille (Bouches-du-Rhône), en 1921. 1921. Fils d’un docker toscan immigré à Marseille et mort en 1934, il quitta l’école à dix ans et demi afin d’aider sa mère en charge de neuf enfants. Il occupa tour à tour, au sortir des emplois de livreur de charbon, boulanger et manœuvre dans une fabrique de meubles. Licencié pour fait de grève en 1936, année de son adhésion aux Jeunesses communistes, il bifurqua vers la métallurgie, travailla comme chauffeur de rivets aux Chantiers de Provence en 1937, puis dans différentes entreprises de la branche et fut renvoyé de l’une d’elles au lendemain de la grève du 30 novembre 1938. Membre du PCF (section Saint-Mourout-Bellevue) depuis plus d’un an à la déclaration de guerre, Alfred Pacini participa à des actions clandestines de la JC et vécut de petits boulots avant de partir en Chantier de Jeunesse au début de 1942. Dispensé du STO, père d’un enfant en 1943, il appartint à une “ équipe spéciale ” des FTP en 1944. Il voulut s’engager à la Libération, mais, réformé pour des raisons médicales, il anima le cercle UJRF et le club de football du quartier de Bellevue. Affecté par un ulcère à l’estomac, les suites de l’opération intervenue en 1946 lui imposèrent une convalescence de près d’un an. Militant en pointe pendant les grèves de 1947, il accéda à la direction de la section Saint-Mourout.
Embauché à titre occasionnel dès 1948, il obtint la carte de docker professionnel. Ses aptitudes lui permirent d’acquérir la spécialisation plus rémunératrice de primeuriste dans le milieu des années 1950. Entre-temps, Alfred Pacini, muté à la section Port et Marine, avait participé activement à la dure grève de 1950 qui lui valut d’être délégué au XIIe congrès du PCF tenu en avril 1950, mais aussi de subir une sévère mise en quarantaine à l’embauche. Membre de la délégation française à la conférence européenne des syndicats pour le désarmement convoquée à Berlin en 1951, il fut également désigné pour assister au congrès mondial de la Paix réuni à Vienne en 1952. Cette année-là, Pacini accéda au secrétariat de la section Port et Marine ainsi qu’au comité fédéral des Bouches-du-Rhône. A l’automne, la brutale dégradation de l’état de santé de son épouse, contrainte de partir en sanatorium pendant que leurs enfants étaient hébergés par leur grand-mère maternelle, ajoutèrent aux difficultés liées à l’irrégularité des revenus. Toujours militant, il entra, en 1953, au conseil municipal de Marseille où il siégea à la commission du logement, mais ne fut pas reconduit, l’année suivante, au comité de la fédération du PCF.

Esprit pratique habitué à prendre des initiatives, Alfred Pacini sut se faire apprécier par ses employeurs en dépit de son engagement politique et syndical. Sans doute celui-ci pesa-t-il sur sa carrière professionnelle. Il ne gravit pas moins quelques-uns des échelons de la hiérarchie portuaire pour atteindre le niveau de contremaître - chef de courrier -. Fondées sur sa propre expérience, les positions qu’il défendit en matière de mensualisation et de diversification des structures syndicale provoquèrent un tollé au sein de la Fédération nationale des Ports et Docks, déjà mal disposée à l’égard des syndicalistes marseillais. Ainsi en alla-t-il lorsque, à l’occasion du congrès de 1966, il lia le rétablissement cégétiste sur les quais phocéens à la création d’organisations distinctes pour les différentes catégories de travailleurs du port. Outre la formation d’un syndicat des primeuristes, il se félicita de l’existence de celui des conducteurs d’engins dans lequel la Fédération, attachée à la loi de 1947, voyait un germe de division d’autant plus menaçant qu’il aboutissait à banaliser le développement d’une mensualisation incompatible avec la défense du statut des dockers professionnels intermittents. Sans diplomatie excessive, il estima que le rapport présenté par Gaston Henry, le secrétaire général adjoint de la Fédération, prouvait seulement qu’il ne comprenait rien au problème. Il revint à la charge en 1970. Plus direct encore que la fois précédente, Pacini mit en cause la pseudo “ liberté ” des intermittents et vanta les acquis syndicaux des “ mensuels ” marseillais. “ Si nous continuons à rester conservateurs, à rester sur de vieux rails, à ne pas regarder la réalité (...), que se passera-t-il après-demain ? ”, lança-t-il à ses camarades invités aborder l’avenir de façon plus audacieuse. Désapprouvée par l’écrasante majorité des congressistes, cette position ne faisait pas l’unanimité à Marseille même. Peu après, il cessa de siéger au bureau central de la main-d’œuvre, organisme paritaire chargé de superviser l’embauche où l’ancien secrétaire du comité de grève du printemps 1968 avait été désigné, dans la foulée des événements, au titre de représentant des agents de maîtrise. En mars 1982, il décida de partir en retraite anticipée.
Fiancé en 1938 avec la fille d’un communiste italien, il l’épousa. Leur premier enfant naquit en 1943. Au total, Alfred Pacini eut deux filles et deux garçons qui, l’un et l’autre, devinrent dockers. Marc, le cadet, entré sur le port après le baccalauréat, en 1982, syndicaliste et communiste, y travaillait toujours vingt ans plus tard..

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article144695, notice PACINI Alfred par Michel Pigenet, version mise en ligne le 5 février 2013, dernière modification le 5 avril 2022.

Par Michel Pigenet

ŒUVRE : (avec D. Pons), Docker à Marseille, Payot, 1996.

SOURCES : Centre des archives contemporaines : 870150, art. 143. Archives du comité central du PCF. Congrès de la Fédération nationale des Ports et Docks, les 22-23 juin 1966 ; 18-19 juin 1970 (Paris). — J.-C. Lahaxe, Les communistes à Marseille à l’apogée de la guerre froide (1949-1954). Organisations et militants, engagements et contre-société, thèse d’Histoire (dir. J.-M. Guillon), Aix-Marseille I, 2002.

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