WIRTHEIM Israël, Isydor

Par Daniel Grason

Né le 4 mars 1897 à Cracovie (Pologne), fusillé comme otage le 21 février 1942 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; artisan fourreur.

Fils de Kalman Wirtheim et de Marie Wirtheim, née Danzig, Israël Wirtheim, célibataire, habitait 39 rue du Repos, à Paris (XXe arr.). Il était entré en France le 31 juillet 1929, nanti d’un passeport délivré à Trieste (Italie), par le consulat de France. Ouvrier fourreur, il travaillait pour la maison Bozzi, installée dans le XXe arrondissement et il était soumis aux aléas des patrons fourreurs qui embauchaient au travail à la pièce. Pour y échapper, il avait demandé, le 30 mars 1938, son admission dans le cadre des artisans ; cela lui fut refusé par une décision en date du 19 avril 1938. En conformité avec les ordonnances en vigueur concernant les Juifs et la législation régissant le séjour des étrangers, une carte d’identité lui fut délivrée, après un avis favorable, au titre d’ouvrier fourreur, valable jusqu’au 22 octobre 1941. Une lettre anonyme, datée du 1er septembre 1941, parvint au chef de la Kommandantur : « En ces temps où notre pays a besoin plus que jamais de discipline pour la bonne cause de la collaboration avec votre pays, je tiens à vous signaler qu’il existe encore des éléments communistes en notre ville. Ceux-ci en relation directe avec les Soviets de Russie et continuant encore leur activité sur notre territoire. Cet élément, un Juif polonais [...] se promène tranquillement alors qu’il ne se trouve pas dans un camp de concentration. [...] Cet individu a été refoulé d’Allemagne en 1930 et il lui est interdit d’avoir un emploi salarié en France. [...]. »
Une copie dactylographiée, fut transmise à la direction des Renseignements généraux. Un inspecteur de ce service fit une enquête, et concluait : « Dénoncé comme communiste par lettre anonyme, mais aucune preuve à charge ne fut établie ». Une perquisition eut lieu le 11 octobre 1941 au domicile de Israël Wirtheim : on y découvrit sa correspondance en polonais, mais « aucun document suspect » ne fut trouvé. Dix-sept autres visites domiciliaires s’avérèrent tout aussi infructueuses au domicile de Juifs signalés comme suspects. Louis Sadosky, responsable du « rayon Juif » au sein de la Section spéciale de recherches (SSR) qui avait été créée en 1937 au sein des Renseignements généraux, falsifia les rapports des inspecteurs.
En ce même jour du 11 octobre 1941, Israël Wirtheim fut arrêté et envoyé au camp de Drancy (Seine, Seine-Saint-Denis). Sur sa fiche d’entrée figuraient les fausses accusations écrites par le brigadier-chef Louis Sadosky dans une note : « Propagandiste communiste suspect au point de vue politique, susceptible de constituer un élément dangereux pour l’ordre intérieur ».
À la suite d’attentats commis contre des militaires allemands à Rouen (Seine-Inférieure, Seine-Maritime) le 4 février 1942 et à Tours (Indre-et-Loire) dans la nuit du 5 au 6 février 1942, les Allemands décidèrent de fusiller ou de déporter cinquante otages en représailles ; ils désignèrent quatorze otages à exécuter au Mont-Valérien dont treize Juifs internés au camp de Drancy : Szmul Balbin, Abraham Gärtner, Léon Jolles, Josef Kape, Max Kawer, Mordka Korzuch, Towja Lipka, Samuel Marhaim, Aron Miller, Jankiel Minsky, Israël Rubin, Lejbus Wajnberg et Israël Wirtheim, ainsi que Henri Debray militant communiste interné à à la prison de la Santé à Paris (XIVe arr.).
Israël Wirtheim fut passé par les armes le samedi 21 février 1942 au Mont-Valérien avec les treize autres otages. Il fut inhumé au cimetière parisien d’Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne) le lundi 23 février 1942, division 39, ligne 2, n° 42.
Le nom de Israël Wirtheim figure sur la cloche du Mémorial de la France combattante au Mont-Valérien.

L’abbé Franz Stock évoque les 13 Juifs exécutés le 21 février 1942 dans son Journal de guerre :

« Samedi 21.2.42
14 exécutions.
Venu me prendre à 8h pour le Cherche-Midi, 14 otages doivent être exécutés à 11 heures : 13 juifs, d’origine germano-polonaises, du camp de Drancy ; un Français de la Santé.
....
Un jeune juif me dit : "Ils peuvent bien nous tuer mais d’autres se lèveront, il est impossible d’exterminer la race juive." Certains juifs étaient pieux, récitaient des psaumes, l’un s’est entouré de son châle de prière en soie, il voulait être enterré avec. Question : aucun rabbin ne vient ? Les 14 doivent être enterrés lundi seulement. Le seront à Ivry. »

Voir Mont-Valérien, Suresnes (Hauts-de-Seine)

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article144899, notice WIRTHEIM Israël, Isydor par Daniel Grason, version mise en ligne le 10 février 2013, dernière modification le 24 janvier 2022.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo., BA 2439, 77W 65, KB 95. — DAVCC, Caen, B VIII (Notes Thomas Pouty). — Louis Sadosky, brigadier-chef des RG, Berlin 1942, CNRS Éd., 2009. — S. Klarsfeld, Le livre des otages. — Site Internet Mémoire des Hommes. — MémorialGenWeb. — Franz Stock, Journal de guerre. Écrits inédits de l’aumônier du Mont Valérien, Cerf, 2017, p. 66. — Répertoire des fusillés inhumés au cimetière parisien d’Ivry.

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