MIR Mathilde [née MIR Francine, Mathilde, Sidonie, Marie]

Par Jacques Girault

Née le 23 août 1896 à La Bastide-de-Sérou (Ariège), morte le 8 décembre 1958 à Auzat (Ariège) ; inspectrice primaire en Charente et en Seine-et-Oise ; militante socialiste ; résistante, adjointe au maire d’Angoulême (Charente).

Mathilde Mir
Mathilde Mir

Fille d’instituteurs, Mathilde Mir entra à l’École normale d’institutrices de Foix (Ariège) puis intégra l’École normale supérieure de Fontenay-aux-Roses (lettres) en 1920. Titulaire du certificat d’aptitude au professorat des écoles normales et des écoles primaires supérieures (lettres-espagnol), elle fut nommée professeur aux écoles primaires supérieures de Decazeville (Aveyron) en 1922, de Limoux (Aude) en 1925, puis de Foix en 1926, avant d’être détachée en troisième année de l’ENS de Fontenay-aux-Roses où elle obtint le certificat d’aptitude à la direction d’écoles normales et à l’inspection primaire en 1928. Elle refusa de diriger l’ENI de Mende (Lozère) et fut nommée professeur à l’ENI de Toulouse en 1929, avec un complément de service à l’EPS. Elle suivit pendant cette période les cours d’histoire et de lettres de la faculté des lettres.

Mathilde Mir fut nommée directrice de l’École normale d’institutrices d’Angoulême en 1932. Jugée excellente par les inspecteurs, elle se montra active dans l’aide aux réfugiés espagnols à la demande des autorités préfectorales, contacts facilités par sa connaissance de la langue. La presse de droite entama une campagne contre elle, l’accusant de communisme, et la poursuivit au début de la guerre. Ainsi Le Réveil charentais, « journal républicain-démocrate libéral des intérêts agricoles, commerciaux et industriels » l’accusa, le 8 décembre 1940 d’avoir « refusé d’obéir aux ordres de son ministre », de « commenter le matin de la rentrée des classes les paroles du maréchal Pétain, chef de l’Etat ». Les Allemands occupant son logement à l’école normale depuis un trimestre, elle vivait dans un appartement de l’EN de garçons qu’elle dirigeait à la suite de la mobilisation du directeur. Attaquée pour ce cumul, elle se justifia de façon véhémente. Suivant les consignes de Radio-Londres, elle participa à la célébration de la fête de Jeanne d’Arc et à la commémoration du 14 juillet 1941. Les attaques dans la presse ne cessaient pas.

Ne recevant pas, après la fermeture des écoles normales, en dépit de son mérite, la direction d’un des nouveaux centres de formation professionnelle, elle fut rétrogradée et on lui proposa de diriger l’EPS de Perpignan (Pyrénées-Orientales). Elle refusa un poste d’inspectrice primaire dans les Landes et accepta en 1942 celui de Cognac. Elle exerça son métier, apportant beaucoup en raison de son intérêt sur les aspects moraux et sociaux de l’enfance.

Mathilde Mir, ancienne militante socialiste SFIO, s’occupa du jeune frère de Gontran Labregère, résistant, qui venait d’être fusillé. Contactée par Augustin Maurellet, elle entra au groupe de l’Organisation civile et militaire et en fut la responsable dans la région de Cognac. Dénoncée par le journal du Parti populaire français, Assaut, comme une « aventurière de la politique » et un « dragon de l’Académie », communiste, franc-maçonne et gaulliste, elle fut interrogée, sans suite, par la police allemande en janvier 1942. Après la dissolution du groupe de l’OCM, elle adhéra à « Libération Nord ». Devenue chef du mouvement, elle constitua un groupe d’agents de liaison à partir des instituteurs et institutrices, exploitant les voyages pédagogiques qu’elle organisait. Elle s’occupa notamment d’un itinéraire entre la Charente et Auzat en Ariège pour le passage en Espagne, qu’utilisèrent des résistants et des envoyés de Londres. En mars 1944, le Comité départemental de Libération fut créé dans la clandestinité et elle en devint membre comme représentante de « Libération ». Elle échappa, le 30 août 1944, à la Milice chargée de l’exécuter. La Charente libre parut et elle fut membre de son conseil d’administration. Après la libération d’Angoulême, le CDL fut élargi et elle participa aux commissions des municipalités, de la presse et de l’information, de l’aide aux victimes de guerre et à la commission médicale. Elle fut écartée de la commission d’épuration. Au début de décembre 1944, elle démissionna du CDL, démission reprise à la demande du CDL, le 10 décembre. Après le décès du président, elle fut désignée à l’unanimité présidente du CDL en juillet 1945.

Elle fut nommée au conseil municipal lors de son élargissement, le 20 mars 1945, mis en place à Angoulême. Elle fut élue, le 29 avril 1945, sur la liste « républicaine antifasciste » en septième position avec 10 508 voix et devint deuxième adjoint supplémentaire. Elle participa aux commissions de l’instruction publique, des bibliothèques, des cantines, des écoles et de l’action féminine. Elle avait aussi des responsabilités dans le Comité des œuvres sociales de la Résistante.

Mathilde Mir retrouva la direction de l’ENI quand elle fut rétablie, et la géra avec sévérité. Son premier rapport sur son école se termina par le rappel de la vocation de son établissement pour préparer « des lendemains lumineux et vibrants de foi laïque et républicaine ». Elle conserva la charge d’inspectrice.

Mathilde Mir multiplia dans la presse locale et syndicale les critiques contre le Parti socialiste SFIO qu’elle quitta, lui reprochant de s’aligner sur les positions de la droite. Elle se présenta pour l’élection de l’Assemblée constituante en première position sur une liste « féminine de résistance républicaine ». Elle appela à voter « oui » puis « non » au référendum du 21 octobre 1945, pour "barrer la route à la dictature". La liste obtint 4 % des voix.

De multiples démarches furent faites par les autorités pour qu’elle obtienne une promotion mais elle tenait à rester à la tête de son école normale après avoir été renommée inspectrice primaire. Devant les critiques après les changements de la situation politique, souffrant depuis 1943 d’une inflammation du rein, Mathilde Mir envisagea de quitter la Charente et fut nommée inspectrice dans la circonscription d’Etampes (Seine-et-Oise) en 1948 où elle continua à s’occuper activement des questions de l’enfance et des enfants anormaux. Pourtant l’étendue de sa circonscription devenait incompatible avec la dégradation de son état de santé. Elle demanda un changement ce qui lui fut refusé sur la base d’un prétexte administratif. Aussi décida-t-elle de demander sa retraite en 1955.

Mathilde Mir retourna habiter Auzat.

Son nom fut donné à une rue et à une école, annexée à l’école normale d’Angoulême.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article145106, notice MIR Mathilde [née MIR Francine, Mathilde, Sidonie, Marie] par Jacques Girault, version mise en ligne le 21 février 2013, dernière modification le 6 mars 2021.

Par Jacques Girault

Mathilde Mir
Mathilde Mir
Portrait en 1930

ŒUVRES : Le catalogue de la BNF comprend une dizaine de titres dont
Des ouvrages pédagogiques. — Vieilles choses d’Angoumois, Angoulême, Coquemard, 1947, comprenant des contes charentais. — Chronique des jours heureux, Angoulême, Coquemard, 1947. — Histoires et récits du pays toulousain, avec Fernande Delample, Paris, F. Nathan, 1954. — Quand la terre se soulève, Angoulême, Coquemard, 1948, sur la Résistance en Ariège. — RENAUD (Yvette), MIR (Mathilde) et col., Mathilde Mir ou l’engagement d’une femme dans son temps, CRDP Poitou-Charente, Collection « Culture et tradition en Charente, 1996.

SOURCES : Arch. Nat., F1a 3240, F 17/ 26518. — Arch. Mun. Angoulême (Sylvie Blaise-Bossuet). — Presse syndicale. — POMEAU (René), Mémoires d’un siècle entre XIXeme et XXeme, Paris, Fayard, 1999.

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