COURCOUX Gustave, François, Marie

Par Alain Prigent, François Prigent

Né le 17 août 1874 à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord, Côtes d’Armor), décédé le 15 décembre 1936 à Etables-sur-Mer (Côtes-du-Nord, Côtes d’Armor) ; peintre ; coopérateur ; secrétaire de la Bourse du travail de Saint-Brieuc (1907) ; élu municipal d’Etables-sur-Mer (1919-1929).

Gustave Courcoux était le fils de Louis Félix Courcoux, cordonnier, et de Félicité Boisard, tailleuse à Saint-Brieuc. Fils et petit-fils de cordonniers, il habita rue de Brest puis rue de Quintin. Il passa son enfance à Saint-Brieuc avec son frère, Louis, et sa sœur, Félicité. Selon le recensement de 1896, Louis, ouvrier peintre, avait déjà quitté le domicile familial, rue de Quintin. L’année suivante, le décès du père à l’âge de 56 ans rendant la situation de la famille très précaire, les deux frères, ouvriers peintres, devinrent les soutiens de la famille. En 1901, lorsque Félicité, épouse Tugdual Soyer, ouvrier peintre chez Pignorel, l’une des principales entreprises du bâtiment de Saint-Brieuc. Gustave et sa mère, âgée alors de 57 ans, aménagent dans un logement contigu du jeune couple, toujours rue de Quintin.
La famille Courcoux vivait non loin de la famille de Louis Guilloux, écrivain originaire de Saint-Brieuc. Le père de l’écrivain, Louis Guilloux, six ans plus âgé que G. Courcoux, cordonnier, fils de cordonnier lui-même vivait également avec sa famille, rue de Quintin (recensement de 1886).
Gustave Courcoux, comme son frère aîné et son beau-frère, appartient depuis le début des années 1890 à la corporation des ouvriers peintres. Il ne fait pas partie de la première génération de militants qui crée une chambre syndicale en février 1903 qui regroupe une trentaine d’adhérents autour d’Yves Gascogne, président, de Charles Lescam, secrétaire, et de Frédéric Le Roux, trésorier. Mais cette structure ne perdure pas, disparaissant l’année suivante. La reconstruction de l’organisation se fait sous la houlette de Gustave Courcoux fin 1905, début 1906. Le syndicat des peintres regroupent alors une petite vingtaine de peintres. Adhérente de la Bourse du Travail, l’organisation est dirigée par G. Courcoux, président. Guillaume Le Gars, au poste de secrétaire, et Paul Bourcier, trésorier, l’aident dans sa tâche. En 1907, l’équipe dirigeante, légèrement modifiée, reconduit G. Courcoux dans ses fonctions de secrétaire, le poste de président disparaissant. On voit apparaître d’autres militants comme Pierre Launay, trésorier, Louis Briand et Auguste Pourchet. Classé selon les archives nationales comme un syndicaliste modéré, G. Courcoux appartenait à cette corporation des ouvriers peintres qui ne fut pas engagée dans les nombreux conflits du travail qui touchèrent les autres corporations briochines du bâtiment comme les plâtriers, les couvreurs ou les menuisiers. C’était la corporation la mieux payée dans le bâtiment avec les ouvriers plombiers (3,5 francs contre 3 francs aux autres corps de métier par journée de travail). Sans doute aussi la personnalité de son patron M. Pignorel a-t-elle jouée un rôle dans le règlement des demandes ouvrières. N’était-il pas président du conseil des prud’hommes de Saint-Brieuc en 1904, instance de conciliation par excellence ! La seule grève que menèrent les peintres se déroula au printemps 1910. Après une assemblée générale tenue le 17 avril au cours de laquelle les peintres précisèrent leurs demandes (augmentation de salaires de 0,5 franc ; doublement du salaire pour les chantiers de nuit ; indemnité de déplacement), le conflit fut rapidement réglé par la conciliation du maire le 17 mai. Un accord fut trouvé avec les patrons de la corporation accordant satisfaction à l’essentiel des revendications ouvrières. Ce mouvement fut mené par Launay et Pourchet dans l’esprit qui animait G. Courcoux.
Gustave Courcoux habitait avec sa mère en 1906, rue Brizeux à Saint-Brieuc, dans l’actuel quartier Baratoux, au moment où il s’apprêta à jouer un rôle majeur sur la scène sociale briochine. En effet, membre de la Bourse du travail de Saint-Brieuc, il succéda au poste de secrétaire à François Collet qui avait fondé en 1907 une coopérative de menuiserie. En février 1907, à l’issue de la réunion publique organisée par la Bourse, il proposa sa démission, étant en opposition avec la majorité des militants de la Bourse, favorable à l’apposition d’affiches de la confédération contre la politique militaire du gouvernement. Revenant sur sa décision, il fut conforté dans son poste de secrétaire et prononça le discours lors du 1er mai 1907 au nom de la Bourse. Il fut à l’issue de cette manifestation violemment pris à partie par Paul Boyer, principal dirigeant de la SFIO à Saint-Brieuc à qui il refusa la parole lors du rassemblement au nom de la séparation des activités syndicales et politiques, anticipant ainsi le contenu de la Charte d’Amiens rédigée quelques mois plus tard. Les tensions avec la municipalité radicale dirigée par Henri Servain atteignirent leur paroxysme lorsque des tracts antimilitaristes furent adressés à des sous-officiers à la veille de la conférence faite par Marcel Cachin en octobre 1907. Le rapport sur les activités de la Bourse présenté au conseil municipal de décembre 1907 accabla alors G. Courcoux, accusé de vivre de la subvention municipale. L’incendie accidentel qui toucha les locaux de la Bourse quelques jours plus tard le conduisit à donner sa démission. Il fut alors remplacé par Charles Thomas, typographe à La Croix des Côtes-du-Nord. A la veille des élections municipales de mai 1908, G. Courcoux se replia sur la commission d’initiative créée en octobre 1907, et sur le secrétariat de la société récréative, La Syndicale, animée également par Ernest Leguern.
Gustave Courcoux était de toute évidence un militant syndicaliste de premier plan. Il était le porte-parole de la tendance réformiste qui cohabitait au sein de la Bourse avec les syndicalistes chrétiens et révolutionnaires. Humaniste, il était un des éléments modérateurs d’une institution traversée par des débats intenses. Modéré, représentant sa corporation, il n’a pas pu éviter l’éclatement de la Bourse au moment où les rivalités politiques opposant les différents courants de la vie politique briochine s’exacerbèrent. Il quitta la direction de la Bourse avant le déclenchement de la crise municipale briochine en mai 1908, conduisant à l’élection puis à la démission de Georges Le Mercier, militant de la Bourse du travail. Paul Boyer, par ses excès et son autoritarisme, acheva la dislocation de l’unité fragile des ouvriers et artisans de la Bourse, venus d’horizons idéologiques différents.
Après la disparition de la Bourse du travail, Gustave Courcoux s’installa à Etables-sur-Mer où il créa une petite entreprise de peinture en bâtiment. Sa vie prit alors un cours différent. Profondément attaché aux valeurs familiales, il demanda à sa mère de le suivre dans sa nouvelle demeure. Il épousa le 24 novembre 1909 à Etables-sur-Mer Adèle, Marie Lionnais, originaire de Saint-Germain en Laye, fille d’une veuve, commerçante bien installée dans cette localité. Le couple acheta ensuite le café du Centre. De cette union naquirent quatre enfants : Marie, Gustave et les jumeaux, Louis et Adèle.
Intégrant son nouveau statut social, Gustave Courcoux fit fructifier son entreprise dans une commune devenue une station balnéaire en pleine expansion. Il embaucha ainsi plusieurs ouvriers afin de répondre à la construction des villas de l’avenue Victoria et du boulevard Oscar Legris, industriel versaillais qui œuvra au développement de la station avant la Grande Guerre. Intégré dans la vie communale, G. Courcoux fut élu conseiller municipal en décembre 1919 sur la liste du maire sortant Jean-Marie Heurtel. Il fit un second mandat comme adjoint dans la municipalité dirigée par Jérôme Camard (1925-1929). Très actif dans la vie communale il fut à l’origine de la création de la Musique municipale, La Lyre tagarine, du Comité des fêtes et de la Société de secours mutuels des pompiers.
En 1926, il a vendu son entreprise devenant correspondant de presse, de Ouest Journal et de L’Ouest Eclair, le grand quotidien d’inspiration chrétienne démocrate. Passionné de peinture, il fut un artiste reconnu localement. On lui doit en particulier la frise de la nef centrale de l’église Notre-Dame d’Etables-sur-mer. Au début du siècle, il écrivit, selon sa petite-fille quelques textes de chansons, dont certains au contenu social ( "Y’a que l’anarcho" et "Nos brav’ s pompiers"). Il disparaît au moment où le Front Populaire est à la croisée des chemins. Républicain convaincu, dans ses différentes activités professionnelles et non-professionnelles, Gustave Courcoux est resté fidèle à lui-même, à ses idéaux de jeunesse.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article145170, notice COURCOUX Gustave, François, Marie par Alain Prigent, François Prigent, version mise en ligne le 23 février 2013, dernière modification le 9 décembre 2020.

Par Alain Prigent, François Prigent

SOURCES : Arch. Nat., F7/13 567 et F7/13 600 (cote relevée dans la version papier du Maitron ─4e période, sans autre indication). ─Arch. municipales de Saint-Brieuc, 6F2 et 6F4. —Arch. Dép. des Côtes d’Armor, recensements 1886 et 1896, consultables en ligne ; JP17/C, Le Réveil des Côtes-du-Nord. —Notice non signée parue dans le Maitron 3e période (1871-1914). —Arch. Nat., F7/13 567 et F7/13 600. —Claude Geslin, Le syndicalisme ouvrier en Bretagne jusqu’à la première guerre, 3 tomes, Espaces Ecrits, 1990. —Alain Prigent, François Prigent, "L’expérience éphémère de la Bourse du Travail de Saint-Brieuc (1904-1909)", in Cahiers d’Histoire, Reprendre l’histoire des Bourses du Travail, N°116, 2012. —Nombreux contacts fin 2016 et printemps 2017 avec Claire Thonier, fille d’Adèle Courcoux, petite-fille de Gustave Courcoux (étude des registres de recensement de Saint-Brieuc et d’Etables-sur-mer ; témoignages divers ; photos).

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