LEGRAND Henri, Albert

Par Daniel Grason

Né le 5 mai 1920 à Bapaume (Pas-de-Calais), mort le 4 juillet 2009 à Blois (Loir-et-Cher) ; livreur, manœuvre, chauffeur puis cadre à Gaz de France ; militant communiste ; résistant ; interné ; déporté à Mauthausen (Autriche) ; conseiller municipal de Morsang-sur-Orge (Essonne).

Fils d’Albert et Léonie, née Mansion, Henri Legrand fut légitimé par le mariage de ses parents le 1er juin 1922 à Bapaume. Il fut adopté pupille de la nation par jugement du tribunal civil de la Seine en date du 16 septembre 1938. Il alla à l’école primaire, savait lire et écrire, il adhéra aux Jeunesses communistes, y resta jusqu’à la dissolution de septembre 1939. Il était livreur chez un épicier du XVIe arr. arr. qui le logeait. Non appelé lors de la mobilisation, en 1940 il prit le chemin de l’exode.
À son retour, il reprit son poste de manœuvre à l’entreprise Astra qui fabriquait de la margarine à Asnières (Seine, Hauts-de-Seine), il pratiquait le football était responsable d’une équipe. Contacté par un militant il accepta de distribuer, coller des tracts et papillons dans les rues et les couloirs du métropolitain. La sœur d’Henri Legrand, Marcelline était mariée avec Camille Risser. Celui-ci était très lié à ses beaux-frères qui furent orphelins de père, Henri Legrand demeurait chez Camille et Marcelline au 5 Rue Turquan à Paris XVIe dans le quartier d’Auteuil où elle exerçait le métier de concierge.
Camille Risser n’était pas membre du Parti communiste, il fut révolté par l’exécution du jeune ouvrier André Masseron le 24 juillet 1941 à la prison du Cherche-Midi. Un « Avis » des allemands fut placardé dans les rues de Paris. Il repéra l’une d’elle, tout près de son domicile avenue Mozart.
Vers 23 heures 30, Henri Legrand fit le guet, Camille Risser écrivit à la craie blanche sous l’affiche : « Hitler, ce sera bientôt ton tour ! » Des policiers exerçaient une surveillance, il fut pris en flagrant délit, il comparut le 29 juillet 1941 devant la XIVe Chambre correctionnelle, la Cour se déclara incompétente, il fut libéré le lendemain après avoir signé une déclaration type où il déclarait « désapprouver l’action communiste clandestine sous toutes ses formes ». Appréhendé dans avec un autre résistant quelques mois plus tard, il fut fusillé le 17 avril 1942.
Henri Legrand porteur d’une centaine de papillons édités par le Parti communiste et de notes sur son activité, d’exemplaires de L’Avant-Garde à diffuser, de tracts à distribuer sur différents thèmes ce qui attestait de son engagement militant. Il fut condamné à deux ans de prison avec sursis et cent francs d’amende, il resta au dépôt.
Sa sœur écrivit le 12 août au préfet de police, elle écrivait : « Je ne comprends pas pourquoi l’on ne me laisse pas voir mon frère, il n’a ni tué ni volé, ce qu’il y a de plus malheureux c’est qu’il est pupille de la nation. Orphelin de père et mère et derrière lui il y en a deux autres un de 19 ans et l’autre de 13 ans. J’ai eu le mal de les élever jusque maintenant et pour comble de malheur l’on me l’enferme ».
Depuis le 8 août, Henri Legrand était interné au camp de Châteaubriant (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique). L’Avocat général près la section spéciale de la cour d’appel de Paris demanda une enquête, des inspecteurs des Renseignements enquêtèrent, l’épicier et le service du personnel de la société Astra déclarèrent qu’Henri Legrand était « sérieux, de bonne moralité, à qui on pouvait accorder toute confiance », ils ajoutèrent qu’il devait avoir « agi sans se rendre compte exactement de la gravité de son acte et des conséquences qui pouvaient en découler ». Les policiers en concluaient qu’il avait subi l’influence de son beau-frère.
Henri Legrand fut déporté le 22 mars 1944 au départ de Compiègne à destination de Mauthausen (Autriche) où il arriva trois jours plus tard. Matricule 60156, il fut affecté au Kommando de Loibl Pass. Les détenus devaient creuser un tunnel entre l’Autriche et la Yougoslavie (Slovénie), il fut l’un de ceux qui furent libérés dans la nuit du 7 au 8 mai 1945 par les partisans yougoslaves dirigés par Tito.
Son rapatriement eut lieu le 25 juillet 1945, le Ministère des anciens combattants et déportés de guerre lui délivra le 17 mars 1947 un certificat de déportation, le secrétariat des forces armées lui remit le 22 décembre 1948 un certificat d’appartenance au Front national. Il fut homologué au titre de la Résistance intérieure française (RIF).
Le 28 décembre 1946, Henri Legrand épousa Hélène François en mairie du XVIe arrondissement, le couple eut deux enfants. En 1948, il travailla comme chauffeur à la Compagnie du Gaz de France à Alfortville (Seine, Val-de-Marne).
Par la suite, grâce à des cours du soir, il fut promu cadre au sein d’EDF-GDF
Il fut aussi conseiller municipal communiste à Morsang-sur-Orge ((Essonne) dans les années 1950-1960.
Henri Legrand mourut le 4 juillet 2009 à l’âge de quatre-vingt-deux ans à Blois (Loir-et-Cher).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article146314, notice LEGRAND Henri, Albert par Daniel Grason, version mise en ligne le 6 mai 2013, dernière modification le 22 novembre 2022.

Par Daniel Grason

SOURCES : Arch. PPo. BA 1802, 77W 81. – Bureau Résistance GR 16 P 356512. – Livre-Mémorial, Fondation pour la Mémoire de la Déportation, Éd. Tirésias, 2004. – État civil, Bapaume. — Notes de Benjamin Salesse, son petit-fils maternel, mars 2018.

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