MOREAU André, Nicolas

Par Jacques Girault

Né le 5 mai 1915 à Champs-sur-Yonne (Yonne), mort le 27 septembre 2014 à Migennes (Yonne) ; instituteur dans l’Yonne  ; militant syndicaliste du SNI puis CGT-FO ; militant socialiste, maire de Migennes.

Fils d’un employé des chemins de fer et d’une couturière, André Moreau, baptisé à sept ans « à l’insu de son père, sur l’instigation de sa grand-mère et d’une tante », fut par la suite un « athée convaincu ». Élève du "cours spécial" annexé au collège d’Auxerre, il entra en 1933 à l’Ecole normale d’instituteurs d’Auxerre où il refusa de suivre la préparation militaire. Initié au syndicalisme, gréviste, le 12 février 1934, il adhéra au Syndicat national des instituteurs dès son premier poste à Sens.

André Moreau adhéra au Parti socialiste SFIO en 1935. Correspondant avec Marceau Pivert, il approuvait la tendance de la Gauche révolutionnaire. Membre du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes, il participa aux luttes favorables au Front populaire et collaborait au journal local de gauche L’Avenir républicain. En 1936, il fut initié dans la loge « La Concorde » (Grand Orient de France). 

il se maria en août 1936 à Sens (Yonne) avec une institutrice, fille d’un employé des chemins de fer. Le couple eut deux fils.

André Moreau partit au service militaire en septembre 1936, affecté dans la base aérienne de Dijon comme enseignant à l’école technique pour donner des cours de physique, de mathématiques, d’électricité pour préparer des engagés à l’École des mécaniciens d’avions de Rochefort.

En octobre 1938, il reprit son métier d’instituteur, nommé à titre provisoire à Saint-Loup d’Ordon. Pacifistes, André Moreau et son épouse se trouvaient en accord avec les analyses de La Patrie humaine.

En septembre 1939, il fut mobilisé à l’école technique de la base aérienne repliée au Mas Guillermin, près de Montpellier (Hérault), puis démobilisé comme caporal-chef le 1er août 1940.

André Moreau retrouva avec son épouse un poste double à Saint-Loup d’Ordon. Secrétaire de mairie, il aida les opposants à la réquisition imposée par les occupants. Sa famille recueillit une petite juive dont les parents étaient déportés.

A la Libération, André Moreau et son épouse furent nommés à Saint-Julien du Sault. Il reprit contact avec ses anciennes activités militantes et notamment participa à la création de la fédération des jeunesses socialistes SFIO. Il se caractérisait alors par une hostilité durable à l’égard des communistes

Dans les débats du SNI, « j’aurais voulu que sa majorité suive Force Ouvrière en opposition à la CGT communiste. Finalement, je me suis rallié à l’autonomie, le SNI et la FEN, sous couvert d’ « unité syndicale » recueillant réformistes et communistes. » Nommé à Montillot, responsable cantonal, soutenu par le secrétaire de la section Pierre Chevalier, il devint membre du conseil syndical de la section départementale en 1950, participa à la rédaction du bulletin départemental, fut élu à la Commission administrative paritaire départementale. En 1951, reçu comme épouse à l’examen pour devenir professeurs de cours complémentaires, ils furent nommés au cours complémentaire de Migennes où ils enseignèrent jusqu’à leurs retraites en 1970.

André Moreau devint secrétaire de la section départementale en 1953. Lors des réunions des instances nationales du syndicat, il intervenait. Ainsi, au conseil national, le 26 décembre 1953, il évoqua la question du ramassage scolaire et le 4 avril 1955, il fut assesseur. Lors du congrès national, le 7 juillet 1954, dans la discussion du rapport moral, il indiqua que la reprise du travail en cas de conflit ne devait pas être dépendante des décisions de la CGT-FO ; aussi fallait-il développer les luttes pour l’indépendance du syndicat. Il fit partie de la délégation du SNI conduite par James Marangé qui participa aux rencontres de Sonnenberg avec les représentants du syndicat allemand des instituteurs. Au congrès de Bordeaux, désigné pour la commission des résolutions, dans la séance sur le rapport moral, le 21 juillet 1955, il estima que dans les luttes pour la défense laïque, il fallait rester au-dessus des partis politiques. En 1956, il refusa de rester au secrétariat général de la section du SNI pour « des raisons familiales ».

André Moreau devint membre du comité et du bureau fédéral du Parti socialiste SFIO en 1954. Il aida Jacques Piette* à s’implanter dans le département. Après 1956, prenant des distances avec les responsables syndicalistes qui affichaient leur hostilité à la construction européenne, au nom de la laïcité, « puisque des mouvements politiques chrétiens militaient pour », il devint président du Cercle européen de la Jeunesse, créé à partir d’une suggestion de Jacques Piette, dont les activités diminuèrent jusqu’en 1958, Par la suite, il anima un comité départemental européen, suivant de près l’activité du Mouvement européen.

Ses rapports avec le syndicat continuaient à se dégrader. Hostile au refus syndical d’accepter l’arrivée de de Gaulle, en septembre 1958, il écrivit à la direction du Parti socialiste pour conseiller une intervention « avec toute la prudence que nécessite l’action du Parti dans le cadre de l’action syndicale » pour que le SNI et la Fédération de l’Éducation nationale se prononcent pour le « oui », imitant en cela les positions du congrès de la SFIO. Aussi protesta-t-il par lettre à Thierry Maulnier pour son article dans Le Figaro, titré « le non des instituteurs ». Il protesta aussi en utilisant un pseudonyme par un projet d’article qu’il envoya à Combat. Lors d’une réunion du conseil syndical de la section départementale du SNI, il approuva « un texte condamnant la méthode antidémocratique du SNI » décidant d’appeler à voter « non » qui n’emporta pas l’adhésion de la majorité des membres. Aussi dans une nouvelle lettre à Georges Brutelle, indiquait-il qu’il fallait dénoncer les méthodes du SNI et de la FEN en apportant du « positif ». Il fut, avec d’autres instituteurs, signataire d’un texte protestant contre la réponse négative à la constitution décidée par les directions syndicales sans consultation des adhérents, publié dans Le Provençal du 21 septembre 1958.

André Moreau quitta le SNI pour rejoindre, au début de 1959, la CGT-FO. Il constitua dans le département le syndicat confédéré CGT-FO des instituteurs qu’il représenta lors du congrès confédéral de 1963.

Il militait surtout dans le Parti socialiste SFIO dans ses actions de propagande européenne et organisa en 1960 une journée d’études européennes à Auxerre, avec diverses personnalités européennes. Par la suite d’autres conférences européennes furent organisées dans le département.

Aux élections municipales de 1953 à Migennes, André Moreau avait engagé ses camarades socialistes SFIO à soutenir le maire sortant apolitique et à fort engagement social. Secrétaire de la section socialiste SFIO de Migennes de 1959 à 1967, il s’opposa à Lucien Chevalier* qui envisageait de devenir maire, à la tête d’une liste autonome. Élu conseiller municipal en 1959, réélu en 1965, devenu quatrième adjoint du maire classé « apolitique », Moreau fut chargé des relations avec les écoles et avec la Maison des jeunes créée en 1960. Il fut aussi le responsable de l’organisation du jumelage avec Simmern (Allemagne), décidé en 1965 finalisé en 1969.

Mais alors que des accords avec le Parti communiste français se concrétisaient, il refusa ce rapprochement et démissionna de la SFIO pour rejoindre le Parti socialiste démocrate. Après les élections de 1971, il devint deuxième adjoint au maire. Le maire abandonna sa responsabilité de premier magistrat en 1972 et Moreau fut élu maire et président du district. Il participa notamment à l’assemblée du Mouvement fédéraliste en 1973. Fréquentant régulièrement les tenues de la loge maçonnique « Le Réveil de l’Yonne », il décida de ne pas se représenter aux élections municipales de 1977.

Par la suite, André Moreau conserva une activité dans le comité de jumelage jusqu’à sa démission de son conseil d’administration en 1988. Il en devint alors le président d’honneur.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article146394, notice MOREAU André, Nicolas par Jacques Girault, version mise en ligne le 13 mai 2013, dernière modification le 19 août 2021.

Par Jacques Girault

SOURCES : Renseignements fournis par Jean-Luc Moreau, fils de l’intéressé. — Arch. OURS, fédération de l’Yonne. — Presse syndicale. —Le Syndicaliste du Nord-Est, organe mensuel des UD CGT-FO Aisne, Ardennes, Marne, Haute-Marne, février 1959. — Compte rendu du congrès CGT-FO de 1963. — Notes de Louis Botella.

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