LE TALLEC Jean-Baptiste

Par Alain Prigent, Serge Tilly

Né le 11 octobre 1924 à Belle-Isle-en-Terre (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor), fusillé le 16 juin 1944 à Servel en Lannion (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor) ; plombier ; résistant FTP.

Fils d’Ange, Marie Le Tallec, ferblantier et de Marie, Marguerite Caouissin, ménagère, demeurant rue Saint-Jacques en Belle-Isle-en-Terre.
Ange Le Tallec fut arrêté et emprisonné avec le coiffeur de sa commune Joseph Corson pendant près de quatre mois à la maison d’arrêt de Guingamp en 1944 « pour avoir accordé une aide active aux terroristes Émile Henry et François Prigent », c’est à cet endroit qu’il apprendra la mort de son fils Jean Baptiste. Désigné président de la délégation spéciale de la commune par le Comité local de Libération (CLL) en août 1944, Ange Le Tallec fut élu aux municipales de mai 1945 à la tête d’une liste socialiste.
Jean Baptiste Le Tallec fit ses études primaires à l’école publique de Belle-Isle-en-Terre où il obtint son certificat d’études primaires. Après trois années d’études au lycée technique Curie à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor) dans la section « plombier » il travailla au sein de la petite entreprise familiale. Le 6 avril 1944, à Kerbol, près de Saint-Paul en Louargat (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor), de retour de mission avec trois autres FTP, Roger Madigou et Paul Nogré et Raymond Tanguy, il fut engagé dans un accrochage avec une patrouille allemande. Blessé par une balle à l’épaule, Jean Le Tallec réussit à s’enfuir. Après avoir été soigné par un docteur de Quintin (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor) qui parvint à extraire la balle de son épaule, il se cacha quelque temps chez M. Prigent, cultivateur, au Quinquis à Plougonver (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor) qui hébergeait également d’autres clandestins. Afin d’éviter des ennuis à ceux qui l’accueillirent, Le Tallec rejoignit, sans que l’on en connaisse les circonstances précises, vers le 10 juin 1944, le groupe de Senven-Léhart (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor) avec Paul Riou qu’il avait connu au lycée Curie.
Ce groupe était composé d’une vingtaine de jeunes gens à l’initiative d’étudiants rennais, mais non lié formellement à l’une des composantes de la Résistance armée. Leur chef Christian Savary, FTP venu d’Ille-et-Vilaine, participa à l’attaque de la prison de Vitré (Ille-et-Vilaine) le 29 avril 1944, secondé par Jean Marion, étudiant, originaire de Paris. Vers le 6 juin 1944, ce groupe s’installa dans le château de Goas-Hamon, propriété de la famille Novello, cimentier à Guingamp, qui servait de centre de rassemblement pour les maquisards de Plésidy liés à l’Armée secrète (AS). Au bout de quelques jours personne à Senven-Léhart n’ignorait plus leur présence. Georges Le Cun, un des dirigeants de l’AS de Guingamp qui dirigeait le maquis de Plésidy, leur rendit visite le 9 juin 1944. Informé de l’indiscipline du groupe, il leur demanda d’évacuer le château, mais il ne fut pas entendu. Le groupe disposait de très peu d’armes. Le 11 juin 1944, il s’était regroupé en vue d’un parachutage d’armes prévu dans la nuit du dimanche 11 au lundi 12 dans les environs de Plésidy (Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor), mais l’opération fut annulée. Coupé de la population locale, le groupe fut repéré sans difficulté par les autorités d’occupation.
Le 12 juin 1944, à 6 h 30 du matin, une centaine de soldats allemands, épaulés par trois gendarmes français, encerclèrent la propriété. Les jeunes maquisards tentèrent de se défendre pendant environ une heure. Mais, lorsque les Allemands attaquèrent le château à la grenade, douze maquisards se rendirent. Si quelques combattants réussirent à se cacher et à s’échapper, sept d’entre eux périrent : deux furent tués au combat et cinq massacrés sur place : Jean Marion, Georges Le Saux, Jean Marini, Edmond Corbel, Jean Julienne, Ernest Le Flammec et Marcel Le Bihan. Leurs corps furent enterrés sommairement dans une fosse commune au cimetière de Senven-Léhart. Le château, incendié par les Allemands, fut complètement détruit et ne fut jamais reconstruit.
L’opération militaire allemande qui fut l’une des opérations de répression les plus sanglantes menées dans le département (dix-neuf victimes), fut conduite sous la responsabilité de Rudolph Kiekaffer et de Wilhelm Funke du Sicherheitsdienst (SD) de Saint-Brieuc.
Jean-Baptiste Le Tallec, qui faisait partie des douze maquisards arrêtés, fut incarcéré à Guingamp où il subit d’affreuses tortures. Le 16 juin 1944, il fut condamné à la peine de mort par le tribunal du secteur postal 56300 « pour activités de franc-tireur » et exécuté le jour même en même temps que ses onze camarades Briac Blanchard, Albert Fouilhon, Paul Herviou, Joseph Le Bihan, Henri Le Gac, Alphonse Le Pape, Jean-Marie Lossouarn, Jean Péron, Albert Pinson, Paul Riou et Christian Savary au camp d’aviation de Servel près de Lannion. Célibataire, Jean Le Tallec avait vingt ans. Au moment de son exécution, son père Ange était emprisonné à la maison d’arrêt de Guingamp. Le nom de Jean-Baptiste Le Tallec figure sur lLe monument du terrain d’aviation de Servel en Lannion où une importante cérémonie patriotique se déroule tous les ans le premier dimanche du mois d’août et sur . En revanche les tragiques événements du 12 juin 1944 ne donnèrent lieu dans les années qui suivirent la Libération à aucune commémoration significative dans la commune de Senven-Léhart où aucun monument commémoratif n’a été érigé.
Son nom figure sur Le monument cantonal de Saint-Paul en Louargat et sur La plaque des élèves de l’ancien lycée Curie à Saint-Brieuc. Il fut inhumé au cimetière de Belle-Isle-en-Terre.

Site des Lieux de Mémoire du Comité pour l’Étude de la Résistance Populaire dans les Côtes-du-Nord

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article146903, notice LE TALLEC Jean-Baptiste par Alain Prigent, Serge Tilly, version mise en ligne le 29 mai 2013, dernière modification le 29 avril 2022.

Par Alain Prigent, Serge Tilly

Condamnation à mort de Jean, Baptiste Le Tallec et de ses camarades.
Condamnation à mort de Jean, Baptiste Le Tallec et de ses camarades.
Balle extraite après avoir été blessé par des feldgendarmes le 6 avril 1944 à Louargat.

SOURCES : Arch. Dép. Côtes-d’Armor, 2W88, 1369W15, 165J3, 1043W3. – Joseph Darsel, La Bretagne au combat, Le Signor, 1980. – Alain Prigent, Serge Tilly, « Les fusillés et les décapités dans les Côtes-du-Nord (1940-1944) », Les Cahiers de la Résistance populaire dans les Côtes-du-Nord, no 12, 2011. – Serge Tilly, « L’occupation allemande dans les Côtes-du-Nord (1940-1944), Les lieux de mémoire », Les Cahiers de la Résistance populaire dans les Côtes-du-Nord, no 10, 2004 et no 11, 2005. – Témoignage d’Armand Tilly. – Témoignage de la sœur de Jean-Baptiste Le Tallec, Mme Le Vacher.

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