MICHEL Claude [avocat]

Par Jean-Philippe Tonneau

Né le 2 juillet 1934 à Auriol (Bouches-du-Rhône) ; avocat, bâtonnier ; militant communiste jusqu’en 1983 puis militant socialiste de 1986 jusqu’à la fin des années 1990, conseiller municipal d’Aulnay-sous-Bois (1977-1983 et 1989-1995) ; cofondateur du Syndicat des avocats de France.

Claude Michel
Claude Michel

Claude Michel était le fils de Henri Michel (1908) et de Lucienne Julien (1910). Ses parents s’installèrent à Saint-Auban-les-Durance pour travailler au sein de la Compagnie Alais, Froge et Camargue (groupe Péchiney) spécialisée dans la fabrication de l’aluminium, son père comme chaudronnier, sa mère comme vendeuse à la coopérative. Ils vinrent en 1933 s’installer à Auriol près de Marseille pour y gérer une succursale Casino, puis achetèrent en 1945 une épicerie à Aix pour favoriser les études secondaires de leurs deux enfants.

En septembre 1952, Claude Michel rejoignit Paris pour suivre l’année préparatoire à Science Po. Admis au sein de la section Service Public, il sortit diplômé de l’École en 1955. Durant sa scolarité rue Saint-Guillaume, Claude Michel adhéra au Parti communiste français, notamment pour combattre la Communauté européenne de défense, et reprit, avec quelques camarades, la cellule de Science Po.

En septembre 1955, au cours d’une soirée organisée par le Groupe universitaire de montagne et de ski, il rencontra Nadia Ténine, fille du médecin Maurice Ténine, l’un des fusillés de Châteaubriant en 1941, et de Annette Etléa, morte à Auschwitz. Mariés le 5 mars 1956 à Nanterre, ils habitèrent une chambre de bonne, boulevard Malesherbes à Paris, et eurent rapidement leur premier fils, Denis, qui naquit le 10 septembre 1956 à la maternité des Bluets dirigée par la CGT. Handicapé mental, Denis resta vivre auprès d’eux et Claude et Nadia Michel militèrent activement au sein du mouvement associatif revendiquant de meilleures conditions d’accueil des personnes atteintes de déficiences mentales.

La deuxième moitié des années 1950 marqua également le militantisme politique du couple. Membres du comité de section du VIIe arrondissement pour l’un, et de celui du Ve pour l’autre, ils participèrent à la création de l’Union des étudiants communistes (UEC) en 1956, et Claude Michel fit partie du comité de rédaction de son journal Clarté jusqu’en 1959. Ces années furent l’occasion de rencontrer quelques figures du parti, le médecin Jean Dalsace, Madeleine Braun, et de côtoyer d’autres professeurs et étudiants communistes, Albert Soboul, Jean Bruhat, Antoine Casanova ou encore François Hincker. Distante avec le parti après le XXe congrès du PCUS de 1956, elle le quitta en 1964.

En 1958, le couple emménagea à la cité universitaire d’Antony. Claude Michel rejoignit la cellule de la résidence universitaire et fut membre du comité et du bureau de la section d’Antony. Face à l’éventuel parachutage des militaires sur la capitale, Claude Michel fut, en mai 1958, à la tête des cellules de la cité universitaire, qui avaient fusionné, ainsi que du comité anti-fasciste créé pour l’occasion. Il rencontra alors, pour la première fois, Georges Marchais, qui l’avait convoqué à la fédération Seine-Sud à Ivry-sur-Seine, ainsi que Maurice Thorez et Georges Gosnat.

Après deux échecs au concours d’entrée à l’ENA (l’anglais y fut pour beaucoup, et sans doute le temps consacré prioritairement à l’action militante quotidienne), il s’inscrivit, afin de prolonger son sursis militaire, à la faculté de droit de Paris et débuta une licence en droit privé. Il travailla également, pour subvenir aux besoins familiaux, au tribunal administratif de Paris.

Incorporé le 1er septembre 1959, Claude Michel fut envoyé en Algérie durant le premier semestre de l’année 1961. Durant ces quelques mois, il fut affecté au sein d’une Section d’action sociale dans le village de Sirat et vécut, en avril 1961, la tentative de putsch des généraux. Son second fils, Laurent (polytechnicien, conseiller à la Cour de Rouen), naquit le 7 juin 1961 ; Claude Michel fut alors assigné à l’école militaire de Paris à diverses tâches administratives.

Dégagé de ses obligations militaires en août 1961, il travailla au service juridique central du groupe Unilever, tandis que la famille avait déménagé dans une HLM à Villejuif.

En 1962, Claude Michel acheva sa licence en droit privé et obtint son Certificat d’aptitude à la profession d’avocat. En 1963, afin de se rapprocher d’un établissement spécialisé pour Denis et du lycée de sa femme, la famille partit vivre dans une HLM de Champigny-sur-Marne.

Suite aux élections législatives de novembre 1962, le PCF – 22%, 41 députés – décida de créer un poste de secrétaire du groupe parlementaire. Claude Michel prit alors rendez-vous auprès du comité central et rencontra Gaston Plissonnier et Georges Gosnat. Satisfaits de son curriculum vitae, les deux dirigeants communistes lui proposèrent le poste qu’il occupa à partir de février 1963. Toutefois, sur conseil de sa femme désireuse qu’il ne fut pas un permanent, Claude Michel prêta serment et s’inscrivit au barreau de Paris. Il fréquenta ainsi des avocats communistes de renom (Jöe Nordmann, Jules Borker ou encore Charles Lederman) pour lesquels il traita quelques dossiers en tant que collaborateur. Ces avocats communistes « historiques » étaient soucieux de s’adjoindre les services de ce jeune secrétaire du groupe à l’Assemblée nationale, persuadés qu’il les aiderait à entretenir de cordiales relations avec les députés-maires du parti. En 1964, promu secrétaire de l’association française, il fut envoyé par Jöe Nordmann à Budapest pour participer au congrès de l’Association Internationale des Juristes Démocrates.

En 1966, il s’installa à Aulnay-sous-Bois pour seconder Robert Ballanger suite à la victoire de la gauche aux élections municipales l’année précédente. Il développa alors un cabinet dans cette ville (dépendant du barreau de Pontoise) tandis que sa femme rejoignait le lycée Jean Zay et que son second fils poursuivait sa scolarité au sein de ses établissements publics.

Le travail à l’Assemblée nationale s’intensifia en 1967 lorsque le PCF obtint aux élections législatives 73 députés (23 % des suffrages). Son cabinet, tout juste créé, fut pour un temps relégué au second plan. En 1968, Claude Michel vécut les évènements du printemps au Palais Bourbon et prépara, par exemple, le discours de Waldeck Rochet répondant à la déclaration de politique générale du Premier ministre Georges Pompidou. Son travail à l’Assemblée nationale s’espaça entre 1969 et 1971, date à laquelle il quitta définitivement son poste de secrétaire du groupe communiste. Prêtant main-forte à Robert Ballanger à la mairie de Aulnay-sous-Bois, il développa dans le même temps son cabinet et participa à la création du Barreau de la Seine-Saint-Denis en 1972.

En 1974, Claude Michel fonda, aux côtés de Francis Jacob, le Syndicat des avocats de France – qui avait connu une amorce en 1972 sous l’appellation Organisation syndicale des avocats, à l’initiative de l’avocat communiste Eddy Kenig. Le syndicat voulait être la traduction, au sein du barreau, de l’Union de la gauche développée dans la sphère politique. Le SAF fut alors conçu comme l’organisation devant rassembler l’ensemble des avocats progressistes et lutter contre le corporatisme – la démocratisation de la justice et l’accès au droit pour tous constituaient ses principales revendications.

Dans la deuxième moitié des années 1970, il multiplia les activités militantes et professionnelles : il participa ainsi à la rédaction de la Déclaration des Libertés en 1975 (aux côtés notamment de Guy Braibant), fut élu bâtonnier du barreau de la Seine-Saint-Denis (1975-1976), accéda à la présidence du SAF (1977-1978) et remplit un premier mandat de conseiller municipal (1977-1983).

Marqué par la rupture du programme commun, dont il était un fervent défenseur, et par le discours de Georges Marchais à propos de l’invasion de l’Afghanistan par les troupes soviétiques, Claude Michel quitta le PCF en 1983. Le SAF s’autonomisa alors définitivement d’avec les partis politiques de gauche. Au début des années 1980, il co-signa – avec Eddy Kenig, Roland Rappaport, Bernard Andreu et Francis Jacob – de nombreux articles, parus dans Le Monde, à propos de la démocratie, des libertés et des droits de l’homme.

Dans la décennie 1980, Claude Michel prit moins part aux activités nationales du SAF. Ses activités professionnelles et militantes n’en demeuraient pas moins bien présentes : il développa ainsi son cabinet à Aulnay-sous-Bois – avec pour activités dominantes le droit de la construction, le droit administratif pour les collectivités publiques, le droit pénal ou encore le droit de la presse, notamment la diffamation entre hommes politiques –, fut élu, pour la deuxième fois, bâtonnier de son barreau (1987-1988), et remplit un second mandat de conseiller municipal (1989-1995) sous l’étiquette socialiste cette fois-ci.

Du début des années 1990 jusqu’à sa retraite, Claude Michel revint au premier plan au SAF et occupa diverses fonctions professionnelles d’importance nationale. Il fut ainsi, de 1992 à 1995, secrétaire du Conseil national des barreaux – qui fut créé après la fusion des professions d’avocat et de conseil juridique en 1991 – puis membre actif de 1995 à 1999. Au début des années 2000, il prépara la deuxième convention nationale des avocats et fut nommé, par la ministre de la Justice Marylise Lebranchu, membre du comité chargé d’élaborer les entretiens de Vendôme sur la justice.

Avocat honoraire en 2000, il enseignait, notamment la déontologie, aux élèves de l’École française du barreau ; siégeait en tant que représentant du HCR à la Cour nationale du Droit d’asile à Montreuil ; et s’occupait de ses trois petits enfants – David (1993), Anaël (1997) et Maayan (2000). Il était officier de l’Ordre national du Mérite et officier de la Légion d’honneur.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article147143, notice MICHEL Claude [avocat] par Jean-Philippe Tonneau , version mise en ligne le 8 juin 2013, dernière modification le 19 septembre 2017.

Par Jean-Philippe Tonneau

Claude Michel
Claude Michel
Claude Michel, lors d'un hommage à Nadia Téninee-Michel
Claude Michel, lors d’un hommage à Nadia Téninee-Michel

SOURCES : Entretiens avec Claude Michel (au nombre de 16). — Claude Michel, Itinéraire d’un avocat engagé 1953 – 2009, Paris, L’Harmattan, 2009. — Claude Michel, Annales du Syndicat des Avocats de France – Tome 1, 1972 – 1992 Les vingt ans du SAF, Paris, SAF-Communication, 2004. — Claude Michel (avec la contribution de Jean-Philippe Tonneau), Annales du Syndicat des Avocats de France – Tome 2, 1993 – 2008 Le temps des responsabilités professionnelles et politiques, Paris, SAF-Communication, 2009.

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