NAHORI Isaac

Par Vanessa Codaccioni

Né le 20 juin 1919 à Oran (Algérie), mort le 13 avril 2010 à Paris ; journaliste à Alger républicain.

Isaac Nahori est né à Oran dans une famille juive d’origine modeste. Sa mère, Simha Julie Levy, institutrice, cessa de travailler pour élever ses deux enfants, Joseph le fils aîné et Isaac le cadet. Son père, Moïse Nahori, était tailleur et socialiste. Très jeune, Isaac Nahori participa ainsi aux manifestations avec son père, notamment pendant la période du Front populaire. Celles-ci, souvent marquées par les affrontements physiques avec les forces d’extrême droite, fascistes, anticommunistes, antijuives et antiarabes, contribuèrent à le politiser et à le convaincre de faire « quelque chose » pour son pays. Après un baccalauréat de latin/grec et philosophie obtenu au lycée d’Oran en 1939, il commença des études supérieures en latin et histoire ancienne qui furent interrompues par les lois de 1940. Pour les mêmes raisons, la carrière dans l’enseignement secondaire, à laquelle il s’était d’abord préparé, fut stoppée. En effet, dès 1939, Isaac Nahori fut répétiteur au collège de Tlemcen et chargé d’enseignement en lettres, en histoire et en géographie, tout comme au premier semestre de l’année scolaire 1940-1941. Or, il fut révoqué à cette date à cause des lois d’exception de Vichy. Il fut repris dans ses fonctions de répétiteur au lycée de Tlemcen en 1943-1944, indemnisé, avant d’être mis en disponibilité en octobre 1944.

Dès l’année suivante, il entama sa carrière de journaliste. Cadre du PCA, correspondant d’Alger républicain à Oran et journaliste à Liberté, Isaac Nahori entra en 1947 dans l’équipe d’Alger républicain comme éditorialiste, puis comme rédacteur en chef. Il signait ses articles « Pierre Lafont », mais était connu sous le nom de « Coco » en raison de son militantisme communiste. Mais avant cela, c’était aussi le surnom que lui donnait sa mère. S’il s’engagea, à travers ses articles, dans la bataille en faveur de la paix et l’amélioration des conditions de vie de la classe ouvrière, il participa aussi à lutter contre le manque de moyens financiers du journal à l’occasion d’appels à souscription et de grands concours. Décrit par ses anciens collègues comme un journaliste passionné par le combat politique et la polémique, il devint le véritable « porte-parole » d’Alger républicain et, pour le rayonnement du journal, transforma son bureau en « une sorte de salon des publics-relations » et noua des relations avec de nombreuses personnalités des milieux politique, culturel, artistique ou sportif.

Dès le début de la guerre d’Algérie, Alger républicain publia des articles appelant à reconnaître l’existence d’un problème national algérien et dénonça la répression coloniale. En mars 1955, Isaac Nahori, avec Abdelhamid Benzine, anima ainsi une grande enquête politique intitulée « L’Algérie vivra-t-elle ? ». Mais à partir de mai 1955, les saisies se multiplièrent et, en septembre 1955, après l’interdiction du PCA et de ses filiales, le journal cessa de paraître.

Isaac Nahori se maria le 16 octobre 1956 avec Claudine Lewkowicz-Saramito, avocate communiste qui venait plaider en Algérie pour défendre les indépendantistes algériens et qu’il avait rencontrée par l’intermédiaire de Gisèle Halimi. Ils eurent trois enfants, nés à Paris. Or, un mois plus tard, le 17 novembre 1956, il fut arrêté à leur domicile et interné dès le lendemain au camp de Lodi. S’il n’y subit pas de sévices physiques, Isaac Nahori n’en vécut pas moins, comme tous les autres internés, la torture psychologique et les brimades infligées par les militaires. Il y avait les « promenades » les yeux bandés, pour lui faire entendre les cris de ses compagnons torturés et le menacer d’être le prochain « à y passer », mais aussi l’interdiction de recevoir des visites, du courrier, c’est-à-dire l’isolement total du camp. Le 20 mars 1957, comme sa femme deux mois plus tôt qui avait réussi à le faire libérer, Isaac Nahori fut interdit de séjour sur le territoire algérien et partit vivre en France.

Toujours proche de Ben Bellah, il occupa après la guerre d’Algérie la fonction de premier secrétaire chargé des questions d’informations et de presse auprès de l’ambassade algérienne à Paris, au moment où sa femme y était avocate permanente. Il fut aussi directeur du service de rédaction du Centre algérien de documentation et d’information rattaché à la direction générale de l’information et à la présidence de la République d’Algérie. Il démissionna de ses fonctions après le coup d’État du 19 juin 1965. Pendant un temps, Isaac Nahori envisagea de reprendre l’enseignement dans le secondaire. Mais à partir de juin 1966, il entra comme rédacteur à la Caisse de prévoyance des cadres du bâtiment. Gravissant les échelons, il y resta jusqu’à sa retraite.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article147147, notice NAHORI Isaac par Vanessa Codaccioni, version mise en ligne le 9 juin 2013, dernière modification le 25 septembre 2013.

Par Vanessa Codaccioni

SOURCES : Archives privées de la famille Nahori. — Boualem Khalfa, Henri Alleg, Abdelhamed Benzine, La grande aventure d’Alger républicain, Paris, Éditions Messidor, 1987.

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