Par Alain Dalançon
Né le 19 janvier 1931 à Saint-Hilaire-les-Courbes (Corrèze) ; instituteur ; militant syndicaliste du SNI et de la FEN dans la Vienne, militant pédagogique du GFEN ; militant communiste.
Fils de cultivateurs, Amédée Nony fut élevé dans un tout petit village de la campagne corrézienne sur la bordure du plateau de Millevaches, terre d’implantation du communisme rural dès les années 1920. Son père était d’ailleurs adhérent du Parti communiste et participa à la Résistance, ce qui n’empêcha pas Amédée et sa sœur d’avoir été baptisés et d’avoir fait leur première communion.
À la fin de la guerre et après la Libération, l’exemple de Michel Baluze, instituteur et ancien combattant de la Guerre 1914-1918, chef des Francs-tireurs et partisans lors de la libération de Brive en 1944, et plus encore celui de Georges Guingoin le marquèrent durablement.
Après l’école communale, Amédée Nony fit ses études secondaires au collège moderne et technique d’Égletons (Corrèze) et entra à l’École normale d’instituteurs de la Vienne à Poitiers en 1947. Il adhéra au Parti communiste français dans la cellule de l’EN en 1949 mais cessa son adhésion à sa sortie en 1951 tout en « conservant des contacts et sans interrompre la lecture des périodiques du parti ». En revanche, il continua à être très actif au Mouvement de la Paix.
Il fut alors affecté comme instituteur au cours complémentaire de Latillé (Vienne) puis à l’école élémentaire de cette bourgade jusqu’en 1953. Il épousa à Poitiers le 30 juillet de cette année une institutrice, Jeanne Jallais, militante communiste, fille d’un chef d’atelier à l’établissement régional du génie militaire de Poitiers, militant de la CGT. Ils eurent cinq enfants.
De 1954 à 1960, le couple occupa un poste double à Coulonges, dans le canton de la Trimouille (Vienne). Amédée Nony fit son service militaire comme sergent dans l’Armée de l’air en 1956 au Blanc (Indre), mais ne partit pas en Algérie en raison de ses charges familiales.
Depuis l’école normale, il était adhérent du Syndicat national des instituteurs et fut délégué cantonal à partir de la rentrée 1953 puis membre du conseil syndical départemental. En 1960, il devint directeur de l’école à trois classes de Fleuré, près de Poitiers. Ce rapprochement du chef-lieu du département facilita son militantisme à la section départementale du SNI dont il devint secrétaire général adjoint au côté de René Bibault, militant communiste qui dirigeait la section depuis 1949. Dans le secrétariat, il était chargé des traitements et du logement et, en tant que membre de la commission administrative paritaire départementale durant 17 ans, il acquit une grande expérience des affaires personnelles et une notoriété auprès de ses collègues.
En 1960, Amédée Nony adhéra à nouveau au PCF. Lors de sa participation à son premier conseil national du SNI, le 23 décembre 1960, il intervint dans le débat sur le référendum concernant l’autodétermination en Algérie, en se prononçant pour le non, car répondre positivement serait « cautionner une escroquerie morale », ce qui souleva la colère de Denis Forestier.
La fédération communiste de la Vienne le proposa pour suivre le stage organisé du 27 août au 18 septembre 1961, mais le secrétariat ne ratifia pas sa candidature avec le motif : « attendre le prochain stage en tenant compte de la coupure de 10 ans ». En 1962, sa candidature fut acceptée mais il ne put y participer en raison de son changement de poste. Finalement, il suivit le stage du 22 août au 7 septembre 1963.
Tout au long de sa vie professionnelle, il s’intéressa surtout beaucoup aux questions pédagogiques et militait au Groupement français d’éducation nouvelle, comme son épouse. En 1962, il devint adjoint à l’école d’application D. Allard et participa à partir de 1965 à la commission nationale du SNI des maîtres formateurs des écoles annexes et d’application. Bien que militant du courant des ex-cégétistes, il eut l’occasion de débattre de manière féconde avec Jeanne Lordon dont il appréciait la sincérité de l’engagement.
À la rentrée 1967, Amédée Nony fut élu secrétaire de la section départementale de la Vienne de la Fédération de l’Éducation nationale. Il fut au premier rang dans les luttes de mai-juin 1968, en s’efforçant d’assurer la liaison entre ouvriers et enseignants en lutte et avec les étudiants, ce qui fut un peu plus difficile.
De 1970 à 1973, son épouse et lui furent au centre d’une « affaire » : au motif qu’il était partiellement déchargé de service à titre syndical, l’inspecteur d’académie et le recteur refusèrent en juillet 1970 que le couple soit nommé sur des postes libres à l’école annexe de l’école normale de Poitiers, rue du Général-Demarçay, alors qu’ils avaient tous les titres, la notation et l’ancienneté pour y prétendre. André Belleville et Alfred Sorel, élus "Unité et Action" au bureau national du SNI dénoncèrent cette atteinte au droit syndical au BN de septembre 1970 ; Robert Dernelle répondit que la direction de la FEN avait réagi. Avec le soutien des sections départementales du SNI, de la FEN et de la section académique du Syndicat national des enseignements de second degré, Amédée Nony et son épouse déposèrent un recours gracieux auprès du ministre, sans succès. Ils firent ensuite appel devant le tribunal administratif, toujours sans succès et enfin auprès du Conseil d’État. La motion U-A sur les libertés déposée au congrès national de la FEN de 1971 fit référence, sans nommer le cas, à cette remise en cause du contrôle paritaire des nominations « en fonction de considérations extra-professionnelles critères et d’ingérences politiques ». Le 9 juin 1972, le Conseil d’État annula enfin la nomination litigieuse du collègue nommé en 1970. En septembre 1972, le nouvel inspecteur d’académie et le nouveau recteur refusèrent cependant de nommer les époux Nony sur deux nouveaux postes d’adjoints vacants dans l’école annexe. Une pétition recueillit de très nombreuses signatures dans la Vienne, bien au-delà des rangs du SNI. De nouvelles interventions de la FEN eurent lieu. Il fallut attendre l’année suivante, en 1973, pour que le couple soit nommé à l’école d’application Paul Blet à Poitiers, lui comme directeur ; ils y demeurèrent jusqu’à leur retraite, prise en 1983 pour son épouse et en 1986 pour lui.
Entre-temps, en 1971, Amédée Nony avait passé le témoin de secrétaire général de la SD/FEN à un jeune militant professeur d’enseignement général de collège du SNI, Michel Veylit, tout en restant secrétaire adjoint encore deux années. Il resta jusqu’à sa retraite membre du CS du SNI et de la commission administrative départementale de la FEN, intervenant souvent sur les acquisitions des savoirs et savoir-faire et sur la formation des maîtres qui était pour lui fondamentale.
Sans rien avoir perdu de ses convictions politiques, Amédée Nony cessa son adhésion au PCF au début des années 1990.
En 2013, son épouse et lui partageaient leur retraite entre leurs résidences campagnardes de Massognes dans la Vienne et de Saint-Hilaire-les-Courbes. Après le décès de son épouse en octobre 2018, il se retira dans sa campagne corrézienne.
Par Alain Dalançon
SOURCES : Arch. du comité national du PCF. — Arch. des sections départementales du SNI et de la FEN de la Vienne et de la section académique du SNES de Poitiers. — l’Ecole Libératrice, l’Enseignement public. — Témoignages de militants du SNI, de la FEN (dont celui de l’auteur) et du PCF. — Renseignements fournis par l’intéressé. — Notes de Jacques Girault.