OLIVIER Lucette, Thérèse, Fernande

Par Pierre Bonnaud

Née le 5 Juin 1924 à Nyons (Drôme), abattue par une patrouille allemande le 14 juillet 1943 au Teil (Ardèche) ; ouvrière en soie, militante des Jeunesses communistes ; résistante, homologuée Résistance intérieure française (RIF), mouvement "Front National".

Lucette, Thérèse, Fernande OLIVIER était la fille de Louis, André, Eugène OLIVIER, cheminot, et de Francia, Eugénie, Léa Taulègne, son épouse.
Célibataire, ouvrière au moulinage du Frayol, ou, selon son acte de décès, ouvrière cartonnière, Lucette Olivier faisait partie en 1943 d’un groupe clandestin des Jeunesses communistes dans la localité cheminote du Teil (Ardèche). Son père était agent des chemins de fer. Lucette Olivier demeurait chez ses parents, au numéro 3 de la Cité SNCF. « Le père de la jeune Lucette Olivier n’est pas connu comme communiste », notait dans un rapport daté du 16 juillet 1943 le commissaire des Renseignements généraux de l’Ardèche.
Dans la nuit du 13 au 14 juillet 1943, Lucette Olivier participa à une distribution de tracts du Parti communiste, rue de la République, au Teil. Les communistes appelaient à célébrer la fête nationale du 14 juillet 1943 par la grève et par des manifestations contre les « occupants » et les « fantoches de Vichy ».
La cité cheminote était dans ces circonstances quadrillée par un détachement de l’armée allemande (qui comptait environ soixante-dix hommes selon les autorités préfectorales). Les services de police de la ville (un commissaire, cinq inspecteurs, un secrétaire, neuf gardiens) étaient d’astreinte pour assurer la surveillance des quartiers.
Surprise par une patrouille allemande, Lucette Olivier fut abattue d’une rafale de mitraillette à l’angle de la rue de la République et de la rue de l’Abeille (qui porte aujourd’hui son nom). Grièvement blessée, transportée au commissariat de la ville par les policiers français, elle succomba à ses blessures. Au moment de la fusillade, elle était accompagnée de Martin Mathon (tourneur-ajusteur, né le 11 février 1916 au Teil), qui réussit à s’enfuir. Les services de police de la ville identifièrent d’autres membres des Jeunesses communistes qui participaient à la distribution : Roger Hauteville (né le 29 novembre 1921 à La Voulte), put lui aussi prendre la fuite. Roger Demauves (ouvrier d’usine né le 27 octobre 1908 à Saint-Donat, Drôme) fut interpellé et incarcéré.
Le commissaire des Renseignements généraux de l’Ardèche indiquait dans son rapport du 16 juillet 1943 : « La population de Le Teil accuse certains membres du PPF d’avoir servi d’informateurs aux troupes d’opération. » Dans une déclaration datée du 15 avril 1945 et publiée dans l’Ardèche martyre, André Gallet, secrétaire de la section communiste du Teil, accablait Jean Reynaud, responsable local du PPF, tenancier de la Brasserie du Commerce : « le wafen Reynaud » était désigné comme celui qui avait alerté « les boches ».
Les obsèques de la jeune fille eurent lieu le 15 juillet en présence d’une foule considérable : les estimations policières varient (2 000, 4 000, 5 000 personnes). Le commissaire de police du Teil en donne la description suivante dans un rapport remis au préfet le 23 juillet 1943 :
« Nous avons constaté la présence à cette cérémonie des dirigeants locaux de la SNCF, du capitaine des pompiers. Etc. Tandis que le corbillard se rendait à la maison mortuaire, deux jeunes gens qui ont été par la suite identifiés comme étant les nommés Monjot Raymond et Desvaux Raymond y ont accroché une couronne portant une banderole rouge et l’inscription ``Ta mort sera un exemple’’. Cette couronne a été immédiatement enlevée. En outre, le patron de la jeune fille tuée, a fait porter par ses ouvrières une gerbe de fleurs blanches et rouges entourées d’un ruban tricolore avec l’inscription ``Ta vie et ta mort seront un exemple’’. Il s’agit de monsieur Harlez Jules. »
Au cours de la cérémonie, les deux jeunes teillois, membres des Jeunesses communistes, « Les nommés Monjot Raymond, né le 7 mai 1921 à Saint-Félicien (Ardèche), coiffeur à Le Teil » et « Desvaux Raymond-André, né le 16 décembre 1921 à Le Teil, ouvrier aux usines Lafarge » furent interpellés par la police du Teil et placés en garde à vue.
Lucette Olivier est devenue une figure emblématique de la mémoire de la Résistance ardéchoise. Son effigie est aujourd’hui incluse dans la composition graphique qui orne le hall d’accueil du Musée départemental de la Résistance et de la Déportation au Teil.
La mention « Mort pour la France » fut apposée sur son acte de décès le 30 octobre 1945. Elle fut homologué résistante, membre de la Résistance intérieure française (RIF), mouvement "Font National".
Elle est enterrée dans une tombe collective au cimetière du Teil aux côtés de Jacques Bonnet et Pierre Bonnet, Henri Demoulin, Louis Mathon et Italico Sabadini. .
Son nom figure sur une plaque apposée dans la rue où elle fut abattue, qui porte désormais son nom et sur le monument aux morts du Teil.
Il existe également une rue Lucette Olivier à Villard-Bonnot (Isère), et une impasse à son nom à Laudun-L’Ardoise (Gard).
La médaille de la Résistance fut décernée à Lucette Olivier à titre posthume en 1948.


Voir : Le Teil (Ardèche)

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article147588, notice OLIVIER Lucette, Thérèse, Fernande par Pierre Bonnaud, version mise en ligne le 17 septembre 2013, dernière modification le 17 août 2022.

Par Pierre Bonnaud

ICONOGRAPHIE : Lucette Olivier, photographie dans l’Ardèche martyre, p 19, (voir sources).

SOURCES : AVCC, Caen, AC 21 P 383084 (nc). — SHD, Vincennes, GR 16 P 450021 (nc). — Arch. Dép. Ardèche, 72 W 108. — A. Demontès, L’Ardèche martyre, Largentière, 1946. — Louis-Frédéric Ducros, Montagnes ardéchoises dans la guerre, Valence, 1982, t. II, p. 112. — Mémorial de la Résistance en Ardèche, édité par l’ANACR, Aubenas, 3e éd. 1994. — Femmes ardéchoises dans la Résistance, publication de l’Association du musée départemental de la Résistance en Ardèche Le Teil, 1997. — Alberte et André Cayron, Peuple de la nuit, Montmélian, La Fontaine de Siloé, 1998. — Journal officiel du 13 octobre 1946. — État civil. — Notes de Jean-Pierre Ravery. — État civil, acte de décès n°73.

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