VASBENTER Louis

Par Mise à jour par Bernard Boller

Né le 14 janvier 1819 à Lyon, mort le 23 octobre 1875 à Londres ; ouvrier typographe à Lyon, puis à Paris ; militant ouvrier et socialiste.

Louis Vasbenter était le fils de Jean François Vasbenter, fabricant de tulles, et de Marie Pache.

Lecteur des théoriciens de la réforme de la société, à la fin de la Restauration, Vasbenter n’adhéra ni au saint-simonisme ni au fouriérisme, comme beaucoup d’ouvriers qui ont plus ou moins clairement désiré une synthèse des idéologies qu’on leur proposait et préparé ainsi le socialisme détaché des chefs d’école de 1848.

Sur le plan professionnel, il fit sûrement partie de la Société de secours mutuels des typographes de Lyon, mentionnée officiellement pour la première fois en 1822, mais qui remontait à la fin de l’Empire. Ce fut un militant influent, ouvert sur les problèmes des autres professions ouvrières, en relations avec l’Union des Travailleurs du Tour de France, qui s’efforça d’arracher les compagnonnages à leurs querelles d’obédience, en correspondance avec Flora Tristan qui désirait unir la classe ouvrière.

Il organisa, en avril 1845, une coalition des compositeurs d’imprimerie lyonnais des ateliers qui composaient le Moniteur judiciaire et la Gazette de Lyon. Les grévistes protestaient contre l’agrandissement du format de ces journaux qui avait pour effet de leur imposer davantage de travail pour la même rétribution. La grève échoua, encore que des aménagements de salaires semblent avoir été accordés peu après. Sept « moteurs » de la grève comparurent devant le tribunal correctionnel au début du mois de juin. Vasbenter fut parmi eux. Les juges le condamnèrent à un mois de prison. Ses camarades écopèrent de quinze à vingt-cinq jours. Tous firent deux mois de prévention.

Inscrit sur une liste noire, Vasbenter se rendit à Paris, où il trouva de l’embauche. Il y organisa un groupe d’études qui publia des brochures pour apprendre aux ouvriers ce que Pelloutier appellera « la science de leur malheur ». L’une est consacrée aux conseils de prud’hommes et constitue un guide du droit ouvrier en même temps qu’un résumé des revendications à faire aboutir sur cette question particulière du recours à la justice prudhomale.

Après Février 1848, on le rencontre aux alentours de la Commission du Luxembourg. Il habite, 2, rue Saint-Benoît, chez le traiteur Petteret ; il est secrétaire d’une commission mixte, patronale et ouvrière chargée d’examiner le problème des salaires et du salariat. Le 22 février 1848, il calma l’ardeur destructive des pressiers qui cherchaient à envahir et briser les « mécaniques » qui se trouvaient dans Paris. Un jeune étudiant témoin écrivit, « Ce jour là, son éloquence persuasive les ont dispersés et empêchés de détruire les presses de l’imprimerie Fournier ».

Devenu l’ami de Proudhon, il fut gérant du Représentant du Peuple, puis de La Voix du Peuple et enfin du Peuple de 1850.

En 1850, alors qu’il était gérant de La Voix du Peuple, il fut impliqué dans l’affaire du « Comité républicain » de la rue Blanche, que le parquet avait voulu confondre avec celle des Associations ouvrières de la rue Michel-le-Comte (Voir Deroin J.). En novembre 1850, il comparut comme prévenu libre, comme tous les inculpés de l’affaire de la rue Blanche, et, tout comme eux, fut défendu par Crémieux, qui protesta contre l’assimilation que le ministère public établissait entre ses clients et les accusés de l’Union des Associations de travailleurs. Il laissa même passer cette phrase : « En acquittant mes clients, messieurs les jurés, vous ne ferez que donner logiquement plus de force au verdict que vous avez justement rendu contre ceux avec lesquels nous ne voulons pas être confondus ». Dans ces conditions, Vasbenter fut acquitté ainsi que ses amis du « Comité républicain ».

Parce que, le 12 décembre 1848, il avait été condamné pour délit de presse, et malgré sa libération du début de septembre 1850, il fut arrêté chez lui, rue Coq-Héron (il travaillait alors chez Dubuisson), le 2 décembre, dès l’aube, par mesure de précaution. Ce fut aussi parce que des lettres de sa main, relatives aux sociétés secrètes, saisies chez des socialistes de Besançon, le rendaient suspect. L’ensemble lui valut d’être expulsé de France.

À partir de 1852, il vécut à Londres, il participa avec Étienne Cabet, Pierre Leroux, Louis Blanc, Martin Nadaud à des réunions où l’on tentait d’établir un programme d’action commune susceptible de rallier, au-delà des divergences de doctrine, tous les partisans des systèmes socialistes.

En 1864, le 5 octobre, Le Lubez proposa de l’admettre au Conseil général de l’Internationale ainsi que Bordage, Jourdain G., Jules Leroux et Morisot. Ces quatre candidatures furent adoptées à l’unanimité. Vasbenter ne participa pas au travail du Conseil.
Il émigra par la suite en Amérique, mis il n’y resta pas. Il revint ultérieurement en Angleterre. Franc-Maçon, il fut affilié à diverses loges de proscrits à Londres. Ses obsèques en 1875 furent l’occasion d’un grande manifestation qui rassembla les Maçons français.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article147886, notice VASBENTER Louis par Mise à jour par Bernard Boller, version mise en ligne le 11 mars 2015, dernière modification le 19 novembre 2020.

Par Mise à jour par Bernard Boller

SOURCES : Arch. Min. Guerre, B 371. — Minutes..., op. cit., t. I. — Gazette des Tribunaux, 7 juin 1845. — Fernand Rude, Le Mouvement ouvrier à Lyon, de 1827 à 1832, Paris, 1944. — Édith Thomas, Pauline Roland, Paris, 1956. — Gustave Lefrançais, Souvenirs d’un Révolutionnaire. Voir en outre la longue lettre datée de Lyon 11 juin 1843, de Vasbenter à Flora Tristan, publiée par Jules-L. Puech, La Vie et l’œuvre de Flora Tristan, Paris, 1925, pp. 471-476. — André Combes, « Les Philadelphes et autres loges de Communards », Chroniques d’histoire maçonnique n° 35, 1985. — Notes de M. Cordillot et de J. Chuzeville. — État civil en ligne cote 2E182, vue 21.- Philippe Faure, Journal d’un combattant de février, 1850, Jersey. — Le XIXe siècle, 2 novembre 1875.

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