NAZE Pierre, Lucien, Alphonse

Par Gilles Pichavant

Né le 13 octobre 1898 à Montivilliers (Seine-inférieure), mort le 31 janvier 1981 au Havre (Seine-Maritime) ; officier mécanicien ; syndicaliste CGT de Seine-Inférieure, Seine-Maritime ; résistant faisant partie du réseau "Heure H" (OCM) et du Front national ; membre du Comité de libération de la ville du Havre ; communiste ; adjoint au maire élu en 1945, conseiller municipal de la Ville du Havre de 1944 à 1981, adjoint au maire ; syndicaliste CGT de la marine.

Pierre Naze
Pierre Naze

Fils d’un maréchal-ferrant (Pierre Achille Naze, né le 12 juin 1867 à Saint-Jean-de-la-Neuville), et d’une ménagère (Evangeline Joséphine Le Brun, née le 15 janvier 1870 à Criquetot-L’Esneval), il entra à l’école d’apprentissage du Havre à l’âge de douze ans, puis, en 1913, à l’école des élèves officiers mécaniciens. Après son diplôme, il embarqua sur les bateaux des « Chargeurs », puis de la « Transat ». Engagé volontaire en 1917, il navigua sur un aviso en Mer Noire en 1918 (René Cance le qualifia de « compagnon des mutins de la Mer Noire » à son décès), et termina comme second maître à bord du cuirassé « Paris » en 1920. Il navigua ensuite sur les navires de la « Compagnie Havraise Péninsulaire », dont le « Ville-de-Tamatave ».

Breveté de 1ère classe en 1922, chef-mécanicien en 1924, Pierre Naze se marie le 8 juin 1932 à Sanvic (Seine-Inférieure), avec Olive André Château. Ils eurent quatre enfants. Il navigua jusqu’en 1935, date à laquelle il débarqua pour cause de maladie. Il devint le secrétaire adjoint du syndicat de la marine marchande du Havre cette année-là. Il connut les grandes luttes revendicatives de la période du Front Populaire. C’est à cette époque qu’une décision fut prise en congrès que le syndicat adhère à la CGT.

À la Libération il reprit ses activités syndicales et réussit à réunir dans un syndicat unique les officiers de pont, de la machine et de la radio. Il fut secrétaire adjoint de la Fédération des officiers mécaniciens de 1945 à 1968. Il fut administrateur de la Caisse nationale d’allocation familiale des marins de sa création à 1971. Il multiplia ses actions dans tous les domaines : la marine, les affaires sociales, l’éducation nationale, la grande presse, en étant membre de nombreux comités ou en tant qu’expert, etc. Par exemple, il fut secrétaire, vice-président, puis président de l’Orphelinat des marins et navigateurs du Havre et de la région depuis 1935 jusqu’à sa mort.

Membre de la commission exécutive de l’Union des syndicats ouvriers du Havre et de sa région à la Libération, il fut une dernière fois réélu à ce poste lors du congrès de décembre 1956. Il fut membre de la CA de l’Union départementale CGT de Seine-Maritime. Cela lui valut de recevoir une médaille au titre de membre ou ancien membre de la CA de l’UD ayant plus de 30 années de fidélité à la CGT, à l’occasion de son 25e congrès, le 25 novembre 1966.

Pierre Naze fut un grand résistant. Mobilisé le 25 août 1939 comme premier maître mécanicien affecté à la défense du littoral du Havre, puis ingénieur-mécanicien de 2e classe de réserve en 1940, Pierre Naze fut démobilisé à Toulon le 25 septembre de la même année. Il entra dans la Résistance le 1er janvier 1942, dans le réseau « Heure H », puis rejoint les FTPF au début 1943. En juin Pierre Guinard lui remettait sa première carte du Parti communiste français. En août-septembre 1943, à la suite du transfert de Marceau Flandre dans l’Eure, il fut chargé de restructurer l’organisation des FTP au Havre avec Marcel Lancelot, autre officier de la marine marchande, Marcel Toulouzan, marin-docker, Marcel Larriven, marin, et Fernand Bellenger. A partir de janvier 1944, il devint l’un des deux adjoints d’Henri Roblin, commandant de la compagnie havraise de FTP, avec Marcel Larriven. Il participa à des opérations de sabotage sur le port du Havre. Il fut l’un des rares communistes à échapper à la grande rafle qui dévasta les réseaux de la région en juin. Pendant cette période il cacha des pilotes canadiens, ce qui lui vaudra les félicitations du général Eisenhower.

Après le débarquement, et surtout après la percée d’Avranches et le repli de l’armée allemande, la rupture des communications avec Rouen, les dernières évacuations, la mise de la ville en état de « défense » par l’armée allemande, obligèrent à une dernière restructuration des FTP, avec deux compagnies, Le Havre et Montivilliers, sous l’autorité de Pierre Naze, Maurice Moyon et Fernand Bellenger. Quelques faits d’armes des FTP illustrèrent la libération de la ville réalisée essentiellement par les Anglo-Canadiens : le 10 septembre la prise du Blockhaus dit du « pain de sucre », par la section FTP-Lepiller ; le 11 septembre, l’occupation sans dégâts du central téléphonique, et celle de la mairie de Bléville ; le 13 septembre, la prise de l’usine Schneider par le groupe FTP-Vangeon qui fit des prisonniers et récupéra des armes lourdes.

C’est en tant que dirigeant du Front National que Pierre Naze devint membre du Comité local de libération de la ville du Havre, qui fut dirigé par le radical socialiste Émile Sicre. Les trois communistes qui en étaient membres étaient Pierre Guinard au titre de la section communiste locale, dont il est le secrétaire, Maurice Moyon, FTP, représentant la CGT-Métaux, et Pierre Naze.
C’est à ce titre qu’il fut l’un des membres fondateurs du Havre Libre, et l’un des 5 éditorialistes des débuts du journal, avec René Cance (communiste), Henri Noguères (SFIO), Jean Binot (SFIO), et Louis Siefridt (MRP). Il en fut administrateur du journal jusqu’à la mort, et resta un éditorialiste régulier : par exemple, le 14 mars 1974, il écrivit une libre expression dans laquelle il déclara « France, notre paquebot ne doit pas être bradé ».

Pierre Naze fit partie de la première municipalité du Havre nommée par arrêté du préfet le 16 novembre 1944, et devint le 1er adjoint au maire radical-socialiste Émile Sicre. Ils étaient 3 adjoints communistes dont Lionel Fortin, 2e adjoint, et Maurice Moyon, 8e.

Le premier tour des élections municipales du 29 avril 1945 au Havre, furent un fiasco au Havre pour la liste « Républicaine d’unité française », conduite par le maire radical Émile Sicre, qui était composée de toutes les tendances issues de la Résistance, saur le MRP. La liste conduite par Pierre Courant, l’ancien maire collaborateur de la période 1941-1944, pourtant déchu et privé de ses droits, la devança. Il restait 33 postes de conseillers à pourvoir, et Pierre Naze fut désigné comme tête de liste pour le 2e tour, la liste étant intitulée « Républicaine antifasciste ». Il fut le seul rescapé de la municipalité sortante à être élu le 13 mai 1845, le seul communiste à être présent au conseil municipal du Havre de 1945 à 1947. Il fut ensuite constamment réélu, et fut conseiller municipal jusqu’à sa mort le 31 janvier 1981.

Il fut l’adjoint de René Cance entre 1956 et 1959. Il participa en tant qu’élu communiste aux luttes sociales des 30 glorieuses, comme en 1965, aux côtés de René Cance, pour la défense de l’usine Mazeline.
Il fut le principal artisan de la création au Havre de la Maison des gens de mer en 1973, après 7 ans d’efforts. Il en devint le président. Son action persévérante pour la création de cette maison lui valut d’être reçu Chevalier de l’Ordre National du Mérite. Il fut fait Officier du Mérite Maritime.
Il fut fait Chevalier dans l’ordre de la Légion d’Honneur et Chevalier de l’Ordre des Palmes Académiques.

Il fut président de l’ANACR, comité du Havre et de la région ; il fut membre du Conseil national de l’ANACR depuis sa création.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article148561, notice NAZE Pierre, Lucien, Alphonse par Gilles Pichavant, version mise en ligne le 29 août 2013, dernière modification le 27 septembre 2021.

Par Gilles Pichavant

Pierre Naze
Pierre Naze
Cérémonie pour pour le 80e anniversaire de Pierre Naze (à droite), en présence d’André Duroméa (à gauche) (Archives PCF Le Havre).

SOURCES : Archives municipales du Havre — ADSM— Le Havre LibreLe Havre Presse — Marie-Paule Dhaille-Hervieu, Communistes au Havre : histoire sociale, culturelle et politique, 1930-1983, Publication Univ Rouen Havre, 2010.

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