PAUL Gabriel dit « Gaby »

Par Christian Bougeard

Né le 27 janvier 1918 à Brest (Finistère), mort le 20 décembre 2015 ; ouvrier à l’arsenal de Brest ; cadre communiste dans la Résistance ; secrétaire fédéral du PCF du Finistère en 1945 ; député communiste du Finistère (1945-1958) ; conseiller municipal de Brest.

Fils de cheminot, titulaire d’un brevet supérieur obtenu à l’école primaire supérieure de Brest, Gabriel Paul devint ouvrier à l’arsenal de Brest. Il commença sa carrière militante en adhérant et en militant activement à la CGT en 1936. L’occupation allemande en juin 1940 et la mainmise de la Kriegsmarine sur le port et l’arsenal de Brest poussa Gabriel Paul à s’engager dans la Résistance, animée principalement par le PCF clandestin à l’arsenal. Il diffusa la propagande du PCF et du Front national (tracts, journaux) et adhéra au parti clandestin en 1942. Après le réunification clandestine de la CGT, Gaby Paul participa à la reconstitution d’un syndicat clandestin à l’arsenal puis à la mise sur pied d’un UL clandestine à Brest, chargée de préparer des grèves insurrectionnelles à la Libération, stratégie impossible à mettre en oeuvre du fait du repli de milliers de soldats allemands dans la forteresse de Brest et du siège des armées américaines jusqu’en septembre 1944. Dès 1943, à la suite de vagues d’arrestations — en octobre 1942, selon le témoignage de Gabriel Paul, le PCF serait tombé à une trentaine de membres à Brest — ou de mutations de responsables dans d’autres régions, Gaby Paul entra dans le triangle de direction du PCF de l’agglomération brestoise dont il devint le responsable politique en octobre 1943.

En mai 1944, il fut muté comme responsable « masse » de la direction départementale du PCF du Morbihan avant d’être rappelé le 20 juin 1944 dans le Finistère pour y assumer les plus hautes responsabilités politiques dans la période insurrectionnelle, d’abord comme secrétaire départemental à l’organisation puis comme secrétaire politique. Selon Eugène Kerbaul, Daniel Trellu, instituteur communiste, responsable des FTP du Finistère, nomma Gaby Paul commandant FTP le 21 juin 1944. A ce poste il opéra dans secteur de Laz/Trégourez/St Thois où il y fut chargé par les FTP d’organiser les maquis et les parachutages.Il agit pour que les groupes FTP ne soient plus oubliés dans ces parachutages. Il participa aux combats dans la région de Scaër où les allemands attaquèrent le maquis avant que les nouvelles armes reçues ne soient réparties. Gaby échappa de justesse à l’arrestation.

A la Libération, Gaby Paul fut nommé au Comité Départemental de Libération du Finistère, et y retrouva Alain Cariou, résistant FTP dans le Cap Sizun. Il contribua à relancer l’administration, par la mise en place des délégations spéciales en attendant les élections municipales de 1945, l’économie et l’organisation du ravitaillement, la lutte contre le marché noir, le relogement des populations dans le contexte des ruines comme celles de Brest.

Après la Libération, Gabriel Paul participa à la réorganisation légale de la fédération communiste du Finistère et fut élu, à 27 ans, en mars 1945 secrétaire fédéral dans le premier comité fédéral de 24 membres, instauré sous la houlette de Alain Signor, un dirigeant d’avant-guerre. En avril 1945, la fédération du Finistère comptait 8 922 adhérents, 11 200 en décembre 1945, 13 000 à la fin de 1946. Durant cette période, Gabriel Paul, laissa la responsabilité politique de la fédération à Alain Cariou, secrétaire fédéral de 1945 à 1947. Le parti ne le présenta aux élections municipales, ni aux élections cantonales à Brest, en avril et en septembre 1945, mais Gabriel Paul figurait en deuxième position, derrière Pierre Hervé, membre de l’Assemblée consultative, sur la liste communiste le 21 octobre 1945. L’ouvrier de l’arsenal Gabriel Paul fut élu député du Finistère à la 1ère Assemblée constituante (22,7 % des voix, deux sièges sur neuf). A Brest, l’implantation électorale de la gauche était forte, même si le MRP arrivait en tête, confirmée par la victoire du Oui (54,5 % des voix) lors du référendum constitutionnel du 5 mai 1946. En juin 1946 puis en novembre 1946, Gabriel Paul fut réélu député du Finistère, en deuxième position, le PCF emportant un troisième siège sur dix, pour Alain Signor, en novembre. En octobre 1947, Gabriel Paul entama aussi une carrière d’élu municipal communiste de Brest, siégeant dans l’opposition au maire RPF Alfred Chupin, réélu en avril 1953 et en mai 1954 dans des municipalités dirigées par le sénateur MRP Yves Jaouen. Le 15 mars 1959, au second tour, Gabriel Paul figurait en deuxième position sur la liste d’union de la gauche brestoise conduite par le conseiller général (SFIO), Robert Gravot, qui fut battue par la liste d’union des droites de Georges Lombard (indépendants, MRP-UNR).

À la fin des années 1940, Gabriel Paul fit preuve de fidélité à l’égard de ligne du parti notamment lors de l’éviction de Pierre Hervé qui démissionna de son siège de député le 15 juin 1948, remplacé par Marie-Yvonne Lambert. La guerre froide et la stalinisation du parti provoquèrent une crise politique au sein de la fédération du Finistère. En effet, lors de la conférence fédérale de février 1949, présidée par Jeannette Vermersch en personne, une véritable « purge » frappa le comité fédéral. Vingt quatre nouveaux membres remplacèrent les sortants et le bureau fédéral fut renouvelé avec notamment la promotion de Daniel Trellu qui remplaça Marie-Yvonne Lambert comme secrétaire fédéral, tandis que le député Alain Signor était écarté du comité central du PCF. La direction centrale dénonçait apparemment le « sectarisme laïque » de la fédération du Finistère qui expliquerait la perte d’influence du Parti. Mais, il s’agissait aussi d’écarter Ernest Miry, secrétaire général de l’UD CGT, ce qui intervint en juin 1949 car il refusait de faire son autocritique, et de régler des conflits de personnes très exacerbés s’abritant derrière des luttes de lignes au sein de la direction finistérienne. Dès 1948, Gabriel Paul avait participé, avec trois autres communistes brestois, à une réunion du bureau politique à Paris pour tenter de clarifier la situation. Mais en 1950, au moment où la lutte contre la « déviation titiste » faisait rage dans le Finistère, les parlementaires Gabriel Paul et Marie-Yvonne Lambert furent aussi critiqués, pour cause d’investissement insuffisant. De nombreuses exclusions et autocritiques eurent lieu dans les années 1950-1952. En 1952, Daniel Trellu fit son autocritique et reconnut des pratiques sectaires. La fédération fut à nouveau ébranlée par l’affaire Tillon-Marty. Néanmoins, Gabriel Paul, fut réélu en deuxième position, derrière Alain Signor, sur la liste communiste (20,9 % des voix) aux élections législatives de juin 1951.

En 1950, Gabriel Paul épousa Christiane, une vendeuse brestoise, militante communiste, responsable de l’Union des femmes françaises (UFF). Elle était secrétaire départementale de l’UFF du Finistère, membre de la direction nationale et adhérente du PCF depuis 1946. De 1948 à 1951, elle siégea au comité fédéral du Finistère et de nouveau en 1959.

Gaby Paul accompagna la grande grève des travailleurs de l’État en 1951 et joua un rôle décisif à l’Assemblée Nationale pour la promulgation du décret du 22 mai 1951 qui alignait les salaires des travailleurs de l’État sur ceux des métallurgistes de la région parisienne. C’était un ami de Pierre Cauzien, grièvement blessé aussi le 17 avril 1950 et amputé d’une jambe, le témoin principal de Kris et Etienne Davodeau, les auteurs de la BD "Un homme est mort".

Dans les années 1950-1968, Gabriel Paul assuma des responsabilités importantes dans les instances dirigeantes de la fédération du Finistère du PCF. En 1953-1954, Gabriel Paul était membre du comité fédéral ; en 1956-1957 il siégeait au bureau fédéral et en juin 1959, il figurait comme deuxième secrétaire fédéral du Finistère dans les organigrammes du parti. En juin 1961 et juin 1962, Gabriel Paul était en troisième position au secrétariat, secrétaire à la propagande, militant du mouvement de la paix et de la CGT de l’arsenal mais en 1964-1967, il n’était plus membre que du bureau fédéral, responsable du travail des élus et en mai 1968 du comité fédéral.

En janvier 1956, Gabriel Paul avait été réélu député du Finistère en conduisant cette fois la liste communiste (18,6 % des voix) qui conserva deux sièges avec l’entrée à l’Assemblée nationale de Alphonse Penven, un agriculteur, maire et conseiller général du Huelgoat. Mais en novembre 1958, Gabriel Paul perdit son siège à Brest. Huit candidats s’affrontaient au premier tour. Distancé de 350 voix par Robert Gravot (SFIO), Gabriel Paul se désista en sa faveur au second tour qui dans une quadrangulaire vit l’élection de l’indépendant de droite Georges Lombard avec 21 voix d’avance sur le socialiste. Dès lors, l’ancien député communiste retrouva un emploi de secrétaire comptable à l’arsenal, selon la profession de foi des élections municipales de 1959, même si les documents internes du parti le considéraient toujours comme « ouvrier ».

Aux élections législatives de 1977, lorsque l’union de la gauche remporta les élections municipales à Brest, Gabriel Paul redevint conseiller municipal dans la municipalité Besret (PS). Il fut vice-président de la Communauté urbaine de Brest, chargé des transports jusqu’en 1983. Dans les années 1980, Gabriel Paul, prit part à la crise interne qui affecta le parti PCF à Brest. En 1989, il se définissait comme communiste réformateur, de même que son épouse Christiane.

Gabriel Paul est mort le 20 décembre 2015, à l’âge de 97 ans.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article148587, notice PAUL Gabriel dit « Gaby » par Christian Bougeard, version mise en ligne le 29 août 2013, dernière modification le 27 juin 2021.

Par Christian Bougeard

SOURCES : Arch. comité national du PCF, comités fédéraux. — RGASPI 495 270 345. — Eugène Kerbaul, 1918-1945 : 1640 militants du Finistère, édit. chez l’auteur, Bagnolet, 1988. — Isabelle Picart, Le PCF à Brest de la Libération à la fin de la Ve République (1944-1958), maîtrise d’histoire, Université de Bretagne Occidentale, Brest, 1989. — Marc Guivarch, Les élections à Brest de 1945 à 1959, maîtrise d’histoire, UBO, Brest, 1993. — Anacr du Finistère.

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