GIRAUD Victor, Honoré, Ange [pseudonyme dans la Résistance : Robert]

Né le 12 janvier 1918 à La Ciotat (Bouches-du-Rhône) ; ouvrier, puis cadre aux Chantiers navals de La Ciotat ; syndicaliste ; Franc-tireur et partisan (FTP).

Fils d’Amédée Giraud et de Gabrielle Bernard, Victor Giraud entra aux Chantiers de constructions navales de La Ciotat le 10 octobre 1930 et devint tôlier traceur. Considéré comme sympathisant communiste, il était membre de la commission syndicale des chantiers avant guerre. Il fit son service militaire à partir du 4 novembre 1938 à l’école de l’Air de Salon-de-Provence (Bouches-du-Rhône). Il était sous les drapeaux à la déclaration de guerre. Et affecté à la Bataillon de l’Air 130. Replié à Bordeaux (Gironde), il fut démobilisé à La Réole (Gironde) en août 1940 et revint à La Ciotat. Il était alors veuf de Ginette Leseur et père d’un enfant. Il reprit son travail et son adhésion au syndicat des Métaux, membre de la Fédération nationale des métaux, en septembre 1940. Il fut désigné comme délégué des charpentiers en fer en 1941 et devint l’un des hommes qui comptaient dans le syndicat alors qu’il ne s’était jamais fait remarquer auparavant, ni sur le plan syndical, ni sur le plan politique, d’après la police. D’après Étienne Brun, il faisait partie du petit groupe de cinq militants qui diffusait tracts et papillons du PC. Outre Giraud et lui, en faisaient partie Aimé Piccato, Joseph Rancurel et Raoul Roux. Cette propagande était entreposée chez Giraud, rue du Four. La police relevait en 1942 qu’il prenait une part active à la direction du syndicat bien que n’étant que simple membre. Il était chargé en effet de surveiller le ravitaillement, très défectueux, de la commune (comme dans toutes les villes du littoral), ce qui le conduisit à intervenir publiquement de façon régulière. Lors de la réunion syndicale du 12 septembre 1941, il dénonçait des commerçants indélicats et des attributions de poisson jugées anormales. Il reprochait à ses camarades leur indifférence en ne signalant pas les abus. Pour une raison qui n’était pas précisée, le secrétaire général du syndicat, le modéré Schohn, ne voulut pas qu’il fasse partie de la délégation qui devait se rendre à Vichy pour évoquer la question avec le cabinet du Maréchal. Alors qu’à la fin septembre 1941, la démission de Schohn et du secrétaire adjoint du syndicat était sur la balance, la police signalait qu’il serait question de sa nomination. Fut-il l’un de ceux qui suscitèrent les manifestations de ménagères – trois cent femmes le matin et l’après-midi - du 12 novembre suivant ? En tout cas, il était l’après-midi dans le bureau de l’adjoint représentant le maire, avec deux de ses camarades, pour essayer de répondre à leurs réclamations. Il revenait sur la question du ravitaillement et sur le peu de résultats obtenus lors de la réunion syndicale du 2 février 1942. La gouvernance de la cité était en crise. Son maire, Fernand Bouisson, l’ancien président de la Chambre des députés, avait été poussé à la démission par les pétainistes de la Légion française des combattants. Ceux-ci jouaient un rôle déterminant dans la mise en place d’un nouveau conseil municipal et, espérant contrôler les ouvriers, proposèrent d’y intégrer des éléments syndicaux. Bien que non choisi, Giraud fit partie des quatre membres du bureau pressentis. Comme ses autres camarades, il signa une attestation sur l’honneur précisant qu’il n’avait jamais été membre du PC, qu’il en réprouvait l’action et la propagande, qu’il s’engageait à suivre le Maréchal et à s’associer dans l’exercice de ses mandats à toute action nécessaire au relèvement de la France dans la Paix sociale. Il était considéré par la police comme un « bon ouvrier », de « vive intelligence », mais elle avait plus de mal à le situer politiquement. Elle le soupçonnait d’« idées communo-gaullistes » ou d’être « à tendance communiste ». Il avait été qualifié d’ancien communiste par l’adjoint au maire en novembre.
Comme d’autres syndicalistes (Paul Gay notamment), il avait participé à l’arrêt de travail de cinq minutes demandé le 31 octobre 1941 par la BBC. En revanche, il s’abstint d’assister à la manifestation « nationale » du 1er mai 1942 organisée dans les chantiers et il fut parmi les manifestants du 14 juillet 1942. Il joua un rôle actif dans la grève du 13 août suivant pour le paiement des heures supplémentaires et fit partie des treize ouvriers et syndicalistes proposés à l’internement administratif et envoyés au camp de Sulpice-la-Pointe (Tarn) par un arrêté préfectoral du 14 août. Interrogé au camp en vue de sa libération, le 29 septembre 1942, il nia avoir adhéré au parti communiste, il s’engageait à se tenir à l’écart de toute activité illégale, et, selon la formule consacrée, se disait disposé à signer « volontiers » l’acte de loyalisme au gouvernement et à suivre le Maréchal dans sa politique de « rénovation nationale ». Considérant qu’il était arrivé depuis peu, le chef de camp ne proposait pas sa libération, bien que n’ayant rien à signaler, si le préfet des Bouches-du-Rhône ne l’envisageait pas. Victor Giraud fut libéré avec quatre autres de ses camarades ciotadens arrêtés avec lui (Félix Bartalini, Henri Floriet, Charles Magaud, Aimé Piccato) le 2 novembre 1942. Il fit partie des ouvriers de La Ciotat qui passèrent dans les rangs des FTP et partirent rejoindre dans le Var le camp Faïta/1e compagnie FTP de Provence en 1943. Sous le pseudonyme de Robert, il remplaça Joseph Bodo alias Liban* comme chef de détachement à l’automne 1943. Les sources consultées ne permettent pas de connaître son parcours ultérieur dans la Résistance. Suivit-il la compagnie dans les Basses-Alpes ? Fut-il muté en ville, comme c’est probable ? Le fait est qu’il était à La Ciotat à la Libération et qu’il présida le Comité local de libération. Il était communiste. Il reprit son travail aux chantiers navals. Chef d’équipe et militant communiste, "il avait pleinement adhéré au mot d’ordre retrousser les manches" à la Libération.
Mal à l’aise dans la période de guerre froide, il vécut douloureusement l’échec de la grève de 1952 et s’écarta du PCF (ou en fut exclu). Lorsque Jean-Louis Moynot le connut en 1959, il "était en guerre larvée et parfois ouverte avec le parti et la CGT" qui le lui rendaient bien.
Cet autodidacte de talent devint un cadre important des CNC. Il était dans les années 60-70 directeur du service Production, puis directeur des services administratifs de l’entreprise et protagoniste, semble-t-il, d’un conflit interne au sein de la direction dans une conjoncture difficile. Il se présenta aux élections municipales de La Ciotat en mars 1983 sous l’étiquette RPR contre la municipalité sortante, communiste. Il était tête de liste. Celle-ci obtint 5 882 voix, soit 34,58 % des suffrages exprimés, au premier tour et 8 336 voix (45,73 %) au second. Sa liste eut neuf élus.
Une avenue de La Ciotat porte son nom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article148815, notice GIRAUD Victor, Honoré, Ange [pseudonyme dans la Résistance : Robert], version mise en ligne le 12 septembre 2013, dernière modification le 1er février 2021.

SOURCES : Arch. dép. Bouches-du-Rhône 5 W 187 (dossier internement), 76 W 68. — Étienne Brun, Ami entends-tu ? La vie sous les étoiles d’un des derniers maquisards ciotadens, témoignage dactylographié, sd. — Souvenirs de Jean-Louis Moynot, manuscrit, p. 40 et passim. — presse (élections de 1983). — témoignage Félix Diana.

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