GROSVALET Jean, Raymond

Par Emeric Tellier

Né le 13 février 1922 à Châteauroux (Indre), mort le 23 juillet 1971 en Yougoslavie (actuelle Serbie) ; diplômé de l’EPCI, ingénieur en semi-conducteurs ; membre de la direction du Syndicat national des ingénieurs et cadres de la Métallurgie (SNCIM-CGT) (1953-1971), membre du bureau, puis du secrétariat de l’Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens (UGICT-CGT), membre du comité exécutif de la Fédération CGT des travailleurs de la Métallurgie (1968-1971) ; membre du parti communiste français (PCF).

Jean Grosvalet en 1968, presse syndicale

En 1929, les parents de Jean Grosvalet s’installèrent dans la banlieue parisienne, à Antony (Seine, Hauts-de-Seine). En 1940, il passa son baccalauréat, après avoir suivi ses études au lycée Lavoisier à Paris. De retour d’exode, il prépara durant deux années, à l’université, le concours d’entrée à l’École de physique et de chimie industrielle (EPCI) de Paris, qu’il intégra. Son diplôme obtenu en 1944, il fut recruté en tant qu’ingénieur par le Groupement de recherche aéronautique (GRA), qui fut par la suite absorbé par l’Office national d’étude et de recherche aéronautique (ONERA). Il participa notamment, au sein de la direction « Résistance des structures » à la création d’une machine à calculer pour itérer les matrices, sur laquelle il déposa, avec Jean Simon, un brevet d’invention en mai 1947, ainsi qu’à différents travaux sur l’étude au sol des vibrations d’appareils.

Son engagement syndical et politique fut concomitant à son entrée dans la vie professionnelle. Il fut élu dès 1945 comme délégué syndical CGT et il participa à l’élaboration du statut des inventeurs salariés de l’ONERA, discuté à la fin des années 1940 et entré en application en 1950.

Jean Grosvalet fut révoqué en novembre 1950 de l’ONERA en raison de ses convictions. Il entra alors comme ingénieur au Laboratoire des Hautes Tensions du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), à Bellevue, chargé des réalisations techniques d’appareillages de recherche. Après trois années, il démissionna, afin de retrouver une situation de chercheur, années durant lesquelles il n’abandonna pas l’action militante. C’est ainsi qu’il participa au développement du Syndicat national des cadres et ingénieurs de la métallurgie (SNCIM), dont il intégra le conseil national et le secrétariat en 1953, tandis que sur le plan politique, il participa activement aux luttes pour la paix en Indochine et pour l’indépendance nationale. Il connut à ce titre la répression et l’emprisonnement.

Jean Grosvalet fut embauché à la Compagnie de télégraphie sans fil (CSF) en août 1953 comme ingénieur de recherche, au sein du département de recherches physico-chimiques, dans le service de recherche sur les semi-conducteurs nouvellement créé. Son premier travail fut l’étude du germanium, étude qui aboutit au dépôt en 1955 d’un brevet sur « l’Alcatron ». À partir de 1960, il aborda les problèmes de la technologie du silicium. Ses recherches le conduisirent à déposer de nombreux brevets de portée internationale, parmi lesquels : la structure planar silicium en 1960, le statistor et l’effet piézo MOS en 1963, la passivation des transistors et circuits intégrés en 1964, l’avalanche en surface en 1966. La qualité de ses recherches le fit progresser professionnellement : il devint chef de laboratoire en 1958, puis en janvier 1969 directeur des laboratoires de la COSEM, devenue ensuite SESCOSEM et enfin directeur de recherches au Laboratoire central de recherches de la Thomson-CSF le 1er juillet 1971. Il dirigeait alors une équipe d’une centaine de personnes, dont de nombreux chercheurs.

Auteur de nombreuses publications, il assura de nombreuses conférences et rapports scientifiques aux États-Unis, en Espagne, en Roumanie ou encore en Union soviétique. Membre de la Société française de Physique et de la SFER, il assuma également des charges d’enseignement dans les universités de Paris, Dijon et Nancy.

Jean Grosvalet fut élu secrétaire général du SNCIM en 1967 et intégra la commission exécutive de la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie au 26e congrès fédéral en novembre 1968, mandat renouvelé au congrès suivant en février 1971. Il dirigea, de 1968 à 1971, la délégation des cadres CGT aux négociations paritaires avec l’organisation patronale de la métallurgie, l’Union des industries des métiers métallurgiques (UIMM). Il participa enfin au bureau, puis au secrétariat de l’Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens (UGICT-CGT) jusqu’au congrès de mai 1971, ainsi qu’à la commission des ingénieurs, cadres et techniciens auprès du comité central du Parti communiste français (PCF).

Il écrivit, sous le pseudonyme de Petitjean, dans Options, le magazine de l’UGICT-CGT, pour lequel il rédigea de nombreuses analyses critiques d’ouvrages théoriques sur le plan économique et social, ainsi que dans la revue ITC.

Jean Grosvalet éprouvait une attraction toute particulière pour la Yougoslavie. En 1947, il avait participé à une brigade française de jeunes portant le nom de « La Marseillaise » qui apporta une aide bénévole à des travaux publics dans ce pays. En 1958, la CSF l’avait mis à la disposition de l’UNESCO où en qualité d’expert, il séjourna plus de quatre mois en Yougoslavie pour y lancer un laboratoire, puis une usine de semi-conducteurs. À partir de cette date, il consacra du temps et de l’énergie au développement et aux réalisations de cette usine et du peuple yougoslave.

Avec sa famille, il passait depuis le milieu des années cinquante une partie de ses congés en Yougoslavie. Il y décéda le 23 juillet 1971, à 49 ans, au premier jour de ses vacances.

Ses obsèques se déroulèrent le 30 juillet 1971, en présence d’une foule nombreuse et de Livio Mascarello, secrétaire confédéral de la CGT, Jean Breteau, secrétaire général de la Fédération CGT des travailleurs de la métallurgie et René Le Guen, secrétaire général de l’UGICT. Ce dernier le décrivit ainsi, lors de l’hommage rendu : « Cette image de l’homme nouveau dont a besoin l’humanité pour s’engager délibérément dans la voie du progrès social et de la Paix. Il a milité intensément pour que chaque travailleur puisse, un jour, être un homme nouveau. Sa vie reste, pour les ingénieurs, une leçon à méditer. »

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article148816, notice GROSVALET Jean, Raymond par Emeric Tellier, version mise en ligne le 12 septembre 2013, dernière modification le 12 avril 2022.

Par Emeric Tellier

Jean Grosvalet en 1968, presse syndicale

ŒUVRE : Etude physique des dispositifs à semi-conducteurs, Malakoff, École supérieure d’électricité, 1963, 126 pages.

SOURCES : Arch. FTM-CGT. –– ITC (août-septembre 1971). –– La Vie ouvrière, édition métaux (8 septembre 1971). –– L’Ingénieur métallurgiste, septembre 1971. –– Notes d’André Barbillat. –– base de données de l’INPI.

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