GIRAULT Louis, Victor

Par Dominique Tantin

Né le 1er juillet 1879 à Saint-Sauveur-de-Givre-en-Mai (Deux-Sèvres), fusillé le 12 décembre 1942 à Chizon, commune de Sainte-Pezenne aujourd’hui rattachée à Niort (Deux-Sèvres) ; propriétaire cultivateur ; condamné pour détention d’armes ; homologué résistant FTPF.

Louis Girault
Louis Girault
Crédit : archives familiales

Louis Girault était le fils d’Alexandre, cultivateur, alors âgé de 26 ans, et de son épousa Victorine Rosalie Arnault, sans profession, âgée de 25 ans, alors domiciliés à Breuil-Chaussée, commune des Deux-Sèvres aujourd’hui rattachée à Bressuire.
Il effectua son service militaire de 1900 à 1903 dans le 18e bataillon de chasseurs à pied. Mobilisé en 1914 – vraisemblablement dans le 114e RI de Parthenay -, il fut blessé le 3 octobre 1915 et hospitalisé à Grenoble. Il fut renvoyé au front en mars 1916 et servit dans le 1er groupe d’aérostation. Il fut démobilisé en janvier 1919.
Le 29 septembre 1909, à Breuil-Chaussée, Louis Girault, alors cultivateur au Réorthais de Breuil-Chaussée dans la ferme familiale, avait épousé Augustine Marie Gâtard, alors âgée de 31 ans. De cette union naquirent trois enfants : Henri, Joseph (captif en Allemagne en 1942) et Marie-Louise.
Le 17 octobre 1942, à la suite d’une dénonciation (note du cabinet du préfet), la Feldgendarmerie perquisitionna sa propriété et découvrit, dissimulée dans un arbre creux, une mitrailleuse française récupérée au cours de l’exode en juin 1940. Il fut aussitôt emprisonné à Niort ainsi que son fils Henri et son gendre Eugène Deborde.
Le préfet des Deux-Sèvres, Charles Roger-Machard, intervint auprès des autorités allemandes pour obtenir leur indulgence en s’efforçant de les convaincre de l’absence d’intention politique de Louis Girault et des conséquences néfastes d’une éventuelle exécution. Ainsi, le 24 octobre 1942, il relaya l’intervention du maire de Bressuire dans un courrier adressé au chef de la Feldkommandantur 564 de Niort : « À la demande de M. le Maire de Bressuire, j’ai l’honneur de vous adresser ci-joint 4 attestations affirmant la parfaite honorabilité de MM. Giraud (sic) père et fils et Deborde, gendre, arrêtés ces derniers jours par les autorités allemandes pour détention d’armes de guerre. » Le 4 novembre, dans une lettre au chef de la Feldkommandantur de Niort, il se déclarait convaincu qu’« incapables de se livrer à une action subversive quelconque, MM. Giraud (sic) et Deborde n’avaient nullement l’intention de se servir de l’arme en question et s’ils n’en ont pas déclaré l’existence, c’est par un sentiment de crainte et par peur de sanctions graves. Au surplus ils considéreraient qu’elle était devenue, depuis plus de deux ans, inutilisable et ne pouvait représenter un danger quelconque. Dans le milieu paysan où ils vivent et où ils sont considérés comme de très honnêtes gens, une peine grave aurait les plus fâcheuses répercussions et compromettrait gravement l’esprit de collaboration de plus en plus nécessaire. » Nonobstant, le 8 décembre, Louis Girault fut condamné à mort par le tribunal militaire de Niort pour « détention illégale d’armes de guerre ». Le 10, dans une ultime tentative pour sauver Girault, le préfet demanda à De Brinon, représentant du gouvernement français dans les territoires occupés, d’effectuer une démarche auprès du commandement militaire allemand à Paris, lequel devait se prononcer sur le verdict de Niort. Il précisa que « pour montrer la bonne foi de Giraud (sic) père, il y a lieu de noter qu’il a livré spontanément ses fusils de chasse à la mairie ».
En vain. Le Militärbefehlshaber in Frankreich (MBF) confirma aussitôt la sentence, à l’instar de la décision prise trois mois plus tôt concernant Raymond Gendrot, en cohérence avec le durcissement de la politique de répression à partir de l’été de 1941, ainsi que l’expliquent Jean-Pierre Besse et Thomas Pouty (p. 145). « La psychose allemande du ``terrorisme’’ entraîne des changements qui tiennent au fait que désormais les délits de ``détention illégale d’armes’’ n’ont plus la même portée pour l’occupant. De même, alors que durant les premiers mois de l’Occupation la plupart des condamnations à mort pour ce motif étaient ensuite commuées en peine de prison ou de travaux forcés, à partir de l’automne 1941 l’intransigeance est de mise. Le danger potentiel que représente toute personne en possession d’armes (de guerre ou même de chasse) est alors tel que la plus grande sévérité est réclamée et ce, que la personne ait pu compter s’en servir ou non, voire même, que l’arme soit état de fonctionner ou non ! Ainsi du mois de juin 1941 au mois de juin 1942 près d’un tiers des personnes fusillées en France occupée (en comptant les deux départements du Nord de la France) l’a été pour ``détention illégale d’’armes’’. »
Louis Girault fut donc exécuté à Chizon, lieu-dit de Sainte-Pezenne (depuis rattachée à Niort) le 12 décembre 1942 à 15 heures, puis inhumé au cimetière des Sablières de Niort.
Il fut reconnu « Mort pour la France » en 1945. Après guerre, sa famille fit reconnaitre son appartenance au groupe des Francs-tireurs et partisans français (FTPF) de Bressuire du 1er au 17 octobre 1942, affiliation officialisée dans son dossier militaire dès 1950. Le dossier de la DAVCC contient deux attestations qui tendent à accréditer cette appartenance. L’une émane de Robert Proust (alias capitaine Lenoir, ex-chef du groupe de commandement de l’état-major départemental des FFI, liquidateur départemental FFCI, chevalier de la Légion d’honneur, Croix de guerre 1939-1945, Médaille de la Résistance, fils d’Edmond Proust, alias « Chaumette », colonel commandant les FFI des Deux-Sèvres à la Libération), en date du 30 août 1962, dans laquelle l’auteur précise que Louis Girault « a été arrêté à son domicile de Rorthais par Breuil-Chaussée [commune aujourd’hui rattachée à Bressuire, Deux-Sèvres] par la Feldgendarmerie de Parthenay, en raison de son activité dans la résistance (FTPF des Deux-Sèvres, groupe de Bressuire) ; en vue d’une action armée future, les premiers résistants affiliés à ce groupe avaient été chargés de récupérer du matériel et de l’armement. C’est ce que fit monsieur Louis Girault en camouflant des armes ainsi que des munitions de guerre et, en particulier, une mitrailleuse d’infanterie que la Feldgendarmerie découvrit le 17 octobre 1942, dans un chêne creux planté en bordure d’une propriété de ce résistant. »
La seconde attestation, manuscrite, a été rédigée à Bressuire à une date indéterminée (il est indiqué 6 juillet 1942) par Eugène Robin, Médaille de la Résistance, qui se présente comme « le fondateur du maquis de la région bressuiraise » ; il certifie que « Louis Giraud (sic) [...] faisait parti (sic) du groupe de la Résistance que j’avais fondé aussitôt l’occupation allemande, qu’il a caché des soldats français pendant la débâcle, fait la récupération des armes abandonnées par l’armée française. Dénoncé aux troupes d’occupation, il fut trouvé possesseur d’une mitrailleuse arrêté le 17 octobre 1942 il a été fusillé à Niort le 14 (sic) décembre de la même année sans jamais avoir voulu dénoncer des camarades ; » (orthographe et ponctuation respectées). Louis Girault fut reconnu « Interné Politique » (1962) puis « Interné Résistant » (1964).



Lieu d’exécution et de massacre : Niort, Chizon de Sainte-Pezenne (Deux-Sèvres).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article149375, notice GIRAULT Louis, Victor par Dominique Tantin, version mise en ligne le 10 octobre 2013, dernière modification le 29 mai 2022.

Par Dominique Tantin

Louis Girault
Louis Girault
Crédit : archives familiales
Louis Girault
Louis Girault
Crédit : archives familiales

SOURCES : DAVCC, Caen. – Arch. Dép. Deux-Sèvres, 158W221. – Jean-Pierre Besse et Thomas Pouty, Les fusillés, Répression et exécutions pendant l’Occupation (1940-1944), Paris, Éd. de l’Atelier, 2006. — À consulter ultérieurement : Service historique de la Défense, Vincennes GR 16 P 258358. — Mémoire des Hommes. — Actes de naissance et de mariage, registre matricule militaire en ligne (Arch. Dép. Deux-Sèvres).

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable