PAILLER-CASTEL Annick [née PAILLER Annick]

Par René Gallissot

Née le 4 mai 1934 à Carantec (Finistère), morte le 4 septembre 2011 à Morlaix (Finistère) ; militante en Algérie.

Fille de Jean Pailler, quartier maître radio, et de Alice Broudic, Annick Pailler, qui s’était mariée le 4 avril 1953 à Poissy (Seine-et-Oise) avec André Jean Castel, avait suivi son mari, bachelier qui venait d’être recruté pour être instituteur en Algérie à la rentrée d’octobre 1953. Arrivé à Constantine, sans passé militant, ce couple de vingt ans avec un bébé aboutit finalement en février 1954 au village de Babar à quarante kilomètres de Kenchela à 1 200 mètres d’altitude dans le massif de l’Aurès. Ils inaugurent l’école à classe unique (soixante-huit élèves dont douze filles) ; Annick Pailler met en place une caisse de solidarité pour aider les familles et déjà assurer l’habillement pour l’école, ce qui étonne de la part de ces Français, alors que la guerre a commencé (et par la mort de l’instituteur Monnerot à l’occasion d’une opération qui ne le visait pas, sur un autobus d’une ligne des Aurès). De plus, ce qui les rend suspects, c’est que les jours de repli forcé quand l’école est fermée, ils trouvent refuge à Kenchela auprès du petit groupe de gauche (syndicalistes) formé autour de l’instituteur Guy Drouillard qui tenait l’Union locale CGT. Surnommé « le communiste », il venait d’être expulsé du département (Est Constantinois). Pour les Services français et pour les militaires, pas de doute, le couple est communiste.

L’École de Babar et leur logement sont occupés par l’armée française qui n’hésite pas à exposer des prisonniers enchaînés au portail de l’école. « La classe terminée, le garage et la buanderie servent de lieux d’interrogatoire, c’est-à-dire de torture ». André Castel adresse un rapport à l’Inspection académique qui renforce encore la suspicion à leur égard. En mars 1955, l’école est définitivement fermée. Le couple est dirigé sur Aïn Yagout à quarante kilomètres de Batna où école et logement ne sont pas achevés. Annick Pailler-Castel rentre en France. Muté d’abord à Batna, André Castel est, à la fin de l’année scolaire, frappé d’expulsion du département de Constantine. Il gagne lui aussi la France.

N’ayant pas d’emploi en France, les Castel rejoignent Alger en septembre 1955. Annick Pailler travaille alors à l’Union départementale UGSA (CGT) où elle fait connaissance de Blanche Moine, responsable syndicale et épouse d’André Moine qui appartient au secrétariat du PCA. Leur fichage comme communistes déborde de signes de confirmation, d’autant que reprenant les études à la Faculté d’Alger, André Castel est en contact avec les étudiants communistes du groupe d’A. Guerroudj qui vont monter au maquis des Combattants de la libération. Il est arrêté le 5 juillet 1957 ; torturé, condamné, il ne sera libéré qu’à l’indépendance.

Le 9 juillet au soir, c’est au tour d’Annick Pailler-Castel d’être emmenée par les parachutistes au centre de Birtraria ; « il y avait une cave et l’on y torturait le jour, la nuit » ; installée à l’étage au-dessus, elle entend les cris et voit revenir des jeunes femmes algériennes violées. Une nuit, elle subit aussi un viol. Après dix-huit jours de garde à vue, elle est transférée au Commissariat central puis enfermée trois mois et une semaine à la prison Barberousse. Jugée, elle est expulsée le 6 novembre 1957. Son avocat Michel Bruguier s’emploie à faire avancer sa plainte pour viol auprès du Tribunal des Forces armées, le parachutiste auteur du viol ayant été identifié. Elle assiste au procès le 18 avril 1958 ; l’avocat du parachutiste, Me Georges Gutermanoff, qui sera avocat de Salan et des accusés de l’OAS, plaide non coupable pour son client, et à l’adresse d’Annick Pailler, multiplie les dénonciations de communisme pour des activités anti-françaises. Le parachutiste est condamné à deux ans de prison avec sursis. André Castel témoignera ensuite combien se poursuivront les viols sur des Algériennes.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article149862, notice PAILLER-CASTEL Annick [née PAILLER Annick] par René Gallissot, version mise en ligne le 25 novembre 2013, dernière modification le 25 mai 2021.

Par René Gallissot

SOURCES : Témoignage dans A. Dore-Audibert. Des Françaises d’Algérie dans la guerre de libération. Karthala, Paris 1995. — État civil.

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