Par René Gallissot
Né en 1911 à Tahert (Algérie), assassiné le 20 août 1955 ; neveu de Ferhat Abbas ayant appartenu aux Amis de la Démocratie, mouvement soutenu par le PCA, sinon membre de ce parti ; rejoignant l’UDMA, parti de son oncle ; conseiller municipal de Constantine.
Appartenant à une famille de propriétaires ruraux qui donne des caïds et des administrateurs communaux, à Tahert en Petite Kabylie, Alloua Abbas est le neveu de Ferhat Abbas, fondateur de l’UDMA (Union démocratique du manifeste algérien), qui avait cinq frères. Comme cet oncle, après le lycée, A. Abbas va à la Faculté d’Alger suivre des études de pharmacie et s’installe à Constantine dans le centre, rue Clemenceau.
Alors qu’en 1943, Ferhat Abbas défend le Manifeste des libertés qui sert ensuite de référence à la campagne du mouvement des Amis du manifeste de la liberté (AML) animé par le PPA (Parti du peuple algérien), Alloua Abbas entre dans le mouvement opposé des Amis de la Démocratie que lance le parti communiste. Le 1er Mai 1945, il prend ainsi la parole à Constantine au nom des Amis de la Démocratie aux côtés d’Amar Ouzegane*, secrétaire du PCA. Il est alors très proche des communistes et fait campagne avec eux.
Les services de renseignements du gouvernement général le tiennent pour membre du PCA, ajoutant qu’il aurait été exclu après le 8 mai 1945 ; A. Abbas n’aurait pas accepté de participer aux réunions d’information tenues par le PCA dans le Constantinois sous la responsabilité de Larbi Bouhali* et Younès Kouch*. Le PCA voulait donner son interprétation des violences et des massacres de mai 1945 en minimisant l’accusation antérieure de complot nationaliste, pour ne retenir que celle de complot fasciste colonial. On ne connaît pas la position propre d’Alloua Abbas.
En tout cas, il se détache de l’alliance communiste pour rejoindre l’UDMA, le parti de son oncle. La liste de l’UDMA obtient un beau succès aux élections municipales en 1954, devançant la liste du MTLD (Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques) ; Alloua Abbas devient conseiller municipal de Constantine. Lors de l’offensive de l’ALN/FLN qui s’accompagne de massacres le 20 août 1955, –le frère du Dr Bendjelloul, principale figure politique de Constantine est tué–, Alloua Abbas est visé ; blessé par les tirs, il meurt durant son transport à une clinique.
Ferhat Abbas, qui avait une grande affection pour son neveu, se sent personnellement visé par cet avertissement. Dans son journal, La République algérienne, il impute la mort « à une conjuration colonialiste et policière » alors qu’à sa connaissance il s’agit bien d’une opération de l’ALN/FLN, le responsable FLN, L. Bentobbal mettant en avant qu’Alloua Abbas avait signé une motion condamnant la violence d’où qu’elle vienne. Les vieilles rivalités avec le PCA et entre le MTLD et l’UDMA avaient certainement leur part dans cet assassinat. À l’indépendance, Alloua Abbas recevra le titre de chahid (martyr mort pour la patrie).
Par René Gallissot
SOURCES : Arch. France Outre-mer, Aix-en-Provence, FR 4304, notes de O. Siari-Temgour. — B. Stora et Z. Daoud, Ferhat Abbas. Une utopie algérienne, Denoël, Paris, 1995.