GALLAND Jean, Jacques [Dictionnaire Algérie]

Par René Gallissot

Né le 21 janvier 1928 à Charost (Cher, France), mort le 31 janvier 2009 à Esvres (Indre-et-Loire, France) ; communiste ; instituteur en Algérie en 1950-1955, renvoyé dans le Cher en 1955 ; coopérant depuis 1963, conseiller pédagogique en Kabylie et à Alger puis professeur formateur des maîtres ; revenu en France en 1974, principal de collège en Indre-et-Loire ; marié, cinq enfants.

Dans son autobiographie (Elles et Eux d’Algérie), Jean Galland, appelé communément Jean-Jacques, relève son retard dans les études : « J’ai été reçu au bac en 1948 après de trop longues années d’internat à Issoudun », petite ville du département voisin de l’Indre. D’autant que le grand jeune homme arbore des idées communistes en rupture avec le catholicisme traditionnel, il fait le désespoir de ses parents qui rêvent de réussite sociale et de notabilité. Le père était représentant en vins et spiritueux et sa mère commerçante dans le textile. Après avoir effectué son service militaire à Nîmes (Gard), puis en Allemagne dans la DCA en 1949, élève officier de réserve (formation non aboutie pour cause politique), Jean Galland reste maréchal des logis.

« On recrutait des manœuvres à la fonderie de Rosières. Je suis entré à l’usine au début de 1950 ». Pour ses parents, « le bas de l’échelle ». Ayant lu le Talon de fer de Jack London, et plus encore en voyant à ses côtés la dureté du travail dans les hauts-fourneaux et à l’émaillerie et la brutalité de l’exploitation, « les violences extrêmes de la lutte de classes », Jean Galland se met à militer au syndicat CGT et devient définitivement communiste.

Il a une chambre dans le logement de fonction d’un oncle instituteur à Rosières. Celui-ci lui ouvre un autre avenir, d’autant que Jean Galland veut se marier avec son amie Jeannette, Jeanne Desgrolard, fille elle aussi d’un commerçant de Charost. À l’époque, un bachelier accédait facilement au métier en passant par un stage en École normale. « L’idée m’est venue d’envoyer une demande en Algérie où mon père avait à Blida une cousine germaine avec laquelle il venait de renouer…, une Galland mariée à un Capomasi dont les parents avaient fui le fascisme de Mussolini ». Aux six demandes envoyées, la première réponse est celle de l’École normale d’Alger-Bouzaréah. Marié religieusement en 1951 à Lignières (Cher), le couple a ses trois premiers enfants en Algérie.

Jean Galland accomplit son stage pratique avec l’instituteur Charles Siblot*, syndicaliste qui le conforte en communiste et l’instruit sur l’inégalité des rapports coloniaux même entre instituteurs. À son premier poste, il découvre les réalités sur le terrain. Juste avant la rentrée d’octobre 1951, un groupe de huit français (dont trois enfants), descend du car sur la place du marché de Messaad, alors en Territoires militaires du Sud. « Dans l’oasis, on n’arrivait pas à se souvenir depuis quand avaient débarqué à la fois tant de Français, surtout pour y habiter ». « Nous nous sommes aussitôt mis au travail » : organisation des classes ouvertes à tous les enfants, cantine, jardin, cours du soir, et les femmes exercent « leurs talents d’infirmières bénévoles ». Jean Galland se fait correspondant d’Alger Républicain. Syndicalistes au SNI mais critiques des positions coloniales, adhérents du PCA, ces instituteurs montent une soirée de présentation et de débat du Front algérien pour la démocratie et la défense de la liberté (FADL), dernière tentative de front politique réunissant UDMA, MTLD, Oulémas et communistes.

Sanctions aussitôt en cette commune mixte  : le collègue André est, sur place, « interdit de classe », et Jean Galland déplacé d’office à 450 kms de là, à Tabarourt en Kabylie pour le dernier trimestre scolaire de 1951. Aux rentrées suivantes, il est nommé en postes plus près de Tizi-Ouzou, à Akerrou puis Tizi Rached. En pays kabyle, mieux scolarisé en français, il se lie aux militants nationalistes qui tiennent les assemblées de villages, en particulier à Kettane Arezki, militant berbériste passant au PCA. Une semaine après la publication de la loi sur l’état d’urgence, le 13 avril 1955, comme l’instituteur à Khenchela, Guy Drouillard, Jean Galland est interdit de séjour des départements d’Alger puis d’Oran.

Revenu en France, il enseigne comme instituteur à Vailly et Henrichemont (Cher) de 1956 à 1962. Secrétaire de la cellule communiste de Lunery en 1956, il entre au comité de la fédération communiste du Cher après avoir suivi l’école centrale d’un mois du PCF. Membre du bureau de la section communiste de Saint-Florent en 1957, puis d’Henrichemont en 1960 avant d’entrer au secrétariat de cette section, il devient le secrétaire de la fédération des Jeunesses communistes. Candidat communiste en 1961 à l’élection pour le Conseil général dans le canton d’Henrichemont, il obtient 38 % des voix.

Après l’indépendance, avec enthousiasme, Jean Galland retourne enseigner en Algérie ; on met fin à son détachement en 1963 puis il est réintégré à la suite des interventions de députés et d’élus de Kabylie auprès du ministère algérien de l’Éducation nationale. Après avoir été professeur de collège à Azazga, il devient conseiller pédagogique en Kabylie de 1963 à 1966 puis à Alger. Ayant obtenu en 1970 le diplôme du Centre de recherche et d’études pour la diffusion du français (enseignement audio-visuel) à Saint Cloud, il devient formateur des maîtres à l’Institut Mustafa Khalef et professeur de psycho-pédagogie à Alger et collabore aux publications de l’Institut pédagogique national.

Revenu en France en 1974, il est principal de collège d’enseignement secondaire à Cormery (Indre-et-Loire) où il termine sa carrière en 1983. Membre de l’Association des Combattants pour la Cause anticolonialiste, Jean Galland écrivit trois ouvrages sur son expérience algérienne et un livret autobiographique sous le titre « Un parcours inachevé ». En 2009, ses obsèques furent civiles. En France et en Algérie, de nombreux journaux et militants lui rendirent hommage, dont Henri Alleg qui rappelle sa collaboration à Alger Républicain de 1951 à 1955.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article150846, notice GALLAND Jean, Jacques [Dictionnaire Algérie] par René Gallissot, version mise en ligne le 7 décembre 2013, dernière modification le 7 décembre 2013.

Par René Gallissot

ŒUVRE : En Algérie « du temps de la France », Paris, Tirésias, 1998. — La tête ici, le cœur là-bas (1954-1962), Paris, Tirésias, 2002. — L’Indépendance un combat qui continue ! (1962-1974), Paris, Tirésias, 2004. — George Sand, femme politique ?, Monts, Présence Graphique, 2004. — Un parcours inachevé, chez l’auteur, Esvres, 2007.

SOURCES : Archives du comité national du PCF. — Presse syndicale. — Renseignements fournis par la famille de l’intéressé à J. Girault pour la notice du DBMOMS, op. cit., tome 5, 2007. — Michel Reynaud, Elles et eux d’Algérie, Tirésias, Paris, 2004, « Le cœur là-bas », contribution de Jean Galland, pp. 267-286.

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