GUITA Ahmed, écrit aussi GUITTA [Dictionnaire Algérie]

Par René Gallissot

Né le 25 janvier 1910 à Bône (Annaba) ; dessinateur peintre, militant des Jeunesses communistes à Bône puis à Alger, élève des Beaux arts à Paris, membre du comité de rédaction du périodique de la CGTU El Amel ; arrêté à Bône en 1940 comme membre du PCA interdit.

Bien qu’il ait rédigé sa « bio » pour l’Internationale communiste, l’itinéraire d’Ahmed Guitta ou Guita est difficile à suivre dans le désordre des dates. Dans les années 1930, il semble faire de nombreux allers et retours entre Paris où il est élève des Beaux arts et Bône.

Alors que le journal La Dépêche de l’Est, lors de son arrestation en 1940, le donne comme fils d’un imam de mosquée, son autobiographie précise bien que son père était laveur de morts attaché salarié à l’hôpital militaire et civil de Bône ; on peut penser pour les morts « musulmans ». Ce père meurt en 1921, quand le garçon a onze ans. La mère reste chargée de famille ; un frère a, lui aussi, une jeunesse laborieuse, garçon de course chez des avocats et des architectes avant de devenir employé des chemins de fer ; un cousin, agent de police municipale a été renvoyé de la police ; il manifestait des sympathies communistes.

Ces indices et l’autobiographie suggèrent des liens avec des employeurs coloniaux au bénéfice de la langue française. Après l’école primaire française, le jeune Guita suit les cours d’un centre d’apprentissage ; il prend goût au dessin et à la peinture. Certes, pour vivre, il fait un peu tous les métiers, travaillant au marché des fruits et légumes, livreur, garçon d’écurie et aussi employé dans une pharmacie, du ménage à la préparation de pommades. Ayant au bout de trois ans obtenu son certificat de capacité professionnelle en menuiserie ébénisterie, il peut travailler chez un artisan puis dans une grande maison d’ameublement. Au moment de la campagne communiste contre la guerre du Rif et de Syrie (1925), il commence à militer avec les Jeunes communistes. Il lit la presse communiste et la revue des instituteurs indigènes : La Voix des Humbles.

Il quitte Bône pour Alger, vers la fin des années 1920 et suit des cours de dessin aux Beaux arts, au centre d’Alger, tout en travaillant dans des usines (concassage de caroube, métallurgie, ferronnerie). Il s’emploie aussi comme peintre. Il s’intéresse au montage des machines. Son idée est de traverser la Méditerranée et il économise pour le départ. Il a des contacts avec l’usine Tabacoop de Bône et s’intéresse au montage des machines à sécher le tabac, fabriquées à Cologne en Allemagne. C’est peut-être là qu’il se rend d’abord, s’étant fait ou se faisant des « copains allemands » qui sont monteurs, avant de se retrouver à Paris.

Comme à Paris, il suit des cours aux Beaux arts, il se trouve fréquenter des étudiants communistes, y compris cosmopolites, citant un copain alsacien, un autre indochinois, et adhère formellement aux Jeunesses communistes en novembre 1933. Sur deux ans, il aurait reçu une instruction communiste de la part de Yahia Saidoun (ou Saadoun) membre du Comité directeur de l’ENA et à l’époque permanent du PC attaché à la Commission coloniale.

C’est par ce milieu qu’il se trouve fréquenter la Bourse du travail et la Maison des syndicats de la rue de la Grange-aux-Belles. En 1933, s’appuyant sur les travailleurs algériens de la CGTU, le communiste Mohamed Marouf, s’emploie à publier El Amel (L’ouvrier) pour s’opposer à Messali qui lance El Ouma et reprend l’Etoile Nord-africaine. Ahmed Guita est pressenti pour entrer au comité de rédaction d’El Amel ; c’est alors qu’il rédige sa « bio ». La Commission coloniale du PCF donne son accord le 27 février 1934. Ahmed Guita fait alors partie de la cellule du Ve arrondissement. Il fait état de ses lectures des revues communistes et des textes de base de Marx, Lénine et Staline, notamment de l’Anti-Dühring d’Engels. Il continue à lire La Voix des Humbles.

Loin d’avoir coupé ses liens avec l’Algérie, Ahmed Guita reste attaché à Bône où il revient assez régulièrement. Il est en relations avec le responsable communiste Gabriel Palomba, membre du comité central du PCA. Tenu comme membre du PCA qui est interdit à l’ouverture de la guerre dès l’automne 1939, Ahmed Guita est arrêté à Bône en octobre 1940. Il était marié avec Denise Daardt selon le rapport d’arrestation utilisé par la presse.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article151488, notice GUITA Ahmed, écrit aussi GUITTA [Dictionnaire Algérie] par René Gallissot, version mise en ligne le 24 décembre 2013, dernière modification le 8 septembre 2020.

Par René Gallissot

SOURCES : Arch. Commission coloniale du PCF, IRM, Paris, boîtier Algérie. — Arch. de Moscou, RGASPI 495 189 117a, autobiographie datée 13 février 1933 et prolongée sur 1934. — La Dépêche de l’Est (Constantine), 12 octobre 1940, note de L-P. Montoy.

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