BELKHODJA Abdelkader dit Kaddour [Dictionnaire Algérie]

Par Jean-Louis Planche et Gilles Pichavant

Né le 10 Août 1925 à Batna (Algérie), mort le 2 août 2017 à Paris (XIXe arr.) ; secrétaire de mairie à Batna (Algérie) (1945), auxiliaire des PTT à Paris (1947-1951), employé communal à Gennevilliers (Seine) (1952-1965) ; militant à la fédération CGT des PTT (1947-1951), permanent de la CGT ; communiste, organisateur des Jeunesses démocratiques à Batna (Algérie) (1943) ; en 1943, membre du Comité central de l’Union des jeunesses démocratiques ; à Paris en 1947 ; de 1952 à 1965, employé de la mairie de Gennevilliers chargé de l’immigration algérienne assurant la liaison avec le FLN.

Le père d’Abdelkader Belkhodja descendait d’une famille dite turque par appartenance ancienne à la caste militaire ottomane, de la région de Sétif ; il était adel, assesseur de justice musulmane, proche de l’Association des Oulémas. La mère était de famille kabyle du cap Aokas, près de Bougie. Élève à l’école indigène, puis à l’École Primaire Supérieure, Abdelkader Belkhodja fit en 1940 du scoutisme aux Éclaireurs de France, son père craignant pour lui de l’inscrire aux Scouts musulmans. À l’école indigène, il eut pour institutrice Paulette Grégoire*, communiste et petite-fille d’un vieux militant, le père Grégoire*, marchand de vin toujours au bord de la faillite.

En 1941-1942, avec quelques camarades des Éclaireurs de France, il servit d’agent de liaison pour un petit groupe plus ou moins gaulliste, fait des graffitis sur les murs, dessina des croix de lorraine sur les billets de banque, participa à l’enlèvement des portraits du Maréchal Pétain dans les salles de l’EPS, distribua des numéros de La Lutte Sociale clandestine. En 1943 il adhéra aux Jeunesses démocratiques qui prirent le relais des Jeunesses communistes, et devient responsable en 1944, de la section de Batna qui rassembla plusieurs centaines de jeunes ; il adhéra au PCA.

Secrétaire de mairie à Batna en 1944, Abdelkader Belkhodja entra aux Contributions, tout en conservant son emploi à la mairie. En 1946 il devint clerc chez l’avocat Laïd Lamrani, neveu de Me Sisbane, qui avait adhéré au PCA l’année précédente. Il anima les permanences de la C.G.T., dirigea le cercle de Batna de l’Union de la Jeunesse Démocratique d’Algérie ; il fut membre du Comité central de ce mouvement de jeunesse.

En mai 1947, accaparé par son activisme et ne trouvant pas d’emploi à Batna à cause de son engagement communiste, partit pour Paris, adhéra au PCF, entra comme auxiliaire des installations aux P.T.T. Il habitait Gennevilliers (Seine, Hauts-de-Seine).

Employé comme auxiliaire de bureau au central télégraphique de Paris, rue de Grenelle, il fut suspendu de fonction le 26 novembre 1947 pour son implication dans la grève qui dura du 25 novembre au 10 décembre. Réintégré, il fut arrêté par la police, le 25 novembre 1949, alors qu’il était le secrétaire adjoint de la section CGT du central télégraphique. Après avoir été conduit au poste, et satisfait aux formalités de vérification d’identité, il fut brutalisé et se débattit. Il fut accusé de rébellion, et condamné à 15 jours de prison et 6000 fr d’amende pour outrages et coups à agents. Les salariés algérien du central téléphonique constituèrent un comité de défense qui demanda son acquittement en appel et sa réintégration. La CGT dénonça par tract le fait que le policier avait « donné libre court à ses sentiments colonialistes et racistes ». Le 23 décembre 1949, elle organisa salle Albert Thomas, rue Turbigo, un meeting où il prit la parole, ainsi que Marcel Planès, en tant qu’ancien secrétaire du syndicat des PTT d’Algérie. Abdelkader Belkhodja fut interné à Fresnes, licencié. Réintégré une nouvelle fois, il fut de nouveau licencié des PTT le 5 décembre 1950, dans le cadre d’une grève, pour « entrée clandestine dans les locaux administratifs pour y haranguer le personnel, bien que suspendu provisoirement de fonction », ainsi que pour « perturbation dans le service, refus brutal de circuler, propos irrévérencieux à l’adresse du chef de poste central ». Il devint ensuite permanent à la Fédération postale de la CGT, puis à la Fédération des Syndicats de la Seine.

En 1949, et pendant plusieurs années, appuyé par Ali Debabèche qui fut permanent à la Fédération de la Seine du PCF, il posa à la direction du parti qui soutenait la publication du périodique L’Algérien en France, le problème de créer un groupe de langue arabe algérien, mais se heurta à un refus réitéré. Découragé, Ali Debabèche quitta ses fonctions au PCF, ouvrit un bar, végéta.

De 1952 à 1965, Kaddour Belkhodja est employé à la mairie de Gennevilliers, ayant en charge les problèmes de l’émigration, payé sur un poste de garde-champêtre. Il organise des soirées orientales pour les émigrés, des groupes de lecture dans les cafés. Ainsi L’Algérien en Franceest lu à haute voix et sert à alimenter les discussions. Kaddour Belkhodja suit les cours de l’école centrale de la CGT puis de celle du PCF en 1954 (session de 15 jours, spécifique pour les Algériens).

Dès le début 1955, il fut en contact avec le FLN à Paris. Il essaye en vain d’obtenir que le PCF s’engage davantage. Il juge sans intérêt les discussions auxquelles se borne la Fédération de France que le PCA devenu clandestin tente d’organiser autour de la diffusion de son journal Liberté. En 1956, il devient membre du FLN, après avoir refusé de renier le PCF, rappelant que ni les anciens du PPA ni les anciens de l’UDMA n’ont été soumis à cette exigence pour adhérer au FLN.

Rentré en Algérie en 1965, il fut sous-directeur, chargé de l’émigration au ministère du Travail de 1965 à 1972, puis au ministère des Anciens Moudjahidines jusqu’en 1975, date à laquelle il revint à Paris. Il soutint à l’Université de Paris 1, une thèse de 3e cycle en sociologie : « L’émigration algérienne et ses problèmes » et trouva un emploi à la Direction régionale du travail où il fut chargé des relations avec l’Assedic et où sa femme, Jeannette Belkhodja*, militante communiste, dirigea une école de formation des assistantes sociales.

Il fut également acteur dans plusieurs films, comme Alibaba et les 40 voleurs de Jacques Becker (1954) avec Fernandel, Interdit aux moins de 13 ans de Jean-Louis Bertuccelli (1982), A tout de suite de Benoit Jacquot (2003), Pardonnez-moi de Maiwen Le Besco (2006), Charly d’Isild Le Besco (2007), Polisse de Maiwen Le Besco (2011), avec Joey Starr. Il était le père de l’actrice Catherine Belkhodja et le grand-père des actrices Maiwen et Isild Le Besco.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article151494, notice BELKHODJA Abdelkader dit Kaddour [Dictionnaire Algérie] par Jean-Louis Planche et Gilles Pichavant, version mise en ligne le 25 décembre 2013, dernière modification le 31 octobre 2020.

Par Jean-Louis Planche et Gilles Pichavant

ŒUVRE : avec Jeanne Belkhodja, Les Africains du Nord à Gennevilliers, Paris, Études sociales nord-africaines, 1963 ; (La Madeleine-lez-Lille : Impr. SILIC), 1963 — « Algérie premières expériences de réinsertion » in Hommes et migrations, n°899, 1976, pp. 19 à 27. — L’émigration algérienne et ses problèmes, thèse de 3e cycle, Paris 1, 1975.

SOURCES : Entretiens de Kaddour Belkhodja avec J-L. Planche, Paris, 1987 et 2006. — Arch. de la fédération CGT des PTT, à Montreuil. — Fichier des personnes décédées établi par l’Insee pour l’année 2017. — La Nouvelle Critique, 1er mars 1950 — Site Notre cinéma.

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