BERLIOZ Joanny [Dictionnaire Algérie]

Par René Gallissot

Collaborateur de l’Internationale communiste, membre du comité central du PCF ; en Algérie de 1943 à 1945 responsable du mouvement La France combattante  ; rédacteur en chef de la revue Démocratie nouvelle à Paris avant et pendant la guerre de libération algérienne.

Le nom exact de ce dirigeant et intellectuel communiste français, est JohannyBerlioz-Benier. Fils de petits paysans de l’Isère (France), né le 7 juillet 1892, il entre à l’École normale d’instituteurs de Lyon en 1908. À sa sortie, il passe deux années d’études en Allemagne et sera professeur d’allemand dans les Ecoles Normales d’instituteurs. Blessé lors de la guerre de 1914-1918, il devient et restera très sensible au pacifisme du mouvement intellectuel qui se retourne contre la guerre.

Il adhère au parti communiste et manifeste son militantisme dans les différents lieux d’enseignement, dans les Vosges, la Loire et à Dijon. Installé après son mariage en région parisienne, à Epinay sur Seine, il quitte l’enseignement pour être le traducteur et le correspondanten allemand du parti français et de l’IC ; l’allemand est la principale langue de travail et d’échange de l’Internationale communiste ; il pratique également l’anglais. Il fait fréquemment des déplacements à Moscou et à Berlin et participe aux congrès du mouvement communiste et de l’Internationale syndicale rouge. En même temps, il collabore à la presse communiste tant à l’Humanité qu’à la Correspondance internationale, l’organe de l’IC, et aux publications théoriques Le bulletin communiste puis Les Cahiers du bolchevisme  ; il est chargé aussi de responsabilités administratives à l’Humanité et dans plusieurs revues.

Membre du Comité central du parti communiste en France depuis 1926, il devient maire d’Epinay sur Seine en 1935 et député en 1937. Après le Pacte germano-soviétique en 1939 qu’il défend par pacifisme, et l’interdiction du Parti communiste, il est arrêté le 6 octobre 1939, condamné en avril 1940 à cinq ans de prison ; il est comme les condamnés politiques sous le régime de Vichy détenu à la prison du Puy dans le centre de la France.

En avril 1941, les députés communistes sont transférés en Algérie à la prison de Maison Carrée (El Harrach). Après le débarquement allié du 8 novembre 1942, l’anti-communisme du général Giraud qui commande à Alger, retarde la libération des internés communistes comme celle des détenus nationalistes. J. Berliozsort de prison en février 1943.

Au titre de la Résistance métropolitaine, il est délégué à l’Assemblée consultative provisoire qui à Alger entoure le gouvernement provisoire dont le général De Gaulle va prendre la tête. Il devient alors secrétaire général du groupe de La France combattante. D’abord gaulliste, ce mouvement se transforme en rassemblement de mobilisation patriotique françaisepour continuer la guerre jusqu’à la libération de la France et à la victoire sur l’Allemagne de Hitler. Il réunit sur une base exclusivement française, les partenaires du rassemblement de Front populaire, partis de gauche dont la SFIO et syndicats dont la CGT.

Tant par la puissance de la CGT que par leur activisme politique, les communistes français en Algérie en deviennent l’élément moteur et dirigeant. Par exaltation de la nation française, ces cadres communistes français ne parlent de libération nationale que pour libérer la France, sans se rendre compte de la signification de l’idée de libération nationale pour les Algériens. Cet engagement exclusif fait dénoncer, pour les ouvertures faites aux représentants des États-Unis, le programme national du Manifeste présenté par Ferhat Abbas. Violemment, l’accusant de faire œuvre de division voire de servir le fascisme, les communistes condamnent le Manifeste et à la suite le mouvement qu’au nom du Manifeste, développe cet autremilitantisme de masse des Amis du Manifeste qui se réclame de l’ancien PPA et de Messali* et parle de libération de l’Algérie.

Tout en étant en titre un des principaux responsables, Joanny Berlioz se tient en retrait de ces emballements des communistes français en Algérie qui imposent leurs vues au PCA. Plus intellectuel et internationaliste, il évite les outrances dans la dénonciationdont témoigne notamment Amar Ouzegane*. J. Berlioz est encore en Algérie quand le mouvement communiste, pour amortir l’effet de ses déclarations en mai 1945, oriente son action vers la défense des victimes de la répression et l’amnistie des « musulmans » condamnés.

Revenu en France, J. Berlioz reprend la mairie d’Epinay sur Seine de 1945 à 1947. Il est sénateur de la Seine de 1946 à 1958. Membre des sections de politique étrangère et idéologique du Comité central du PCF, il ne fut jamais membre du Bureau politique car il était à l’écart de l’entourage de Maurice Thorez et de ses soutiens à Moscou. Il assure sous la direction de Jacques Duclos, les fonctions de rédacteur en chef de la revue Démocratie nouvelle de 1945 à 1962.

Cette revue qui accueille la collaboration des journalistes du quotidien progressiste Libération de l’époque qui ne sont pas tous membres du parti communiste comme Albert Paul Lentin* qui écrit sur l’Algérie, et du périodique Les Cahiers internationaux qui fait écho aux luttes de libération nationale, se distingue par une certaine distance avec les choix du PCF comme le vote en 1956 des pouvoirs spéciaux en Algérie pendant la guerre d’indépendance algérienne. On peut penser non seulement à l’habileté propre à J. Berlioz, mais aussi au sens international de son engagement communiste. Il meurt le 18 mars 1965 à l’hôpital Broussais à Paris.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article151625, notice BERLIOZ Joanny [Dictionnaire Algérie] par René Gallissot, version mise en ligne le 28 décembre 2013, dernière modification le 18 novembre 2020.

Par René Gallissot

SOURCES  : Notice par J. Maitron et C. Pennetier dans DBMOF, op.cit., t.18.-Témoignage de Paul Noirot, La mémoire ouverte, Stock, Paris, 1976.

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