Par Alexis Sempé
Né le 30 janvier 1916 à Carcassonne, mort le 24 août 1968 ; instituteur dans le Constantinois ; militant du Parti communiste algérien de 1945 à 1958, membre du Comité régional du PCA. Un des responsables de l’Union locale CGT à Constantine. Correspondant d’Alger républicain. À son retour en France, en 1958, adhère au Parti communiste français et milite à Carcassonne.
Né dans une famille d’artisans et de commerçants Carcassonnais, plutôt aisée pour le département de l’Aude. Son père Alphonse Pelouze est tonnelier. André, Jean, Pelouze est élevé dans un milieu catholique. Réussissant bien à l’école, il entre à l’École normale de Carcassonne en 1933. Ainsi, il devient le camarade de promotion de Gaston Revel avec qui il entretient une amitié profonde. En 1936, les deux compagnons décident de partir en Algérie. Ils vont à l’École Normale de la Bouzaréah sur les hauteurs d’Alger et intègrent la formation spéciale pour enseigner dans les « écoles indigènes ». Travailleur, curieux, grand lecteur et doté d’une bonne mémoire, André Pelouze en sort major. C’est aussi dans cette période qu’il soutient le Front populaire et devient communiste, peut-être adhérent aux jeunesses communistes. Entre 1937 et 1940, il effectue son service militaire.
En octobre 1940, il est affecté à El-Atba dans l’arrière-pays de Collo. Il se retrouve à 25 kilomètres d’Aïn-Tabia, le point de chute de Gaston Revel qu’il retrouve régulièrement pour des randonnées. Les deux amis découvrent une campagne misérable. Les populations sont sous-alimentées et les infrastructures inexistantes. André Pelouze tente de soulager un peu cette misère. Très intéressé par la médecine (il souhaite d’ailleurs devenir médecin grâce à une bourse qu’il a obtenu), il apporte des soins de base. Les autochtones sont aussi étonnés de l’entendre parler arabe, langue qu’il a commencé à apprendre à la Bouzaréah. Cependant, l’essentiel de son temps est consacré à l’enseignement. Il est passionné par ce métier d’instituteur. Il souhaitera garder toute sa carrière le niveau du cours préparatoire, jugeant cette étape cruciale pour les enfants. Il est également très influencé par la pédagogie de Célestin Freinet qu’il est allé voir à Fréjus.
En février 1942, il se marie avec Lily Revel, également institutrice. Après le débarquement allié au Maroc et en Algérie de novembre 1942, André Pelouze et Gaston Revel rejoignent l’armée française d’Afrique du Nord en recomposition. Ils sont incorporés, à Sétif, le 15 décembre 1942. En mars 1943, alors que G. Revel est envoyé en renfort en Tunisie, André Pelouze commence le peloton préparatoire de Cherchell mais il n’est finalement pas admis. En aout 1944, il est de la première vague du débarquement de Provence. Il arrive au Lavandou. Il remonte le Rhône avec la 1ère Armée de De Lattre de Tassigny et participe à la difficile libération de l’Alsace. Enfin, en 1945, il est en Allemagne.
Il revient en Algérie pour la rentrée d’octobre 1945, peut être à Bougie avec Gaston Revel ? Il divorce après avoir eu deux enfants, et, assez vite, obtient un poste à Constantine à l’école Arago dirigé par M. Lounis. Il s’engage activement au PCA et à la CGT. Au syndicat, il fait la rencontre d’Odette Saksik, une militante d’origine juive. Ils se marient en 1949. Tous les deux militent très activement. Ils organisent régulièrement des réunions de cellule du PCA chez eux. André Pelouze devient membre du Comité régionale du PCA. À l’Union locale des syndicats CGT comme au PCA, André Pelouze s’occupe des relations avec la presse. Doté d’une belle plume, il rédige des articles dans Alger républicain et l’hebdomadaire communiste Liberté. Dans les années 50, il devient correspondant local d’Alger républicain. Il milite notamment avec Étienne Néplaz, secrétaire de l’Union locale de Constantine. William Sportisse le considère comme un militant d’une grande valeur intellectuelle. Pour lui, il a compris, très tôt, la question nationale algérienne sur laquelle il avait fait des recherches.
Avec la guerre de Libération, la situation devient difficile pour le couple. André Pelouze et son fils Guy se retrouvent pris dans une fusillade, sur le pont suspendu de Constantine, entre combattants de l’ALN et des parachutistes. Ils en sortent indemnes. Le logement familial subit plusieurs perquisitions. Ils sont clairement menacés. Ainsi, ils quittent l’Algérie avec leurs deux enfants, en juin 1959.
André Pelouze enseigne à Conques-sur-Orbiel puis à Carcassonne à l’école Jean-Jaurès où il retrouve Gaston Revel. Il éprouve le désir de retrouver l’Algérie au moment de l’indépendance en 1962 mais contrairement à son ami, il reste finalement dans l’Aude. Le couple continue à militer activement au PCF. En 1968, André, gravement malade, continue à réfléchir à l’évolution du socialisme. Il est particulièrement intéressé par les mouvements de réformes en Tchécoslovaquie initiés par Alexander Dubcek qu’il soutient. Il est profondément bouleversé par l’invasion du pays par les troupes du Pacte de Varsovie du 21 août 1968. Quelques jours avant son décès, il confie à son fils sa défiance vis-à-vis du système soviétique allant même jusqu’à lui demander de se débarrasser des œuvres de Staline et de Lénine, de déchirer des affiches du PCF. Il meurt le 24 août 1968.
Par Alexis Sempé
SOURCES : entretien avec Odette, Elisabeth, Nicole et Guy Pelouze le 26 décembre 2013. – Carnets Gaston Revel (1938-1944). – Alexis Sempé, Un instituteur communiste en Algérie, La Louve éditions, Cahors, 2013.- William Sportisse et Pierre-Jean Le Foll-Luciani, Le camp des oliviers, PUR, Rennes, 2012. – Entretien téléphonique avec William Sportisse le 28 décembre 2013.