ZAHOUANE Hocine [Dictionnaire Algérie]

Par Amar Benamrouche et René Gallissot

Né le 13 août 1935 à Mirabeau (Dra Ben-Khedda)  ; lycéen passant du MTLD au FLN en 1954  ; officier de l’ALN envoyé de Tunis en 1960 pour arbitrer les conflits et enquêter sur les purges pratiquées dans les maquis des wilayas 3 et 4  ; à Alger après les Accords d’Evian de mars 1962, participe à la réorganisation politique, en particulier à la reprise de l’UGTA  ; après l’indépendance, figure de la gauche du FLN, membre du Comité central et en 1954, du Bureau politique  ; clandestin après le coup d’État de Boumédienne du 19 juin 1965, fondateur de l’Organisation de la Résistance populaire (ORP), arrêté et détenu jusqu’en 1971  ; rentré d’exil à Alger en 1979, vice-président puis président de la Ligue algérienne des droits de l’homme.

Hocine Zahouane est encore lycéen quand il adhère en 1954 au MTLD. Emprisonné de 1955 à 1957, à sa sortie de prison, il gagne le maquis de Kabylie. En mars 1960, officier (aspirant) de la wilaya 3, il rejoint le GPRA à Tunis pour l’informer de la situation difficile en Kabylie. Après les ravages de la bleuite, cette opération de diversion coloniale, l’isolement des maquis et la suspicion généralisée des « intellectuels » progressistes font entrer les maquis de Kabylie dans « le cycle infernal » de la torture, des aveux, des condamnations expéditives, des exécutions et des purges. Ce climat gagne de la wilaya 3 à la wilaya 4 sous le commandement de Si M’Hamed (Ahmed Bouguerra*), tué en mars 1959, puis de Si Mohammed (Djilali Bounaâma*). À la fin de 1959, Hocine Zahouane, contacté par le GPRA, avait tenté une mission de conciliation entre officiers de la Wilaya 3 en insubordination  ; il obtient un accord de statu quo à leurs postes en attendant l’arrivée d’une commission d’enquête qui ne vint pas  ; les destitutions réciproques reprirent et les promotions dans la clientèle. Le rapport d’Hocine Zahouane (archives de Mohammed Harbi*) est daté du 29 juin 1960.

À ce moment, qui est celui de la rencontre de Melun et de la réception à l’Élysée des officiers venant de la Wilaya 4 (affaire Si Salah), le trouble est profond. Hocine Zahouane s’affirme comme un officier politique attentif à la pratique démocratique et à la finalité sociale de la lutte de libération dont il ne dissimule pas l’affaissement sous les coups des opérations Challe, et la déperdition des relations avec la population, nouées auparavant à travers l’Organisation politico-administrative qui devient une commande directe par l’ALN repliée sur des positions resserrées.

Au temps de l’Exécutif provisoire établi à Rocher Noir (Boumerdès) pour appliquer les Accords d’Evian, et de la reconstitution, dans la lutte contre l’OAS, de la Zone autonome d’Alger (Commandant Azzedine, Boualem et Omar Oussedik*), émanation de la Wilaya 4, Hocine Zahouane fait partie des envoyés du GPRA pour renouer les fils d’une organisation syndicale et politique. Il est l’homme des relations entre les autorités concurrentes, les groupes politiques et l’UGTA  ; il bénéficie de l’appui des quelques dizaines de progressistes français d’option algérienne, intellectuels et syndicalistes communistes ou chrétiens. Il contribue ainsi au redémarrage de l’UGTA à Alger. Il tente encore l’impossible dans l’éphémère Comité de conciliation de l’été 1962 dans l’affrontement entre Bureau politique du FLN, État major général, Wilayas et GPRA.

Il reste proche de l’UGTA, distant certes au moment de la caporalisation par le président Ben Bella au congrès fabriqué de janvier 1963, puis lié à la nouvelle équipe de Révolution africaine autour de Mohammed Harbi*  ; il entre en 1964 au bureau politique du FLN où il est chargé de la Commission d’orientation, s’intéressant notamment à la relance des Jeunesses FLN. Partisan de la Charte d’Alger (1964) et du programme progressiste de l’UGTA en concordance avec les orientations socialistes assumées par Ben Bella, il participe au congrès de l’Union régionale de l’UGTA d’Alger où il déclare : « les travailleurs algériens doivent accéder au pouvoir politique »  ; c’est cette évolution qu’interrompt le coup d’État militaire du 19 juin 1965. Avec Mohammed Harbi* et la gauche communiste, il passe en clandestinité pour lancer l’Organisation de la résistance populaire (ORP). Emprisonné puis assigné à résidence dans le Sud algérien de 1965 à 1971, il s’exile en France en 1973 et ne rentre en Algérie qu’après la mort de Houari Boumediene. Très attaché au mouvement berbère mais sans esprit berbériste, de la Maison de la culture de Tizi Ouzou, il est, devenu avocat, un porteur du combat démocratique dans les associations après 1988. Vice-président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH), il en devient le président en 2002.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article152588, notice ZAHOUANE Hocine [Dictionnaire Algérie] par Amar Benamrouche et René Gallissot, version mise en ligne le 19 janvier 2014, dernière modification le 19 janvier 2014.

Par Amar Benamrouche et René Gallissot

SOURCES : M. Harbi, Le FLN, mirage et réalité, op. cit. – G. Meynier, Histoire intérieure du FLN, op. cit. – B. Bourouiba, Les syndicalistes algériens, op. cit. – A. Cheurfi, La classe politique algérienne de 1900 à nos jours, op. cit.

Version imprimable