CARRÉ Jacqueline [Dictionnaire Algérie]

Par René Gallissot

Militante CGT en région parisienne, membre du réseau Jeanson d’aide au FLN , emprisonnée à La Roquette en 1960 puis évadée, seule ouvrière ; morte en 1991.

Parmi les femmes qui participaient au soutien de la Fédération de France du FLN, évadées en février 1961 de la prison de La Roquette à Paris, pour son ouvrage Les Porteurs d’espoir, Jacques Charby regrettait de ne pouvoir donner toute sa place à Jacqueline Carré. Elle était d’une « remarquable efficacité ». Elle n’a pas écrit de témoignage ni fait d’entretien. En prison elle répondait déjà à ses compagnes :« Moi qui ne ne suis pas une intellectuelle » pour mieux se revendiquer ouvrière.

Hélène Cuénat* qui l’a côtoyée dans le réseau Jeanson, en prison pendant un an et dans l’évasion, commente la photo de police livrée à la presse : « La tête droite, bien en face du photographe…elle regarde par-delà. Visage fort, anguleux…les sourcils passés au crayon, les lèvres soigneusement peintes, les cheveux décolorés et permanentés, uns sorte de frange bombée retombant sur le front, selon les normes de l’époque, mais les normes populaires, conformes au modèle donné par Edith Piaf à laquelle Jacqueline parfois s’identifiait. ». Laissée à part comme prolo ; il est vrai qu’on parle encore moins des deux algériennes évadées elles-aussi : Zina Haraigue*, membre de l’OS et plus jeune, Fatimah Hamoud*, convoyeuse de fonds.

« Moi, je travaillais à la Thomson comme monitrice pour aider les filles sur les chaînes » ; il s’agit de la chaîne de montage de postes transistor de la Compagnie Thomson en région parisienne à raison de quarante heures par semaine. Militante syndicale, Jacqueline Carré était venue au réseau Jeanson par La Voie communiste, ce groupe de dissidence du parti communiste, du nom du journal dirigé par Gérard Spitzer*. Quand le réseau tombe, après Hélène Cuénat et Jacques Charby, elle est arrêtée le 21 février 1960 comme Gérard Meier*. Lors de son interrogatoire, elle est « insultée, humiliée, menacée par le chantage concernant l’amie avec laquelle elle vivait ». Puis ce sera La Roquette. Défendue par Roland Dumas, elle plaide coupable au procès du réseau en septembre 1960. Retour à La Roquette pour préparer l’évasion. ; elle est la plus manuelle pour attaquer la ferraille et se servir d’outils. Dans la nuit du 24 février 1961, malgré sa légèreté (1m55) pour la courte échelle, elle fait partie avec Didar Fawzy-Rossano* et Zina Haraigue* du trio qui saute le plus tard dans la rue et s’esquive avant de passer en Belgique et au Maroc.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article152705, notice CARRÉ Jacqueline [Dictionnaire Algérie] par René Gallissot, version mise en ligne le 24 janvier 2014, dernière modification le 15 novembre 2016.

Par René Gallissot

SOURCES : M. Péju, Le Procès Jeanson, Maspero, Paris 1961. — D. Fawzy-Rossano, Mémoires d’une militante communiste (1942-1990) du Caire à Alger, Paris et Genève. Lettres aux miens. L’Harmattan, Paris 1997. — H. Cuénat, La Porte verte. Bouchène, Saint-Denis, 2001. — J. Charby, Les porteurs d’espoir. Les réseaux de soutien au FLN pendant la guerre d’Algérie : les acteurs parlent. La Découverte, Paris 2004.

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