JULIA Louis [Dictionnaire Algérie]

Par René Gallissot

Né le 24 avril 1907 ; mort en 1954 ; professeur à Sidi-Bel-Abbès puis Alger, militant syndicaliste, secrétaire départemental du SNCM à la Libération, chroniqueur très populaire à Alger Républicain.

Comme il l’écrit lui-même en juin 1945 dans le quotidien Alger Républicain, Louis Julia porte le nom et prénom de son arrière grand-père, déporté politique de Paris en Algérie en 1851 sous le Prince-président Napoléon qui devient Napoléon III. À Oran, ce Louis Julia se trouve en milieu « espagnol ». Cet arrière grand-père est aussi un exemple de petit colon se disant ruiné par les banques. Il avait tenté de s’établir sur une exploitation agricole dans l’opération de défrichage et drainage des terres salines au bord de la sebkha d’Oran. Le « colon manqué » partit chercher l’emploi à Sidi-Bel-Abbès.

Un autre des arrières petits-enfants, Henri Julia, est ainsi cheminot, militant actif de la cellule communiste des CFA au dépôt de la gare de cette ville, ville coloniale, ville de la Légion étrangère, ville rouge (voir au nom de Justrabo). Enseignant dans le « primaire supérieur » depuis le début des années 1930 à l’école de garçons de Sidi-Bel-Abbès, le professeur Louis Julia est nommé à Alger, en 1945, au collège moderne du boulevard Guillemin. Militant du Syndicat national des écoles primaires supérieures avant-guerre devenu Syndicat national des collèges modernes, il en devient le secrétaire pour l’Algérie.

Venant d’Oran et même d’Oran Républicain, le nouveau rédacteur en chef d’Alger Républicain, Michel Rouzé, le recrute pour s’adresser aux « petits », aux « petits colons » et aux descendants de l’immigration d’Europe (« Européens ») et particulièrement d’Espagne. Ces « petits » qui se disent « Algériens », se situent facilement à l’extrême gauche accompagnant les communistes depuis le Front populaire. Leur langue est celle de Bab-El-Oued, ce sabir dit pataouète ; Louis Julia fait écho, en français populaire, et il a une belle plume pour transposer les expressions orales.

Chroniqueur d’Alger Républicain, Louis Julia ne cesse de répéter qu’il n’est pas communiste mais qu’il défend les victimes de la colonisation. « La présence française en Algérie, c’étaient les petits et les moyens colons…, c’étaient 20 000 fermes avec des petits colons, exemples et guides pour cinq millions de fellahs…, c’étaient les classes moyennes, européennes et musulmanes. Ces classes agonisent. Qu’on y prenne garde. » (Alger Républicain, 5 juin 1945).

Pilier de l’imprimerie du journal, l’imprimerie Koechlin à Bab-el-Oued, Louis Julia y publie l’Almanach de Tonet de la Baseta ; la Baseta, au nord de Valence, étant une référence d’origine des immigrants du Levant espagnol. L’édition de 1953-1954 existe à la Bibliothèque nationale de France à Paris ; c’est dire que jusqu’à la fin d’Alger Républicainen 1955, Louis Julia fut un chroniqueur populaire.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article152934, notice JULIA Louis [Dictionnaire Algérie] par René Gallissot, version mise en ligne le 1er février 2014, dernière modification le 31 janvier 2021.

Par René Gallissot

SOURCES : J. Delorme, Mémoire sur Sidi-Bel-Abbès, op.cit. — Joël Merrien, Alger Républicain et la politique de Front national de 1950 à 1954, mémoire de DES d’histoire, Université de Nanterre, 1967. — H. Alleg, A. Benzine, B. Khalfa, La grande aventure d’Alger Républicain, Messidor, Paris 1987. — Guillaume Laisné, Engagements d’un quotidien en société coloniale. Le cas d’Alger Républicain (1938-1955), mémoire de master histoire et théorie politique, Institut d’Études politiques de Paris, 2007. — Archives IRHSES, notes d’ Alain Dalançon.

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