BONNAUD François [Dictionnaire des anarchistes]

Par Jacques Bouvet, notice complétée par Guillaume Davranche

Né le 8 mai 1896 à Angers (Maine-et-Loire), mort le 29 octobre 1981 à Saint-Sylvain-d’Anjou (Maine-et-Loire) ; cheminot, menuisier, puis receveur des postes ; anarcho-syndicaliste.

François Bonnaud (1920)
François Bonnaud (1920)
Coll. Tharreau

Fils d’un maréchal-ferrant qui les abandonna, lui et sa mère, François Bonnaud (parfois orthographié Bonneau) fut contraint de travailler comme ouvrier agricole de 1907 à 1916. Incorporé au 4e régiment de zouaves cette année-là, il fut démobilisé en 1919. Expérience qui le détourna définitivement de tout patriotisme.

Entré aux chemins de fer du Paris-Orléans en février 1920, il fit la grande grève de mai et fut révoqué. À cette époque, avec Maurice Faivre, il adhéra au Comité de la IIIe Internationale et au PS, pour y mener le combat en faveur de la Révolution russe. Il fut bientôt secrétaire de la section socialiste de Saint-Laud.

En parallèle, il continuait surtout de militer en tant que révoqué au syndicat des cheminots et, de septembre 1920 à juillet 1921, fut secrétaire du Comité syndicaliste révolutionnaire du Maine-et-Loire, avant de passer la main à Paul Cadeau.

De juin 1920 à mars 1921, il travailla comme ouvrier au Meuble massif, puis fut embauché chez Gaubourg, une usine de produits chimiques. Il y fonda un syndicat et mena une grève de plusieurs semaines, victorieuse, pour les salaires et le temps de travail. Le 29 octobre 1920, il se maria.

Après le congrès de Tours de décembre 1920, il fut quelque temps adhérent du PCF, mais s’en détourna vite, à la fois par rejet des chefs du parti, et par rejet du gouvernement soviétique.

Licencié par Gaubourg en novembre 1921, il retourna au Meuble massif et, dès janvier 1922, devint secrétaire du syndicat de l’ameublement. La scission confédérale étant alors en cours, il fut également un des fondateurs de l’union départementale CGTU, et en fut élu secrétaire.

À la CGTU, Bonnaud pencha rapidement pour la tendance Besnard. Il la soutint au Ier congrès confédéral, à Saint-Étienne du 25 juin au 2 juillet 1922, où il représentait les syndicats de l’Ameublement, de l’Alimentation et des Métaux d’Angers. Durant le 2e semestre 1922, il était à la fois secrétaire-trésorier de l’UD unitaire (UDU) du Maine-et-Loire, et du Groupe d’études sociales (libertaire) d’Angers.

Il semble qu’au congrès du 8 avril 1923, les communistes aient obtenu la majorité dans l’UDU. Ce ne fut en tout cas pas Bonnaud qui représenta les syndicats du Maine-et-Loire au congrès confédéral de Bourges, du 12 au 17 novembre 1923, mais Peltier, qui vota avec la majorité Monmousseau, y compris au nom du syndicat de l’Ameublement d’Angers, qu’il représentait.

Bonnaud resta néanmoins secrétaire de l’UDU jusqu’à expiration de son mandat, sans doute en janvier 1924, et secrétaire du syndicat de l’Ameublement jusqu’en 1932.

En 1926-1927, il fut le principal organisateur du comité local en faveur de Sacco et Vanzetti.

Très actif dans le groupe anarchiste de la ville, devenu la bête noire des communistes angevins, François Bonnaud se vit néanmoins proposer de faire partie de la délégation angevine au IVe congrès de l’Internationale syndicale rouge. Les communistes emmenaient parfois certains opposants en URSS dans un but d’édification et dans l’espoir de les convertir. Mais François Bonnaud, sachant à quoi s’en tenir, prépara son voyage avec l’aide de Nicolas Lazarévitch et d’Ida Mett. Il quitta la France par le train le 10 mars 1926 avec les délégués de la CGTU — dont Monmousseau et Teulade — et arriva à Moscou le 13 mars. Il y resta un mois, assista à plusieurs séances du congrès, mais en profita surtout pour prendre contact avec Pierre Pascal, Francesco Ghezzi, et l’opposition libertaire clandestine. Ghezzi le guida dans les faubourgs ouvriers et lui fit voir une réalité soviétique très éloignée de l’hôtel de luxe et des visites d’apparat réservés aux délégués étrangers. À son retour, Bonnaud fit passer clandestinement en France le manuscrit de la brochure Большевистская диктатура в свете анархизма : десять лет советской власти коллективное исследование (La dictature bolchevique vue par les anarchistes : dix ans de pouvoir bolchevique) que publieront Ida Mett et Nicolas Lazarévitch.

De retour à Angers vers le 15 avril, François Bonnaud rédigea un long récit qui fut publié en feuilleton en mai 1928 dans Le Libertaire sous le titre : « Une voix discordante dans le chœur des apologistes de la dictature : ce que j’ai vu à Moscou ». Sa franchise lui valut la haine redoublée des communistes, et attira la répression sur Ghezzi, dont on savait qu’il l’avait rencontré en URSS. En mai 1929, ce dernier fut arrêté et condamné à trois ans de prison. Au sein de la CGTU angevine, la situation devint intenable au point qu’en décembre 1929, le syndicat du bois, qui soutenait Bonnaud face aux calomnies, passa à l’autonomie — il devait y rester jusqu’à la réunification de 1936. Bonnaud en resta le secrétaire jusqu’en 1932.

À partir de 1929, il se consacra surtout au pacifisme au sein de la Ligue internationale des combattants de la paix (LICP). Ami d’Aristide Lapeyre, de Marcelle Capy, de Jeanne Humbert, il organisa de multiples conférences au nom du groupe anarchiste d’Angers-Trélazé et, en particulier, celles de Sébastien Faure.

Nommé facteur auxiliaire à Veigné (Indre-et-Loire) en 1932, puis facteur receveur à Lublé (Indre-et-Loire) de 1935 à 1944, il adhéra à la CGT-SR. De retour dans le Maine-et-Loire en 1944, il s’installa à Saint-Sylvain-d’Anjou où il demeura jusqu’à sa mort.

Secrétaire du syndicat des PTT, il fut délégué au Ier congrès de la CGT-Force ouvrière en avril 1948.

Retraité, il fut adhérent à la Fédération anarchiste, mit sur pied un comité local des œuvres laïques et devint pendant plus de dix ans délégué cantonal puis départemental de l’Éducation nationale.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article153819, notice BONNAUD François [Dictionnaire des anarchistes] par Jacques Bouvet, notice complétée par Guillaume Davranche, version mise en ligne le 7 mars 2014, dernière modification le 3 octobre 2022.

Par Jacques Bouvet, notice complétée par Guillaume Davranche

François Bonnaud (1920)
François Bonnaud (1920)
Coll. Tharreau

ŒUVRE : Carnets de luttes d’un anarcho-syndicaliste (1896-1945). Du Maine-et-Loire à Moscou, texte présenté par Christophe Patillon, Éditions du Centre d’histoire du travail, 2008.

SOURCES : Arch. Dép. Maine-et-Loire, série 4 M 6. — Arch. privées François Bonnaud (déposées au Centre d’histoire du travail de Nantes) — L’Anjou communiste, 1921-1923 — Jacques Bouvet, « Un anarchiste angevin au pays des soviets », L’Anjou, n° 20, mars 1993, p. 16-29. — Note de Franck Mintz.

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