Par Yves Lequin et Gérard Raffaëlli, notice complétée par Guillaume Davranche
Né à Saint-Priest-en-Jarez (Loire) le 25 juillet 1883 ; mineur, puis ouvrier métallurgiste ; syndicalise et anarchiste, puis communiste.
Le 8 août 1901, Benoît Liothier était mineur lorsqu’il signa un engagement volontaire pour quatre ans dans l’armée, et fut incorporé au 111e régiment d’infanterie. Les choses se gâtèrent pour lui puisque, le 15 février 1904, il fut expédié « au Bât’ d’Af’ », dans la 1re compagnie de fusiliers de discipline, en Tunisie. Le 13 juin 1905, le conseil de guerre le condamna à trois ans de prison pour outrage envers un supérieur pendant le service, et il fut écroué à l’établissement pénitencier mixte de Tunisie, où il resta jusqu’au 20 octobre 1907. Il revint alors dans la 1re compagnie de fusiliers de discipline. Il fut enfin libéré du service le 8 février 1908 et put rentrer en France, le certificat de bonne conduite lui ayant été refusé.
En 1910, il était considéré comme un des plus dangereux antimilitaristes de Saint-Étienne et proposé pour l’inscription au carnet B. Militant des Jeunesses syndicalistes, il était en effet un des plus fervents animateurs de la campagne contre les bagnes militaires (voir Émile Rousset) et tenait la caisse du Sou du soldat.
En même temps, il participait activement à la vie du syndicat de la métallurgie, dont il fut le secrétaire en 1910-1911, avant de passer la main à Laurent Torcieux.
En 1911, Benoît Liothier proposa à la bourse du travail de Saint-Étienne qu’aucun politicien ne puisse prendre la parole dans les meetings qui se tenaient dans ses locaux.
Auteur dramatique à ses heures, il écrivait des pièces engagées : en mars 1912, l’une d’elles, qui dénonçait Biribi sous le titre Aux Travaux, fut jouée devant près d’un millier de personnes à Roanne par le groupe artistique stéphanois avant d’être interdite par le sous-préfet.
En 1912, il fut le principal orateur d’une série de conférences à Chazelles-sur-Lyon, Grand-Croix, Saint-Chamond et Vienne (Isère) organisées tant par les milieux libertaires que par le Parti socialiste. Il prêcha l’unité nécessaire des révolutionnaires de toutes tendances contre la guerre. Pour y avoir également préconisé le sabotage des lignes télégraphiques en cas de mobilisation, il fut arrêté à la fin de l’année et condamné, le 6 janvier 1913, par le tribunal correctionnel de Saint-Étienne à deux ans de prison ferme ; mais, en juillet, la cour d’appel de Lyon le relaxa.
Du 8 au 11 septembre 1913, il représenta le syndicat des métallurgistes de Saint-Étienne au congrès fédéral des Métaux à Paris, et s’y exprima avec virulence contre la « rectification de tir » dont la fédération était, au sein de la CGT, à l’avant-garde. Il en fit un compte-rendu sévère dans Le Libertaire du 20 septembre 1913. De retour à Saint-Étienne, il envisagea la création d’une nouvelle Union des métaux, sans Torcieux ni Urbain Malot, accusés de modérantisme.
Au début de 1914, Liothier fit représenter à Saint-Étienne un drame antialcoolique : La Source fatale.
En mai 1914, il était secrétaire du groupe anarchiste stéphanois, qui tenait ses réunions au café Ferriol, sur le cours Victor-Hugo et comptait dans ses rangs, entre autres, Laurent Moulin, Claude Charrat, Philippe Goy, Jean Gardant, Antoine Clemençon et Catherine Bernard.
Au moment de la déclaration de guerre, avecPhilippe Goy, Jean-Baptiste Rascle et Nicolas Berthet, Liothier fut de ceux qui se cachèrent un temps dans les bois du Pilat pour échapper à l’application du Carnet B. Finalement, il répondit à l’appel et, le 5 août, il fut incorporé au 157e régiment d’infanterie. Cependant, dès le 15 décembre 1914, il fut affecté spécial chez Lescure & Sigot (armement) à Saint-Étienne. Il ne fit pas parler de lui pendant la guerre, même au plus fort de l’agitation pacifiste de mai 1918. Le commissaire déclarait à son sujet : « Il a mis de l’eau dans son vin. » Il fut démobilisé le 22 mars 1919 et s’installa au 21, rue Malescours à Saint-Étienne.
Après la Première Guerre mondiale, il adhéra au Parti communiste et intervint dans des réunions publiques. Jusqu’en décembre 1927, il fut responsable de l’hebdomadaire communiste Le Cri du Peuple. Le 9 février 1928, il demanda des comptes politiques et financiers au comité de rayon, et reçut un blâme le 12 février. Il démissionna aussitôt, puis fut exclu du Parti.
Par Yves Lequin et Gérard Raffaëlli, notice complétée par Guillaume Davranche
SOURCES : Registres matricules de la Loire. — Arch. Nat. F7/13053, 13065, 13570, 13110, 13313. — Arch. Dép. Loire 3 M 70, 19 M 25, 19 M 29, 19 M 33, 93 M 8, 93 M 13, 93 M 17 et 93 M 52 — Le Libertaire du 20 septembre 1913.