Par Guillaume Davranche
Né le 14 novembre 1881 à Cahors (Lot) ; ouvrier bijoutier ; anarchiste et syndicaliste.
Ami de Dubois-Desaule*, Gaston Delpech était inscrit dès avant 1902 au répertoire des anarchistes. En 1902, il fut incorporé au 8e régiment d’artillerie de Bruyère (Vosges) mais s’y montra très discipliné et, le 30 mai 1905, il fut rayé du répertoire des anarchistes à la demande de son capitaine. Dès sa libération, il reprit néanmoins ses activités politiques et, en octobre 1905, cofonda à Paris la 10e section de l’Association internationale antimilitariste.
En juin 1907, il fut parmi les inculpés dans l’affaire de l’affiche « Aux soldats » de l’AIA (voir Mouchebœuf). Au procès, c’est déclara-t-il « par un sentiment de modestie » qu’il refusa de dire qui était l’auteur de l’affiche.
À la même époque, il était secrétaire du syndicat des ouvriers bijoutiers. En juillet 1907, il fut élu à la commission exécutive de l’Union des syndicats de la Seine. En août, il intégra le conseil d’administration de la bourse du travail de Paris. La police pensait que son bureau servait de lieu de recel pour les objets volés par Alexandre Cibot, un de ses camarades de l’AIA. Il était en même temps membre du sous-comité parisien des huit heures et de la grève générale.
En mars 1908, Gaston Delpech fut parmi les réorganisateurs de l’AIA. Il en devint le trésorier, tandis que Georges Durupt en était le secrétaire.
Le 23 juillet 1908, il prit la parole au meeting que l’union des syndicats de la Seine consacra aux événements de Draveil-Vigneux. Il y déclara qu’il faudrait faire sauter les ponts et détruire les moyens de communication pour empêcher la concentration des forces armées.
Le 6 décembre 1908, à la Maison des fédérations à Paris, Gaston Delpech fonda un groupe « anarcho-hervéiste » fortement antimilitariste nommé Jeunesse syndicaliste révolutionnaire (non reconnu régulièrement par la CGT). Selon la police ce groupe compta jusqu’à une cinquantaine d’adhérents.
À l’époque, il siégeait au comité confédéral de la CGT au titre des bourses du travail de Montauban et de Cahors. Le 11 décembre 1908, il fut élu à la commission des grèves et de la grève générale de la CGT par la section des bourses du travail.
Le 27 décembre 1908, il remplaça Durupt au secrétariat de l’AIA, et Maurice Violette* en devint le trésorier. Delpech prônait alors l’insoumission et la désertion aux jeunes, et, pour ceux qui voulaient leur service, la propagande antimilitariste au régiment.
À la même époque, Gaston Delpech était membre du Comité de défense sociale (CDS), chargé d’aider les victimes de la répression gouvernementale.
En avril 1909 il participa au congrès fondateur de la Fédération révolutionnaire (FR) avec Belin, Violette, René de Marmande et François Cuisse. La Jeunesse syndicaliste révolutionnaire s’inséra alors dans la FR. Un rapport de police le présente comme un des principaux animateurs de la nouvelle organisation, bien que ne figurant pas dans son comité fédéral.
Le 18 avril, Delpech intervint dans la grève des boutonniers de l’Oise avec Violette et De Marmande*.
À l’aube du 11 juin 1909, son domicile fut perquisitionné dans le cadre de l’enquête sur la vague de sabotage contre les lignes télégraphiques et téléphoniques. Il habitait alors 27, rue des Trois-Bornes, à Paris 11e. Deux jours plus tard, le 13 juin, il devint permanent au conseil d’administration de la bourse du travail, et co-secrétaire de la bourse avec Bled.
Le 2 octobre 1909 il prit la parole, au nom de la FR, à un meeting antimilitariste à la coopérative L’Églantine parisienne, avec Almereyda, François Marie et Lucien Métivier*.
En janvier 1910, Delpech était secrétaire de la commission administrative de la bourse du travail de Paris. Il fut réélu au conseil d’administration le 15 février 1910.
À cette époque, il fut inculpé, avec Maurice Violette*, Louis Garreau (de la Fédération du papier) et Robert Marceau (de la Jeunesse syndicaliste) pour avoir incité à la désertion le soldat Gosset. Il bénéficia d’un non-lieu le 28 avril et témoigna au procès Garreau-Violette-Marceau le 10 juin devant le tribunal correctionnel.
À l’occasion des législatives d’avril-mai 1910, il soutint la candidature de Jean Allemane, ce qui marqua son éloignement de l’anarchisme.
En octobre 1910, il fut délégué au congrès de Toulouse de la CGT par le syndicat des ouvriers d’industrie de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie de Paris. Il y présenta le rapport du comité des grèves et de la grève générale, qui confessait l’inactivité ou l’activité chaotique de ce comité depuis le congrès de Marseille.
Le 25 novembre 1910, il prit la parole dans un meeting du CDS salle du Libre-Échange, rue Brochant, en défense du soldat Louis Lecoin aux côtés de Léon Jouhaux, Travers et Dubosc.
Le 1er septembre 1911, il donna sa démission de secrétaire du conseil d’administration de la bourse du travail.
Le 22 septembre, il prit la parole au nom du syndicat des Bijoutiers dans un meeting contre la guerre organisé par les Charpentiers, Serruriers, Menuisiers et Bijoutiers dans la cour de la Maison des fédérations, impasse de la Grange-aux-Belles.
En février 1912, il fut membre, au titre de l’union des syndicats de la Seine, de la commission d’organisation des obsèques d’Aernoult, qui rassemblait également des délégués de la SFIO et du CDS.
En août 1912, il donna sa démission de secrétaire de la bourse du travail. La revue Le Mouvement anarchiste applaudit et écrivit : « Bon voyage, F∴ Delpech. Si seulement tous ses F∴ en faisaient autant ! »
Par Guillaume Davranche
ŒUVRE : L’affaire Rousset-Aernoult, procès Sabatier, Casanova, Beignier, le meurtre Brancoli [publié] sous les auspices des loges L’Évolution économique et Étienne Marcel, Courbevoie, La Cootypographie, 1912, 24 p.
SOURCES : CAC Fontainebleau 19940437/art337 (dossier Henry Combes) — AN F7/13053 — Arch. PPo BA/882, 1513 et 1514 — AD de l’Oise 4 Fi 3137 — La Guerre sociale du 3 décembre 1908 — L’Intransigeant du 11 juin 1909 — La Revue politique et parlementaire de mai 1910, p. 400 — L’Humanité et Le Matin du 19 avril 1909 — L’Humanité du 6 février 1912 — Le Mouvement anarchiste de septembre 1912 — Robert Brécy, Le Mouvement syndical en France 1871-1921, Mouton & Co, 1963 — Paul B. Miller, From Revolutionnaries to Citizens : antimilitarism in France, 1870-1914, Duke University Press, 2002 — Guillaume Davranche, Trop jeunes pour mourir. Ouvriers et révolutionnaires face à la guerre (1909-1914), L’Insomniaque/Libertalia, 2014.