Par Claude Geslin, notice revue par Guillaume Davranche
Né le 16 avril 1882 à Thétieu (Landes), mort au Pellerin (Loire-Inférieure) le 31 décembre 1970 ; cheminot ; anarchiste puis communiste.
Fils de Barthélémy Baraille, laboureur, et de Jeanne Salles, Barthélemy Baraille (du même prénom que celui de son père) s’engagea pour 5 ans dans la marine nationale. Marin de 1er classe en en 1906 sur le Descartes, il connut l’Indochine à Saïgon. Passé dans la réserve le 1er septembre 1907, il obtint un certificat de bonne conduite. Sa fiche de matricule le décrivait ainsi : 1 m 59, cheveux châtains, yeux châtains, nez long, bouche moyenne, menton rond, visage ovale.
Baraille entra dans les chemins de fer en 1907 et adhéra à la CGT en 1908. Cette même année, il se maria avec Célestine Hontarrède, le 23 avril 1908 à Saint-Vincent de-Paul (Landes).
Ouvrier de la traction aux ateliers du chemin de fer du Nord, à Anzin (Nord), il devint membre du conseil d’administration et délégué à la bourse du travail d’Amiens. Mais en 1910, après la grève des cheminots pour la « thune », il fut révoqué avec 132 camarades de la Somme. Une autre source situe son congés au 13 octobre 1908 pour faits de grève,
Sa femme se fixa à Rambouillet et lui se mit à voyager comme colleur d’affiches au service d’une entreprise de publicité dans les gares, puis, en octobre 1911, il entra comme lampiste à la compagnie du chemin de fer d’intérêt local de Berck-sur-Mer (Pas-de-Calais). Baraille s’installa alors avec sa femme, garde barrière et son frère Jean-Baptiste, chauffeur pour la même compagnie, dans le quartier Terminus, à la Villa Suzanne, une sorte de chalet de bois presque au milieu des dunes.
À cette époque (1910-1911), il lisait L’Anarchie et son nom apparut à plusieurs reprises dans la rubrique « Trois mots aux amis ».
En mars 1912, il hébergea une semaine le jeune André Soudy, de la bande à Bonnot. Grâce à un renseignement fourni par un indicateur, Soudy fut interpellé par la police le 30 mars, alors qu’il s’apprêtait à quitter Berck., La police saisit à la poste une importante correspondance adressée à Soudy (sous des noms divers) chez Baraille, à la Villa Suzanne. Baraille, interpellé à son tour, déclara à l’inspecteur Jouin qu’il n’avait pas cru devoir refuser l’hospitalité à Soudy, qui s’était simplement présenté à lui comme un compagnon libertaire. « J’ignorais, ajouta-t-il, qu’il eût pris part aux derniers attentats. Au surplus, si je suis anarchiste convaincu, je réprouve avec énergie tout acte criminel. » Baraille ne fut finalement pas inculpé. Sa femme partageait les convictions révolutionnaires de Baraille, son frère Jean-Baptiste également.
En mai 1914, Barthélemy Baraille était adhérent individuel à la Fédération communiste anarchiste révolutionnaire. (FCAR). Inscrit au Carnet B, il fut arrêté le jour de la mobilisation et incarcéré pendant quarante jours. Trois mois après sa libération, il était de nouveau arrêté pour la distribution d’un tract de la Ligue des droits de l’homme et interné à Sablé (Sarthe) pendant quarante-cinq jours.
Interdit de séjour dans le Pas-de-Calais, il gagna Nantes en mars 1915 et fut embauché à l’arsenal d’Indret (Loire-Inférieure) et logea à La Briandière dans une maison donnant sur la cour de la Boulangerie des coopérateurs. On trouve son nom dans l’Humanité du 22 février 1916, souscription ouverte par le comité d’action (PS, CGT, FNCC) : "Baraille, à La Montage,80 F". Avec l’ouvrier Jean Crémet, il forma un petit groupe de propagande pacifiste. Après Zimmerwald, il cofonda avec Crémet, à La Montagne, une section du Comité pour la reprise des relations internationales (CRRI). En 1919, ils le transformèrent en section du Comité de la IIIe Internationale. Propagandiste acharné, Baraille distribuait La Vague, Le Populaire du Centre, Le Journal du peuple, Le Métallurgiste ainsi que des tracts, des brochures et le manifeste de Zimmerwald. C’est semble-t-il à cette époque qu’il adhéra au Parti socialiste, où il se classa dans la minorité zimmerwaldienne.
Il mena ensuite la bataille pour le ralliement du PS à la IIIe Internationale, et fut militant du Parti communiste en Loire-Inférieure jusqu’à la fin de ses jours.
En mai 1919, il fut arrêté pour distribution de brochures interdites par la censure, propagande bolcheviste et excitation à la révolte des soldats de l’armée russe en France. L’Humanité des 21 mai et 27 mai 1919 commenta cette arrestation et prit sa défense. Il fut alors mis au secret à la prison militaire de Nantes. Il fut libéré au bout de cinquante jours grâce à l’intervention de l’avocat parisien Henry Torrès, membre du comité de la IIIe Internationale (Baraille apparaît comme membre de la commission exécutive), de la Ligue des Droits de l’Homme de Loire-Inférieure et de la Fédération socialiste. Partisan, dès 1919, de l’adhésion du Parti socialiste à la IIIe Internationale, il fut de ceux qui firent pencher la majorité du congrès de la Fédération de Loire-Inférieure vers la résolution du comité de la IIIe Internationale, quinze jours avant le congrès de Tours. À partir de 1920 et jusqu’en 1939, il fut de toutes les batailles politiques du Parti communiste en Loire-Inférieure : trésorier adjoint de la Fédération du Parti socialiste-communiste en 1921, de la Fédération communiste en 1923-1924 ; animateur en 1926 (il était alors gérant de la coopérative de Saint-Jean-de-Boiseau) de la commission paysanne du bureau général de la Fédération communiste de l’Atlantique ; trésorier adjoint du comité départemental de Loire-Inférieure de la Fédération régionale communiste en 1927 ; membre du comité de lutte contre la guerre en 1934 ; secrétaire provisoire en 1935 puis président en 1936 de la section nantaise des « Amis de l’URSS ». Il fut aussi le candidat du PC dans tous les grands scrutins, en particulier lors des élections législatives en 1924, dans la première circonscription de la Loire-Inférieure, en 1928, 1932 et 1936 dans la quatrième circonscription de Nantes.
En 1941, considéré comme un militant communiste "dangereux", il fut arrêté et interné au camp de Châteaubriant (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique) en même temps que son ami Pierre Hureau avant d’être relâché. En 1945, il fut élu au conseil municipal de Saint-Jean-de-Boiseau. B. Baraille fut l’une des figures les plus caractéristiques du Parti communiste en Loire-Inférieure. En 1960, à soixante-dix-huit ans, il assistait toujours aux réunions, ne ménageant pas ses conseils aux jeunes, leur transmettant des convictions pour lesquelles il s’était battu pendant un demi-siècle et diffusant encore la presse. Il était père de deux filles.
Par Claude Geslin, notice revue par Guillaume Davranche
SOURCES : Arch. Nat. F7/13053 — Le Journal du 1er avril 1912 — note d’Anne Steiner.