Par Jean Maitron, notice complétée par Marianne Enckell
Né le 3 novembre 1850 à Lausanne (Suisse) ; mort le 6 février 1915 à Paris ; commissionnaire en bijouterie ; anarchiste.
Fils de Jean-Alexandre Zibelin, de Bordeaux, marié à une demoiselle Dupuis et négociant à Lausanne. Soldat au 9e escadron du train des équipages militaires, Zibelin abandonna son poste dans la nuit du 18 au 19 mars 1871 et fut porté déserteur. Il aurait pris part à la Commune de Paris. Il fut recherché, mais sans résultat.
Il résida à Buenos Aires, à Mexico, aux Etats-Unis, à Genève, et était en correspondance suivie avec les anarchistes espagnols. Son nom figure sous le n° 184 à l’état signalétique des anarchistes étrangers non expulsés résidant hors de France.
Vers 1880, il s’unit avec (dite Lilly, née le 9 juillet 1862 à Paris) Wilmerding, une amie des filles d’Elisée Reclus, d’origine américaine, cantatrice. En 1889, ils durent quitter Genève pour Nice puis Marseille.
En novembre 1891 il arriva à Nice et tint une boutique d’horlogerie au 2, rue Macarani ; il était fiché comme anarchiste. La police notait qu’il désapprouvait « Ravachol* et les moyens violents », mais avait « la conviction qu’une propagande active faite par des hommes convaincus et n’employant que la persuasion ne tardera pas à grossir les rangs des anarchistes ». Il était alors en étroit contact avec le jeune militant de Nice Auguste Matteoda, vendait La Révolte dans sa boutique, approvisionnait les camelots et le kiosque de la gare en presse anarchiste et hébergeait les compagnons de passage à Nice.
Il fut perquisitionné et arrêté en janvier 1894, et étroitement surveillé depuis lors. Il semble que son épouse revint vers cette date à Genève.
Son métier le faisait voyager : il écrivait à ses correspondants de Bruxelles, de Philadelphie, de Paris ; en 1901, il envoya son fils Albert junior (« Bertie ») vivre un temps chez Emma Goldman à New York. Il habita par la suite Paris, 54 boulevard Saint-Marcel. "J’ai connu personnellement Ferrer et sa compagne durant les déjeuners du 13 de chaque mois où quelques camarades se réunissaient. Comme caractère si ce n’est pas comme savoir, c’était un égal d’Elisée", écrivait-il à Jacques Gross, le 29 octobre 1909.
Zibelin fit partie de la délégation qui représenta la France au congrès anarchiste international qui se tint à Amsterdam du 24 au 31 août 1907, avec H. Beylie, Brille, B. Broutchoux, Coriol, Margoulis, R. de Marmande, P. Monatte.
En 1912, il quitta Marseille où il avait passé quelque temps – il était inscrit au carnet B des Bouches-du-Rhône – et vint à Paris. Il fut manutentionnaire dans un dépôt d’eaux minérales du boulevard de l’Hôpital où son fils Henri (né en 1887) était commis-gérant. Il continuait à fréquenter les milieux anarchistes et était abonné au Libertaire et à La Guerre sociale, et sans doute aux Temps nouveaux. Son nom figurait sur la liste des anarchistes surveillés. Il suivit les conférences de Bertoni en janvier-février 1914 ; il accueillit Max Nettlau (« Tous les jeudis nous avons l’ami Nettlau à déjeuner »), auquel il confia un manuscrit en 1911, ‘Essais sur la révolution sociale Avant Pendant Après’ (IISG).
Pendant la Grande Guerre, il pencha pour la défense nationale. Il mourut d’une apoplexie. Son fils Albert, qui avait vécu aux Etats-Unis puis en Espagne pendant la guerre, revint dans la région marseillaise où il fut notamment en contact fréquent avec Jean Marestan.
Par Jean Maitron, notice complétée par Marianne Enckell
SOURCES : Arch. PPo., B a/ 1 301 et BA/1514. — AD Alpes Maritimes 4M0517 — J. Maitron, Histoire du Mouvement anarchiste..., op. cit. — Congrès anarchiste tenu à Amsterdam, août 1907, Paris, 1908. — Correspondance d’Elisée Reclus, tome III — Fonds Jacques Gross, IISG Amsterdam — Emma Goldman, Living my life — Ulysse Martinez, Le gouvernement anarchiste dans une grande ville touristique du XIXe siècle : Nice (1884-1904), Nice 1976 — Notes de Guillaume Davranche et Rolf Dupuy — Max Nettlau Papers, IISG Amsterdam, lettres de Jean Marestan.