SCHWARTZBARD ou SCHWARZBARD Cholem [dit Shoulim, Samuel] [Dictionnaire des anarchistes]

Par Rolf Dupuy

Né le 18 août 1886 à Izmail (Bessarabie), mort le 3 mars 1938 à Capetown (Afrique du Sud) ; ouvrier horloger anarchiste ; auteur de l’attentat contre le leader nationaliste ukrainien S. Petlioura.

Militant anarchiste ukrainien d’origine juive, Cholem Schwartzbard dit Shoulim avait été élevé à Balta où en 1900 il était apprenti horloger et adhérent d’un groupe communiste juif. Il fut condamné à trois mois de prison pour avoir participé à la défense des juifs de Balta lors de pogroms et participa à la révolution de 1905. L’année suivante, il se réfugia à Vienne où en 1909, avec un groupe anarchiste, il prit part à une attaque de restaurant. Arrêté et condamné aux travaux forcés, il parvint à s’évader au bout de quatre mois et gagna Budapest où il fut arrêté porteur de littérature considérée comme subversive. Expulsé de l’Empire austro-hongrois, il trouva asile en France où il arriva en 1910.

Dès le début de la Première Guerre mondiale, il s’engagea dans la Légion étrangère et combattit sur le front d’Artois où il fut blessé. Après sa démobilisation à l’été 1917, il regagna la Russie avec sa compagne où il participa à la révolution, d’abord à la Garde Rouge à Petrograd, puis en Ukraine à une brigade juive de l’armée Rouge. C’est au cours de la guerre civile que quinze membres de sa famille furent massacrés lors de pogromes.

En 1920, il regagna la France et reprit son métier d’horloger, boulevard de Ménilmontant à Paris. Il représenta le mouvement anarchiste juif lors de la fondation en mai 1924 du groupe L’œuvre internationale des éditions anarchistes dont le responsable était Séverin Ferandel*. Il collabora à cette époque à la revue L’Idée anarchiste (1924) publiée par Lucien Haussard*.

Au printemps 1926, lors d’une sortie champêtre en région parisienne, il fut sauvé de la noyade par L. Anderson*. Quelques jours plus tard, le 25 mai 1926, et après que Nestor Makhno* avait tenté de l’en dissuader, il abattit rue Racine à Paris le leader nationaliste ukrainien Simon Petlioura, qu’il considérait comme responsable des pogromes commis par ses troupes. L’organe individualiste L’Insurgé (n°57, 5 juin 1926) d’André Colomer* approuva Schwartzbard d’avoir "écrasé comme une bête puante le Petlioura gonflé de sang", ajoutant qu’il s’agissait de "justice individuelle qui vaut bien la justice collective". Défendu notamment par maître Henry Torres, Schwartzbard, qui avait obtenu la nationalité française en 1925, fut finalement acquitté. Il se consacra par la suite aux activités de la Ligue contre les pogromes (future LICRA) qui avait été fondée à l’occasion du procès.

Cholem Schwartzbard essaya d’immigrer en Palestine mais n’obtint pas de visa. Il est mort à Capetown (Afrique du Sud) le 3 mars 1938, d’une crise cardiaque, lors d’une tournée de conférences contre l’antisémitisme.

Au début des années 1960, sa dépouille inhumée à Capetown fut transférée en Israël pour y être ensevelie.

L’écrivain chinois Ba Jin (Pa Kin) a raconté en 1932 l’histoire de Schwartzbard dans le roman Le Rêve en mer, conte pour enfants à une jeune fille (traduction de Ng Yok-Soon, Ed. L’Harmattan, 1986). Le romancier allemand Theodor Plievier écrivit en 1934 un roman sur Schwartzbard qu’il dut renoncer à publier et brûla alors qu’il était retenu en Union Soviétique en 1936-38.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article155598, notice SCHWARTZBARD ou SCHWARZBARD Cholem [dit Shoulim, Samuel] [Dictionnaire des anarchistes] par Rolf Dupuy, version mise en ligne le 27 mars 2014, dernière modification le 4 avril 2018.

Par Rolf Dupuy

ŒUVRE : Troymen un Virklikhkayt (Rêves et réalité, 1920, poésies) — In krig, mit zikh aleyn (A la guerre, avec soi-même, 1934) — In’m Loyd Fun Yorn (Au fil des ans, 1934, autobiographie). Tous ces ouvrages sont rédigés en yiddish. — Mémoires d’un anarchiste juif (présentées et préfacées par Michel Herman, Syllepse, collection Yiddishland, 2010).

SOURCES : Entretien avec L. Anderson, 27 novembre 1988 — Harry Wilde, T. Pliever, Nullpunkt der Freiheit : Biographie, Munich, 1965 — Notes d’Angel Pino et Marianne Enckell — R. Bianco, Un siècle de presse anarchiste, op. cit.

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