Par Jean Maitron, notice complétée par Rolf Dupuy
Né le 13 mai 1885 à Paris (XIVe arr.), mort le 25 avril 1955 à Lyon (Rhône) ; ouvrier relieur, peintre, chansonnier ; animateur du groupe La Muse rouge.
Fils d’un cuisinier et d’une femme de ménage devenus marchands de vins, Clovis Poirier, sous le nom de Clovys, allait acquérir une popularité certaine dans le mouvement ouvrier et libertaire par les chansons sociales dont il allait être l’auteur et l’interprète. Apprenti relieur à la sortie de l’école primaire il exerça de nombreux petits métiers dont homme de peine, triporteur, employé de commerce, peintre et mécanicien.
Dès le début des années 1910 il collaborait aux activités du groupe de chansonniers révolutionnaires La Muse Rouge où, outre ses textes, il introduisit des poésies de Gaston Couté* qu’il contribua à faire connaître. Avec Charles D’Avray*, Paul Paillette*, M. Doublier*, etc., il anima notamment les fêtes du Libertaire, de l’anarchie, de la CGT et de l’Université populaire du faubourg Saint Antoine.
Après la mort au front en avril 1916 de Doublier, il devint directeur de La Muse Rouge de 1917 à 1926. Pendant la guerre, avec les quelques camarades qui n’avaient pas été mobilisés, il s’efforça dans une semi-clandestinité de maintenir l’esprit de la Muse, notamment en allant chanter pour L’Avenir social, l’orphelinat de Madeleine Vernet*. En 1918 il travaillait comme chef de service à l’Union des coopérateurs.
Il fut le fondateur et le gérant de la première série de La Muse Rouge (Paris, 12 numéros de janvier 1922 à 1926), sous-titrée « revue de propagande révolutionnaire par les arts », où furent publiées textes et chansons d’Eugène Bizeau*, André Colomer*, Gaston Couté*, Sébastien Faure*, C. A. Laisant*, Louis Loréal*, Jules Rivet et Madeleine Vernet*. La revue était imprimée à La Fraternelle de Sébastien Faure. Elle fut suivie d’une nouvelle série (1932-1934) animée par Jean-Paul Monteil qui aurait publié treize numéros.
Clovys collabora aux fascicules Nos Chansons (Paris, au moins 20 fascicules de 1918 à 1930) publié par Coladant* sous l’égide de la Muse rouge, ainsi qu’à des journaux anarchistes dont la série quotidienne du Libertaire (1923-1925). Il participa à de nombreuses fêtes organisées par les organisations ouvrières et libertaires.
En 1922, à l’occasion du mariage du maréchal Pétain, il publia un texte intitulé Hyménée maréchalesque dont le refrain était : "Ohé les morts, les estropiés, Le maréchal Putain vient d’se marier !"
Fin 1926, suite à une maladie et sans doute aux tensions survenues dans le groupe entre libertaires et communistes, il abandonna la direction du groupe.
Après la Seconde Guerre, Clovys continua de donner de nombreux textes à la presse libertaire dont Le Combat syndicaliste, Défense de l’homme, Le Libertaire, Pensée et Action (Bruxelles), L’Unique (Orléans), La Voie de la Paix et Contre Courant au profit duquel il participa le 14 mars 1953 à un gala de soutien à la salle des sociétés savantes avec entre autres Rachel Lantier*, Léo Campion* et Paul Primert*.
Clovys, qui termina sa vie dans le dénuement à l’hospice d’Ivry, bénéficia de la solidarité d’un groupe d’entraide qui publia en sa faveur une plaquette rassemblant onze de ses meilleurs chansons et organisa un gala de solidarité le 13 février 1955. Clovys était alors hospitalisé à Debrousse où il mourut le 25 avril suivant.
Par Jean Maitron, notice complétée par Rolf Dupuy
ŒUVRE : Parmi ses poèmes et chansons : Le Droit d’asile, Je suis boy-scout, Les chansonniers de la paix tués par la guerre (1916), Zimmerwald Kienthal, Ce n’est pas en France (1917), Sur un portrait, Par la chanson, Hyménée maréchalesque (1922), Je suis la chanson, Compte là-dessus, La Voix des prisons, Nos retraites ouvrières, Lettre de Pitou, Le major Ipéca, En écoutant Sébast, Dans la jungle humaine.
SOURCES : Arch. Nat. F7/13053. — IFHS, fonds Armand — R. Bianco, Un siècle de presse anarchiste, op. cit. — Le Monde Libertaire, juin 1955. — Le Libertaire, 9 juin 1955. — R. Brécy, Autour de la Muse Rouge, op. cit.