Par Marianne Enckell
Né le 18 avril 1861 à Firminy (Loire) ; auteur d’un placard anarchiste.
Le 19 mars 1885, Gabriel Charitat, qui venait d’arriver à Genève, se rendit à l’Imprimerie jurassienne, 24 rue des Grottes, pour y faire imprimer une feuille ; comme l’imprimerie était fermée (voir Jean Grave), il en trouva une autre qui imprima 1000 feuillets et y inscrivit un nom d’imprimeur imaginaire. Cet Appel au travailleurs suisses disait notamment :
« Allons, travailleurs, réunissez-vous et révoltez-vous ! Sus aux exploiteurs ! Sus aux dirigeants ! Brûlons leurs châteaux ; emparons-nous de toutes leurs richesses, qui, après tout, sont les nôtres ; fusillons-les ; pillons-les, et rappelons-nous cette devise : Contre les tyrans tous les moyens sont bons. Mort aux tyrans qui osent se proclamer nos dirigeants ! Mort à la bourgeoisie ! Mort à tous les représentants de l’autorité ! Vive la révolution sociale ! »
Le 21 mars, Charitat distribua son appel à Lausanne puis à Berne, où il se fit repérer, puis il arriva à Fribourg où il fut arrêté et renvoyé à la police bernoise. Il avait sur lui un livret d’ouvrier à un faux nom, un exemplaire de la brochure Evolution et révolution d’Elisée Reclus*, deux numéros du journal parisien L’Audace, un agenda contenant des adresses de journaux anarchistes.
Lors de son interrogatoire, il déclara : « L’idée m’est venue de propager des placards révolutionnaires pour me faire mettre en prison, afin que je puisse apprendre un métier. » On ne lui connaissait pas de contacts avec des anarchistes en France.
L’arrestation de Charitat se produisit en plein milieu d’une enquête fédérale sur les anarchistes en Suisse, ce qui lui valut une enquête internationale, un dossier de 150 pages aux archives et un chapitre entier dans le rapport final du procureur, pour conclure que son appel n’était pas dangereux pour les autorités suisses et relevait de la simple police.
Par Marianne Enckell
SOURCES : Archives fédérales suisses, E21 14086 (pièces, photo) — Rapport sur l’enquête relative aux menées anarchistes en Suisse adressé au Conseil fédéral suisse par Edouard Müller, procureur général de la Confédération, Berne, Feuille fédérale 1885.