Par Elouan Rochcongar
Né le 12 mars 1890 à Amiens (Somme), mort le 12 octobre 1950 à Amiens ; militant anarchiste et syndicaliste amiénois, responsable du RNP et secrétaire du COSI sous l’Occupation.
Né à Amiens d’une mère ménagère et d’un père garçon de magasin, Lucien Graux suivit une scolarité primaire et décrocha son certificat d’études avant d’exercer la profession de représentant de commerce puis de faire son service militaire dans l’infanterie où il atteignit le grade de caporal. Mobilisé en 1914, il se distingua en 1918 par la prise d’une batterie de 77. Cité, à ce titre, à l’ordre de son régiment, il fut décoré de la Croix de Guerre.
Marié à Amiens le 28 juillet 1915 à Alfrède, Marthe Pigeon, commerçante en bonneterie, il s’installa à Amiens, suite à sa démobilisation en 1919 où il exerça diverses professions indépendantes : apiculteur, marchand forain et confectionneur en articles de femme. Dès lors, il milita activement dans les réseaux pacifistes et libertaires. Il fut successivement condamné en 1921 pour outrages à l’armée, à agent et distribution de brochures antimilitaristes.
Lucien Graux était, en 1922, militant au syndicat CGTU des Cuirs et peaux au sein de la tendance unitaire. Cette année-là, il remplaça Georges Bastien à la gérance de l’hebdomadaire Germinal. En 1923, il céda son poste à Georges Foulin.
S’inscrivant dans la dynamique en faveur de l’unité syndicale (voir Georges Bastien), il participa le 14 décembre 1924 à un rassemblement pour l’unité à la salle de l’Union coopérative, à Amiens.
Aux élections législatives d’avril 1928 dans la 2e circonscription d’Amiens, il fut candidat abstentionniste dans la 2e circonscription d’Amiens.
Sous l’Occupation, Lucien Graux fréquenta les réunions du Rassemblement National Populaire (RNP) de Marcel Déat, assumant une présidence de bureau avant de prendre sa carte et d’être nommé Chef départemental du Rassemblement après le limogeage de l’instituteur retraité Paul Andrieux par Georges Albertini en août 1942. Parvenu à la tête d’un parti qu’il décrira comme « désorganisé », il anima des réunions mensuelles – dont l’une dédiée à la diffusion publique du film de propagande nazie le Jeune Hitlérien Quex – et organisa le congrès départemental d’octobre 1942 à Amiens. Au cours de ses activités, il parvint à recruter quelques militants issus de la SFIO – le très actif instituteur Georges Lenglart – et des cercles corporatistes – André Devisme, président du Syndicat patronal des Garagistes de la Somme – mais il fut remplacé à la fin de l’année par l’instituteur retraité et ancien combattant socialiste Marcel Delassus. Parallèlement, par le biais des réseaux syndicalistes, il reçut, en août 1942, la visite de deux inspecteurs parisiens du Comité Ouvrier de Secours Immédiat (COSI) qui le sollicitaient pour assumer à Amiens les fonctions de secrétaire de cette officine collaborationniste officiellement chargée d’apporter une aide financière aux sinistrés suite aux bombardements alliés. Devant un public captifs, composé d’ouvriers instamment priés d’y assister, il organisa une première réunion publique dans les locaux des ateliers Auberville avant que les réunions ultérieures du bureau ne se déroulent dans ceux de la Préfecture. Financé par l’armée allemande et des subsides du gouvernement de Vichy, le groupe et Lucien Graux cessèrent toute activité en juillet 1944. Interné à la Libération, ce dernier comparut en mai 1945 devant la Chambre civique de la Somme qui le condamna à 20 ans de dégradation nationale et à la confiscation de ses biens à concurrence de 10.000 francs.
Lucien Graux n’est pas le frère de Théodore Graux.
Par Elouan Rochcongar
SOURCES : Arch. Dép. Somme, 26 W 821 (Cabinet du Préfet), 26 W 169 (RNP, Front corporatiste, Légion tricolore, MSR), 965 W 1 (Cour régionale de Justice), 1 R 1019 (Registres de matricules militaires), M90366. — René Bianco, Cent ans de presse, op. cit.— Renaud Quillet, La Gauche dans la Somme, Encrage, 2009. — Notes de Renaud Quillet. — État-civil d’Amiens. — Notice de Guillaume Davranche et Rolf Dupuy dans le dictionnaire des Anarchistes et le DBMOF.