LAMBIN Auguste [dit Beaumanoir] [Dictionnaire des anarchistes]

Par Dominique Petit

Né le 3 mars 1883 à Saint-Gilles (Marne), mort le 3 avril 1959 à Créteil (Seine) ; garçon de laboratoire en pharmacie ; propagandiste par le fait à Troyes, Paris et Liège.

Auguste Lambin, Paul Gudefin et Modeste Boutet, condamnés pour l’attentat à la Montagne Sainte-Warburge à Liège en 1904.

Lambin arriva à Troyes en 1899, il travailla dans une fabrique de bonneterie, puis chez un pharmacien comme garçon de laboratoire. Il suivait assidûment les cours de chimie et se rendait fréquemment à la bibliothèque municipale où il ne demandait que des ouvrages traitant des matières explosibles.

Le 12 juin 1900, il fut condamné par le tribunal correctionnel de Troyes à 6 mois de prison, avec sursis, pour vol et détention d’explosifs.

Le 12 août 1901, une bombe explosa près de l’autel de l’église Saint-Nizier, un quartier populaire de Troyes. Bien que le curé fût occupé à faire le catéchisme à une quinzaine d’enfants, personne ne fut blessé. La chaire, les bancs, les vitraux, un confessionnal furent renversés et brisés.

Une perquisition fut faite au domicile de Lambin et d’un de ses amis, Felipe Franquet ou Villanueva, de nationalité espagnole ; la police y trouva des matières explosibles mais l’instruction ne put démontrer la participation des inculpés à l’attentat. Lors du procès devant le tribunal correctionnel, Lambin refusa la défense d’un avocat et déclara que lui seul était capable de fabriquer la bombe, dans le but de disculper son co-accusé, mais il nia être l’auteur de l’attentat.
Lambin fut condamné le 10 décembre 1901 à 18 mois de prison pour détention de matières explosibles et Franquet fut acquitté.

Le 6 juillet 1903, Lambin sortit de la prison cellulaire de Chaumont (Haute-Marne) après avoir purgé ses deux peines de 6 et 18 mois (le sursis étant tombé). Après être passé voir ses parents à Reims, il partit sur Paris pour chercher du travail. Il vint habiter sous un faux nom dans le quartier de Belleville.

Le 18 mai 1903, une bagarre éclata à l’église de Belleville entre partisans de la Libre pensée et des congrégations religieuses. Un ancien jésuite devait y prêcher, ce qu’une circulaire du 11 avril 1903 interdisait. Plusieurs manifestants furent blessés.

Le 31 octobre 1903, une bombe explosait dans l’église, placée sur le tronc, parmi les débris figuraient des fragments du Libertaire. Une petite étiquette était fixée sur la colonne : "Premier avertissement".

Le 14 novembre 1903, Lambin fut arrêté à Cherbourg lors d’un contrôle effectué à l’occasion de la venue des souverains d’Italie. Il fut transféré à Paris et inculpé dans l’affaire de l’attentat de l’église de Belleville. Bien que les bombes de Troyes et de Belleville fussent de fabrication identique (dites à renversement), le juge d’instruction ne put prouver la participation de Lambin à l’attentat et l’affaire se termina par un non-lieu le 9 décembre 1903. Lambin n’hésita pas à déclarer au juge : "Mes idées anarchistes me portaient à étudier principalement les acides explosifs. Mais de là aux actes, il y a loin..."

Dans la nuit du 17 mars 1904, une boîte fut découverte à Liège, près de la maison du commissaire de police Laurent. Le commandant d’artillerie Papin, venu la désamorcer, ordonna de la transporter dans un terrain vague ; c’est là que l’explosion se produisit, blessant mortellement le commandant et six autres personnes. Le 22 mars, un nouvel attentat se produisit à Saint Nicolas lez Liège. Une bombe était découverte sur la fenêtre de M. Binet, commissaire de police ; cette fois on immergea la bombe pour la faire exploser et elle ne causa que quelques bris de vitres.

Le 23 mars, Lambin fut arrêté dans la salle des pas perdus de la poste centrale, en compagnie de Gudefin*, un autre Français. Il était entré en Belgique sous le nom de Bouché*, qui était alors le compagnon de sa soeur Célina Lambin*. Dans la valise de Lambin la police découvrit des coupures du journal le Matin rapportant l’attentat contre l’église de Belleville, un traité de chimie et des discours d’Emile Henry*. Dans leur chambre, on trouva un cahier sur lequel étaient inscrites des formules pour la fabrication des bombes.

Lambin fut confondu à cause de son écriture : en effet il avait envoyé au journal la Meuse, après le premier attentat, une lettre mençant d’en commettre un autre, si Thonar*, anarchiste belge, arrêté et soupçonné, n’était pas relaché immédiatement.

Lors du procès devant les assises de Liège, il ne reconnut que sa participation au deuxième attentat. Il fut condamné à mort, ainsi que Gudefin, peine commuée en travaux forcés à perpétuité, la Belgique n’appliquant plus la peine de mort.

Il put toutefois rentrer en France puisqu’il se maria en 1929 à Bourges et finit sa vie à Créteil.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article156746, notice LAMBIN Auguste [dit Beaumanoir] [Dictionnaire des anarchistes] par Dominique Petit, version mise en ligne le 24 février 2014, dernière modification le 14 avril 2020.

Par Dominique Petit

Auguste Lambin, Paul Gudefin et Modeste Boutet, condamnés pour l’attentat à la Montagne Sainte-Warburge à Liège en 1904.

SOURCES : Arch. Dép. Marne 30 M 107— Le Petit Parisien—Le Matin—Le Journal des débats—Le Figaro consultés sur Gallica. — Etat civil.
ICONOGRAPHIE : deux cartes postales sur http://cartoliste.ficedl.info/ et portrait dans le Matin du 24 mars 1904, Gallica.

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