Par Annie Pennetier
Née le 29 octobre 1907 à Harnes (Pas-de-Calais), guillotinée le 18 janvier 1943 à Cologne (Allemagne) ; militante communiste ; résistante.
Officiellement fille d’Anatole-François Wantiez, ouvrier mineur (en fait d’Émile Beudot mais sa mère n’avait pas divorcé), et de Marie, Catherine Dedourges, ménagère, Émilienne Mopty s’était mariée le 30 mai 1925 à Montigny-en-Gohelle (Pas-de-Calais) avec Adrien Mopty, mineur, le couple avait trois enfants. Domiciliée à la cité du Dahomey, elle fut une militante communiste active de Montigny-en-Gohelle s’illustrant pendant les grèves de 1933-1934.
La grève de mai-juin 1941 commença à la fosse 7-7 bis de la Compagnie des mines de Dourges à Montigny. Émilienne Mopty entraîna les femmes à manifester en solidarité avec les mineurs. Elles barrèrent des routes pour empêcher le passage des voitures de police et des automitrailleuses allemandes. La grève s’étendit à l’ensemble du bassin minier.
Émilienne Mopty fut arrêtée mais la police n’ayant que sa participation aux manifestations et des présomptions sur son appartenance à la résistance, elle fut libérée et retrouva ses trois enfants. De nouveau arrêtée le 14 mai 1942, elle s’échappa de la caserne de la gendarmerie en passant par la lucarne des toilettes.
La presse collaboratrice Écho du Nord, Réveil du Nord et La Dépêche, publia trois photos surmontées du titre « avis de recherche », celles de Moïse Boulanger de Germinal Beudot mineurs à Harnes et celle d’Émilienne. Dans le clandestinité, elle logeait notamment chez Julien Bauduin.
Son mari, Adrien Mopty, avait été arrêté et son fils ainé âgé de seize ans avait rejoint les combattants clandestins. La tante Églantine avait recueilli leurs deux fils cadets.
Agent de liaison d’un des chefs de la résistance FTPF dans le bassin minier, Charles Debarge, elle transporta des armes et des explosifs et chercha des planques pour les résistants. Elle fut arrêtée par la gendarmerie française d’Arras le 16 septembre 1942, alors qu’avec son groupe elle envisageait d’attaquer un peloton d’exécution près de la citadelle d’Arras.
Torturée, traduite devant le tribunal de la Feldkommandantur d’Arras, elle fut condamnée à mort. Les Allemands n’exécutant pas les femmes en France, elle fut déportée le 12 janvier 1943, comme « Nacht und Nebel » (convois de la liste I.76). Elle fut d’abord dirigée vers la prison de Bruxelles puis celle de Cologne. Elle y fut guillotinée le 18 janvier 1943.
Moïse Boulanger avait été fusillé le 3 novembre 1942, Germinal Beudot le 28 octobre 1942 et Julien Bauduin le 31 octobre 1942, tous trois à Arras.
Son mari, Adrien Mopty, fut interné à la prison de Bruxelles puis déporté à la citadelle de Huy ( Belgique) et au camp de Vught (Pays-Bas), dans deux de ses commandos puis en Allemagne à Sachsenhausen et à Neuengamme dont il fut libéré le 2 mai 1945.
Quand le corps d’Émilienne fut rapatrié à Hénin-Liétard en 1948, année de la grande grève des mineurs, ses fils étaient incarcérés à la prison de Béthune.
Son destin tragique a valu à Émilienne Mopty d’être une personnalité du bassin minier.
Son nom est inscrit sur le monument aux morts d’Harnes et sur les stèles de Montigny-en-Gohelle et Villeparisis (Seine-et-Marne). Cette dernière a été apposée en « hommage aux résistants dont les noms furent effacés des plaques de nos rues le 5 juin 1986 » (résistants communistes).
Le 3 juin 2012, le Front de gauche organisa à Montigny-en-Gohelle une marche en son souvenir, qui réunit six mille personnes. Jean-Luc Mélenchon, candidat aux élections législatives de 2012 dans la onzième circonscription du Pas-de-Calais, se disait inspiré par son « esprit de résistance et de fraternité ».
Par Annie Pennetier
SOURCES : Arch. Musée de la Résistance nationale. — Sites Internet : Mémorial GenWeb. — Jean-Marie Fossier Zone interdite Nord-Pas-de-Calais, mai 1940-mai 1945, Paris, Éditions sociales, 1977, 780 p . — Archives Départementales du Nord, 1874 W 143 (dossier 4509), notes de Francis Calvet, B.M.O.I (Lille). — État civil.