OUSSEDIK Omar [Dictionnaire Algérie]

Par René Gallissot

Né en 1920 à Michelet (Aïn-el-Hammam) ; militant du PPA clandestin et des AML, membre du Comité central du MTLD ; emprisonné puis en exil en France ; après le PCA peut-être en 1953, entré au FLN en 1955 ; commandant dans la Wilaya 4 ; secrétaire d’État dans le premier GPRA en 1958 ; en 1962, redéploie la zone autonome FLN/ALN d’Alger.

La famille Oussedik est une grande famille maraboutique qui élargit le placement de ses enfants par la voie de la scolarisation française, comme son frère aîné Tahar qui sera instituteur, syndicaliste de l’enseignement et fera célébration d’histoire de la Kabylie, Omar Oussedik entre à l’École normale de la Bouzaréah. Il poursuit ensuite son secondaire au lycée de Ben Aknoun à Alger où les élèves de Kabylie se regroupent associant nationalisme algérien et attachement à l’honneur de fidélité kabyle. Dès 1943, il participe aux campagnes des Amis du Manifeste (AML) et devient militant du PPA clandestin. Il est en Kabylie en mai 1945 ; il dit avoir transmis l’ordre de soulèvement dans le massif entre Dellys et Tigzirt les 20 et 22 mai, avant les contrordres des jours suivants. Au congrès du MTLD de février 1947, il soutient le projet de préparer l’insurrection armée par la constitution d’une Organisation spéciale dont H.Aït-Ahmed* établit la plateforme et la mise en place. Il entre au Comité central du MTLD..

Quand sévit « la crise berbériste » qui exclut du MTLD, plusieurs de ses anciens camarades du pays et d’études, il se trouve hors de combat ; il est en effet arrêté à Alger en 1948 et enfermé à la prison de Blida jusqu’en 1951, en ayant subi la torture. Certes il été compris dans les exclusions du PPA-MTLD mais sans être marqué et pourchassé comme activiste majeur du berbérisme. Après sa sortie de prison, il vit en France, travaillant en région parisienne, y compris en usine, militant de la CGT, se donnant une formation politique qui le fera par la suite traité de « marxiste ». En 1953, comme d’autres jeunes intellectuels acquis aux idées sociales et progressistes et à une conception d’une Algérie algérienne qui soit la nation des Algériens de toutes origines, notamment Sadek Hadjerès* et A. Benzine*, il serait passé au PCA. Ceux-ci y demeurent ; selon la formule de Gilbert Meynier, Omar Oussedik se contente d’ « un tour de valse ». Il n’en sera pas moins toujours soupçonné d’entretenir des « sympathies communistes ». Il rejoint le FLN en 1955.

Au maquis de la Wilaya 4 dans l’Algérois qu’il choisit pour éviter de se retrouver en pays kabyle (Wilaya 3), il monte en grade et devient en 1957 commandant chargé des Liaisons et communications. Tout en se démarquant des suspicions de communisme et de marxisme, il doit assurer l’intégration des maquisards communistes venant des Combattants de la libération, et des lycéens et étudiants frottés de progressisme. Dans les quelques numéros de Révolution, le journal de la Wilaya, on parle de lutte de libération contre l’impérialisme sans mention d’arabo-islamisme. Aussi Omar Oussedik, déjà suspect parce qu’il vit au maquis avec son épouse qui est infirmière, est pris dans la tourmente de l’espionnite qui gagne la Wilaya et même le colonel Si M’hamed (Hamed Bouguerra*), excite les réflexes populistes des petits contre les intellectuels francisés et ouvre le temps des purges de 1957 à 1958. À chaque discours du général De Gaulle qu’Omar Oussedik interprête en changement d’orientation de la politique française, la méfiance grandit ; on se situe cependant bien avant l’affaire Si Salah. Il est aussi accusé d’être sensible au gaullisme et de pousser à la négociation.

Il a peut-être été sauvé du pire en étant appelé à Tunis par Krim Belkacem ; il devient Secrétaire d’État dans le premier GPRA de 1958. En mars 1959, il fait partie de la mission en Chine pour négocier contrat d’armes et soutien, puis à Hanoï pour marquer la solidarité des luttes de libération. C’est pour ses idées qu’il est nommé en 1960 chef de mission en Guinée auprès de Sekou Touré, précédant M.Harbi à Conakry. Simple membre du CNRA en 1961-1962, il apparaît comme un des plus opiniâtres opposants aux grandes manoeuvres de l’Etat-major général autour des colonels Ali Mendjli et Boumedienne.

Aussitôt après les accords d’Evian, il entre dans le projet de Krim Belkacem de contrer la montée en puissance du Commandant Hassan (Youcef Khatib) dans la Wilaya 4, en reconstituant la Zône autonome d’Alger. Cherchant à entraîner M.Harbi*, il va jusqu’à lui faire valoir la science marxiste de son partenaire, le commandant Azzedine (Rabah Zerrari) : « L’avenir se joue à l’intérieur, argumente Omar Oussedik ; j’ai trouvé une filière pour entrer en Algérie...veux-tu être des nôtres ? Azzedine est un homme sûr. Il pense comme nous. Il a lu Le Capital ». « Sacré Omar ! reprend Mohammed Harbi. La manipulation lui collait à la peau. Je suis parti d’un grand éclat de rire, il a compris ma réaction et fait de même ». M.Harbi refuse de rentrer avec la fausse vraie carte d’identité française qu’Omar Oussedik lui procure.

Dans ses mémoires, celui-ci reconnaît que les commandants Azzedine et Oussedik à la tête de la Zone autonome d’Alger « ont réussi à préparer la population algéroise à faire face à la terreur de l’OAS. Mais ils ont également accrédité la rumeur d’une collusion entre l’Algérie et la France contre l’armée de l’extérieur ». Il faut aussi porter au crédit d’Omar Oussedik à travers la Zone autonome, d’avoir assuré dans le chaos d’Alger, le fonctionnement d’un Service social et de santé et soutenu la reconstitution de l’UGTA sous le mandat attribué depuis Tunis à un trio de direction disponible et actif sur place, formé de Rabah Djermane*, Boualem Bourouiba* et Mustapha Lassel*, dernier feu d’un syndicalisme autonome. Entré aux Affaires étrangères dès la fin de 1962, Omar Oussedik sera ambassadeur d’Algérie à Sofia, Moscou, New Delhi et Rome.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article157304, notice OUSSEDIK Omar [Dictionnaire Algérie] par René Gallissot, version mise en ligne le 3 mars 2014, dernière modification le 3 mars 2014.

Par René Gallissot

SOURCES : B. Stora, Dictionnaire biographique des militants nationalistes algériens, op .cit. — B. Bourouiba, Les syndicalistes algériens, op.cit. — M. Harbi, Une vie debout. Mémoires politiques. Tome 1 : 1945-1962. La Découverte, Paris, 2001. –G. Meynier, Histoire intérieure du FLN.1954-1962. Fayard, Paris, 2002.

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