PERCEVAL Albert, Charles, André

Par Alain Dalançon

Né le 24 août 1900 à Morestel (Isère), mort le 14 juillet 1974 à La Tronche (Isère) ; professeur ; militant socialiste, franc-maçon ; militant syndicaliste, membre du bureau national du SNEPS puis du SNCM puis du SNES, secrétaire de la section académique de Grenoble du SNES ; militant mutualiste, fondateur de la MGEN, président de la commission de contrôle.

Photo du début des années 1920 (coll. familiale)
Photo du début des années 1920 (coll. familiale)

Fils d’un gendarme, Albert Perceval fréquenta l’école communale de Sermérieu (canton de Morestel) avant d’être élève à l’école primaire supérieure de l’arrondissement, à La Tour-du-Pin (Isère), où il prépara le concours d’entrée à l’École normale d’instituteurs de Grenoble (Isère), qu’il réussit en 1916. Elève-maître de la promotion 1916-1919, il obtint le brevet supérieur en 1918 puis bénéficia de deux années complémentaires d’études à l’ENI pour préparer les concours. Il suivit les cours de l’Institut des études commerciales de Grenoble, dont il obtint le diplôme en 1921.

Après son service militaire effectué en 1922-1923, il fut affecté comme instituteur aux Avenières, dans le canton de Morestel, d’octobre 1923 à 1927. Il épousa le 28 juillet 1924 une institutrice avec laquelle il eut deux filles. Il était alors adhérent du Syndicat national des instituteurs.

Tout en faisant la classe, il prépara le certificat d’aptitude à l’enseignement commercial dans les écoles primaires supérieures, obtint la première partie en 1924 et la seconde en 1925, ce qui lui permit d’être nommé professeur adjoint à l’école pratique de commerce et d’industrie de Nevers (Nièvre) en 1927, puis d’être titularisé professeur à l’EPS de La Tour-du-Pin en 1928. En 1932, il enseignait aussi l’Italien et l’Histoire et, l’enseignement commercial ayant disparu de son établissement, il enseigna en 1934 le Français à titre provisoire puis définitif.

Adhérent du Parti socialiste SFIO depuis 1918, Albert Perceval était resté fidèle à la « vieille maison » et à la CGT, en tant qu’adhérent du SNI puis du nouveau Syndicat national des fonctionnaires des EPS et professionnelles, affilié à la Fédération générale de l’enseignement et à la Fédération générale des fonctionnaires. Il était en outre franc-maçon, adhérent de la Grande Loge de France. Le 12 février 1934, il fut gréviste ; à la rentrée scolaire suivante, il devint secrétaire de la section départementale de l’Isère du SNEPS avec Charles Perrier pour adjoint, tout en étant également secrétaire de la section départementale de la FGE. Il apporta aussi, avec son camarade Alix Berthet, secrétaire de la section départementale du SNI, futur résistant et député socialiste, son soutien aux ouvriers grévistes en 1936 et 1937. Il s’affirma dans les débats des congrès nationaux du SNEPS et fut élu en 1937 membre de sa commission administrative et du bureau national, co-secrétaire de la commission corporative et membre de la commission de la défense laïque.

Dans la mesure où existait dans le syndicat une forte tendance au repliement corporatiste, il demanda à la réunion de la CA du 13 avril 1938, que le rapport moral soit complété par un rapport d’orientation syndicale et fut chargé de le présenter au congrès suivant. À cause de ses compétences en comptabilité, il remplaça à la rentrée 1938 Marie Laroche, démissionnaire en raison de sa promotion à une direction d’EPS, comme trésorier national et gérant de la caisse de solidarité.

Lors de la réunion de la CA du 27 novembre 1938, il s’opposa avec quelques autres (René Dupas, Jean-Baptiste Galletti, Henri Maunoury…) au nouveau secrétaire général, Gustave Pacquez, qui était hostile à l’appel à la grève du 30 novembre pourtant lancé par la confédération et repris par la FGE. Pour lui, il n’était pas possible que le syndicat fasse « acte d’indiscipline » vis-à-vis de sa fédération. Il participa néanmoins à la rédaction d’une motion de conciliation dans laquelle la CA demandait au personnel de « se conformer dans la mesure du possible aux instructions de la FGE, la surveillance des élèves étant en tout cas assurée ». À titre personnel il participa à la grève, malgré les pressions exercées par son directeur et l’inspecteur d’académie, et fut sanctionné (le syndicat versa au total 25 512 F aux 75 sanctionnés).

Ces épisodes montraient l’importance des questions d’orientation syndicale, objet du long rapport que Perceval présenta aux syndiqués dans le bulletin du SNEPS de janvier 1939. À la suite de débats serrés, il réussit à faire largement adopter par le congrès dans sa séance du 3 avril 1939 : le maintien du Syndicat au « mouvement syndical de la CGT défini par la charte d’Amiens et le congrès de Toulouse », et par conséquent à la FGE et à la FGF ; la réaffirmation de l’indépendance syndicale condamnant « l’existence de fractions organisées portant atteinte au libre exercice de la démocratie syndicale ». La discussion fut plus difficile au sujet du mot d’ordre de grève générale qui ne pourrait être lancé par la CA, sans avoir procédé auparavant à un référendum organisé dans les départements et ayant obtenu la majorité des 2/3 des votants.

Mobilisé comme capitaine d’artillerie en septembre 1939, Albert Perceval participa aux campagnes de Belgique et de France. Dès avril 1940, un médecin, qui se présentait comme « le porte-parole de 500 personnes », demanda au recteur son déplacement. Saisi, le préfet, indiquait qu’il faisait aussi, en dehors de son enseignement, des expertises et de la comptabilité pour divers commerçants ‒ ce qui était réglementairement permis et que Perceval reconnaissait. En 1941, il fut rayé de la liste des experts comptables agréés.

Sa réputation de militant socialiste et syndicaliste, gréviste en 1938, et son appartenance à la franc-maçonnerie – dont il dit avoir démissionné en janvier 1940, selon sa déclaration du 22 juillet 1941 ‒ entraînèrent sa mutation d’office, le 11 novembre 1940, à l’EPS de Brignoles (Var). Perceval réussit à obtenir d’être déplacé un peu moins loin, à l’EPS de L’Isle-sur-Sorgue (Vaucluse), mais il resta séparé de son épouse restée institutrice à La Tour-du-Pin. Celle-ci fut déplacée l’année suivante dans l’école d’un hameau de Gordes (Vaucluse) à une quinzaine de km de son établissement. Le 29 juin 1942, l’ancien dirigeant du SNEPS écrivit à l’inspection générale pour demander à bénéficier de la circulaire du 18 mai 1942 permettant le replacement dans le département d’origine. Mais il fut déplacé un peu plus loin à la rentrée d’octobre 1942, à l’EPS de Gap (Hautes-Alpes), devenue collège moderne.

Dès le 3 octobre 1944, Albert Perceval demanda sa réintégration à La Tour-du-Pin qu’il obtint au mois de novembre. Toutefois, de janvier à septembre 1945, il fut mis à la disposition du directeur de l’association de l’enseignement professionnel et post-scolaire, puis il obtint sa mutation en octobre 1945 comme professeur au collège moderne de Grenoble (Isère), tandis que son épouse était nommée institutrice dans la même ville à l’école de la rue Nicolas Charier. La famille résida alors 26, rue Condorcet. Un moment chargé d’enseigner dans la classe de seconde préparant le concours d’entrée à l’ENI, il fut aussi chargé d’« équipe nouvelle » en 1951. Il demeura en poste dans ce collège, qui devint lycée, jusqu’à sa retraite en 1962.

Tout naturellement, Albert Perceval retrouva en 1945 ses responsabilités syndicales, qui s’élargirent même et en firent un des militants (ex-confédérés) les plus en vue dans l’académie et au plan national. Il fréquenta la loge maçonnique de Grenoble et en devint adjoint au Grand Maître. Il retrouva ses fonctions dans la direction du nouveau Syndicat national des collèges modernes : membre du bureau national et trésorier, bientôt chargé en outre des relations avec les sections départementales. Il fut aussi désigné par son syndicat en 1946 pour faire partie du Comité consultatif, en attendant la mise en place des commissions administratives paritaires. En même temps, l’ancien responsable de la FGE entra au bureau du Syndicat départemental de la fédération qui venait de changer de nom pour devenir Fédération de l’Éducation nationale ; il fut également élu la même année à la CA nationale de la FEN, notamment en raison de ses compétences en matière de retraites et de sécurité sociale. Il avait en effet toujours été favorable au développement du mouvement mutualiste mais sans s’impliquer vraiment dans celui de la mutuelle spécifique aux personnels du second degré, chère à l’ancien secrétaire général du SNEPS, Alcée Marseillan. Il persévéra après la guerre en poussant, contre l’avis de Marseillan, à l’adhésion de tous les personnels de l’Éducation nationale à la même mutuelle, la Mutuelle générale de l’Éducation nationale, dont il fut un des fondateurs : il présida d’ailleurs la section de l’Isère de 1946 à 1966 et la commission de contrôle nationale de 1946 à sa mort en 1974.

Dans les débats sur les structures syndicales en 1946, il fut partisan de conserver la FGF, de donner de l’importance aux syndicats départementaux en s’appuyant sur le cas de l’Isère où il n’y avait pas de problèmes entre les instituteurs et les autres personnels. Par la suite, il se rallia à la transformation des syndicats départementaux en sections départementales de la FEN et assura le secrétariat de celle de l’Isère de 1947 à 1949.

Il fit également partie de la commission chargée de préparer la fusion entre les syndicats du second degré et fut rapporteur de cette question au congrès du SNCM de 1946. Il était partisan de cette fusion mais, comme la majorité de ses camarades, estimait que l’intégration du syndicat des centres d’apprentissage dans le syndicat unique n’était pas immédiatement possible. Il n’en resta pas moins trésorier adjoint de l’Union des syndicats du second degré et secrétaire chargé de la sécurité sociale et des retraites jusqu’en 1948.

Albert Perceval cessa son adhésion à la SFIO en 1947 et, dans le débat sur le choix de l’affiliation à la suite de la scission de Force ouvrière, il se prononça pour l’autonomie dans un vibrant plaidoyer publié dans le bulletin du SNCM. Refusant de choisir entre « le bloc monolithique de la CGT » et « la scission et ses nouveaux prophètes » des dissidents de FO, il militait pour l’autonomie, seule voie pour créer le « climat de fraternité ouvrière et restaurer le véritable esprit révolutionnaire » et déboucher sur une « nouvelle unité syndicale », fondée sur une « large union ouvrière et l’unité du corps enseignant ».

Sur ces bases, il resta membre suppléant de la CA de la FEN en 1948 au titre des syndicats départementaux pour le courant « autonome ». En 1949, après la fusion entre le Syndicat national de l’enseignement secondaire et le SNCM, il devint membre du BN du nouveau SNES (classique, moderne) et trésorier national adjoint. Régulièrement réélu sur la liste « A » à la CA nationale jusqu’en 1960, il eut la responsabilité du secrétariat de la commission des affaires sociales (sécurité sociale et retraites) de 1950 à 1962. En même temps il assuma le secrétariat de la section académique de Grenoble du SNES de 1950 à 1956, date à laquelle Maurice Duny, agrégé de grammaire au lycée Champollion, le remplaça. Il fut également élu suppléant à la commission administrative paritaire nationale des professeurs certifiés en 1948, 1952, puis titulaire en 1955 jusqu’en 1958.

Après sa retraite, il s’occupa de la section de Grenoble du Groupement des retraités de l’enseignement secondaire et poursuivit surtout son militantisme à la MGEN. Il accepta la Légion d’honneur en 1954 décernée par le ministère du Travail.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article157312, notice PERCEVAL Albert, Charles, André par Alain Dalançon , version mise en ligne le 5 mars 2014, dernière modification le 29 avril 2016.

Par Alain Dalançon

Photo du début des années 1920 (coll. familiale)
Photo du début des années 1920 (coll. familiale)
Perceval à droite avec le béret au congrès national du SNES à Besançon en 1954 (© IRHSES)
Perceval à droite avec le béret au congrès national du SNES à Besançon en 1954 (© IRHSES)

SOURCES : Arch. Nat., F17/28034. — Arch. IRHSES (dont Bulletins du SNEPS et du SNCM, L’Enseignement public, L’Université syndicaliste, nécrologie par Pierre Dhombres dans L’US-infos (n°2 du 25/09/1974). — Arch. mun. de La Tour-du-Pin (listes électorales). — Marianne Blanchard, Socio-histoire d’une entreprise éducative. Le développement des Écoles supérieures de commerce en France (fin du XIXe siècle-2010), thèse de l’EHESS, oct. 2012, p. 127. — Documentation MGEN, notice de René Crozet. — Informations fournies par l’une des filles de l’intéressé. — Notes de Jacques Girault.

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