Par Jean Maitron, notice revue par Guillaume Davranche
Né le 20 novembre 1874 au Havre (Seine-Inférieure, Seine-Maritime) ; métreur puis architecte ; anarchiste et pédagogue.
Sous le nom de Léon Clément, Victor Camus fut, avec Sébastien Faure ou Paul Robin, un des principaux pédagogues libertaires des années 1900-1910.
Signalé pour la première fois à la préfecture de police en mai 1900, il s’était installé à Paris vers février 1899 pour travailler dans une entreprise de pavage. Lecteur de L’Aurore et des Temps nouveaux, il s’intéressa dès le début aux idées pédagogiques de Paul Robin. Ami intime du pédagogue anarchiste Papillon, Léon Clément fréquentait les réunions libertaires de la Bibliothèque du 26, rue Titon, à Paris 11e, et les universités populaires où il prenait souvent la parole.
En juin 1902, il cofonda un groupe « néocoopératiste » pour la création de coopératives de production à base communiste. L’adresse du groupe était son domicile : 179, rue Michel-Bizot, à Paris 12e.
Par la suite, militant de l’Association internationale antimilitariste (AIA), Léon Clément écrivit dans l’éphémère journal anarchiste parisien Le Pétard, en avril 1904.
Clément fut le fondateur de l’École libertaire, qui recevait en 1905 une douzaine d’enfants de 8 à 12 ans, tous les soirs, 22, rue du Rendez-vous à Paris 12e. Il y donnait notamment des cours de musique et de violoncelle. La section de l’AIA du 12e arrondissement, à laquelle il appartenait, y avait son siège.
Le 15 novembre 1905, il signa Léon Clément la fameuse affiche rouge de l’AIA (voir Roger Sadrin), ce qui lui valut une condamnation à un an de prison et 100 francs d’amende le 30 décembre. Il fut écroué le 7 février 1906, mis en liberté conditionnelle le 23 juin et amnistié à l’occasion du 14 juillet 1906.
Le 16 juillet 1906, à peine libéré, Léon Clément proposa à l’Union des syndicats de la Seine de créer une chorale pour les enfants des syndiqués, qui prit forme l’année suivante. Entre 1907 et 1908, celle-ci réunit entre 30 et 40 enfants. Elle répétait à la bourse du travail et participa parfois à des manifestations syndicales, notamment en novembre 1908, à l’occasion de la libération des militants de la CGT emprisonnés après les événements de Draveil-Vigneux.
Il écrivit à l’époque dans L’Ordre, organe anarchiste-communiste de Limoges, dans le Bulletin de la Ruche, pensionnat libertaire fondé par Sébastien Faure et dans Le Réveil typographique, organe de la minorité révolutionnaire de la Fédération du livre CGT.
Pour le congrès anarchiste international d’Amsterdam, en août 1907, il rédigea un rapport sur « l’éducation intégrale de l’enfance ». Absent du congrès, c’est René de Marmande qui présenta son rapport.
Léon Clément s’était marié le 17 août 1906 à Paris avec Gabrielle Darde, dont il divorça dès le 25 novembre 1907. À partir d’octobre 1907, il vécut au 34, rue Suffren, à Paris 15e avec sa compagne Louise Kérinois, vendeuse. L’année suivante, le 27 juin 1908, il épousa Mélanie Leblond.
La police l’arrêta le 7 octobre 1909 pendant la campagne pour la libération de Francisco Ferrer. Elle le tenait alors, à cette période, pour professeur d’esperanto au Groupe libertaire espérantiste.
Léon Clément participa à la campagne antiparlementaire du printemps 1910 (voir Jules Grandjouan) dans les 11e et 12e arrondissements de Paris. Il fut ensuite un des animateurs de la Ligue ouvrière de protection de l’enfance et fut un des créateurs des Petits Bonshommes, bimensuel illustré édité par la Ligue. C’est lui lança l’appel à souscription dans La Voix du peuple n°509 du 26 juin 1910. La revue, dont le n°1 parut le 15 janvier 1911, disparut au cours de la guerre de 1914-1918. Le titre fut repris en 1921-1923 par des instituteurs parisiens.
Sa fille, Jeanne, naquit le 10 août 1910.
En 1912, Léon Clément était architecte et s’était associé avec Marius Serviat. Il était membre du syndicat des dessinateurs architectes. Depuis 1911, il habitait au 7, avenue de la Sœur-Rosalie, à Paris 13e. Son cabinet d’architecte était au n°9, et travaillait régulièrement pour l’hospice de Bicêtre. En 1913, c’est à lui que l’Union des syndicats de la Seine aurait confié son projet de construction de bureaux dans la cour de l’immeuble confédéral, impasse de la Grange-aux-Belles.
Croyant qu’il avait cessé ses activités anarchistes, la police le raya du carnet B le 9 février 1912, puis se rendit compte dès le mois de juin de son erreur.
En août 1913, il n’assista pas au congrès anarchiste national mais rédigea un rapport sur l’éducation qui y fut lu et largement approuvé.
Mobilisé en août 1914 au 24e régiment territorial d’infanterie, il fut réformé en 1915. Il assista, en juillet 1917, aux réunions de l’Union fédérative de transformation sociale créée par Mezzara. En 1918, il collabora à la revue pacifiste libertaire L’Avenir international.
En 1919, Léon Clément travaillait à la coopérative L’Association des ouvriers en instruments de précision et était membre du syndicat des dessinateurs et architectes du Bâtiment.
En 1923, il fit l’objet d’une dénonciation comme espion à la solde de l’Allemagne. En fait, il n’avait plus d’activité politique en dehors de quelques réunions syndicales. La reconstruction des régions dévastées par la guerre lui donnait du travail.
Dans les années 1920, il collabora à La Revue internationale anarchiste, à L’Encyclopédie anarchiste et la Bibliothèque de l’artistocratie de Lacaze-Duthiers.
Sous son nom de Victor Camus, il fut président du Comité des loisirs de la région parisienne fondé le 30 juin 1931, constitué sous le patronage de la Fédération nationale des coopératives de consommation. Le Comité, qui regroupait environ 950 adhérents, proposait des loisirs populaires. Il était également, à ce moment-là, président du conseil d’administration de l’Union des jeunesses maçonniques dite « Clarté », qui siégeait au 7, rue des Saulniers, à Paris IXe.
Par Jean Maitron, notice revue par Guillaume Davranche
ŒUVRE : L’Éducation de l’enfant, brochure, 8 p., s.d.
SOURCES : Arch. Nat. F7/13053 et F7/13015, rapport du 22 mars 1919 ― Arch PPo GA/C20. ― René Bianco, Cent ans de presse, op. cit. ― Le Libertaire du 23 août 1913 ; ― Notes d’Anthony Lorry.