FEFERMAN Mordka (Maurice) alias Louis

Par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason

Né le 19 décembre 1921 à Varsovie (Pologne), mort par suicide le 9 mai 1942 à Paris (IVe arr.) ; fourreur, ouvrier monteur ; militant communiste ; résistant ; membre des FTP-MOI.

Plaque commémorative (Paris, IVe arr.)
Plaque commémorative (Paris, IVe arr.)
MémorialGenWeb

Fils de Joseph et de Paulette née Fukerman, Mordka était de nationalité polonaise. Il demeura chez ses parents au 12 rue Poulet à Paris (XVIIIe arr.), jusqu’en 1940. Ouvrier monteur, il travailla dans l’aéronautique chez Hispano-Suiza rue Guynemer à Bois-Colombes (Seine, Hauts-de-Seine). Dès septembre 1940, il entra dans un groupe de résistants et quitta le domicile familial.
Il fut interpellé par la police française le 25 septembre 1940 pour infraction à l’ordonnance allemande du 20 juin 1940 concernant l’affichage des tracts communistes. Mis à la disposition des autorités allemandes, il a été condamné à trois mois de prison et fut interné au camp de Pithiviers, il s’en évada.
Le 2 novembre 1941 avec Maurice Feld, il attaqua un médecin auxiliaire allemand, boulevard Magenta à Paris. Le même mois, à Saint-Maximin dans l’Oise, il s’empara de 30 kilogrammes d’explosifs dans une carrière.
Le 14 décembre 1941 à 7 heures 15 un engin explosif brisa la glace de l’hôtel Impérator 74 rue Beaubourg côté rue Chapon. Mordka Feferman participait à cette action avec Maurice Feld. L’explosion se produisit avec un léger retard, les soldats allemands qui étaient dans la salle avaient eu le temps de s’écarter. L’identité de 71 personnes a été vérifiée par les policiers du commissariat. L’engin artisanal était composé d’un corps métallique renfermant des boulons, rivets et déchets métalliques. Selon l’analyse du laboratoire de la Préfecture de police : « la quantité d’explosif mise en œuvre était réduite par rapport au poids des ferrailles. »
Selon David Diamant, le 23 juillet 1941, Mordka Feferman attaqua avec Maurice Feld un officier allemand dans le XVIIIe arrondissement et en janvier 1942, lança une bombe contre le cinéma Delta où était projeté le fil antisémite Le Juif Suss. Morka Feferman était membre du deuxième détachement des Francs-Tireurs et Partisans Main-d’œuvre immigrée FTP-MOI (détachement juif).
Très probablement filé depuis quelques temps par des inspecteurs de la BS2, le 9 mai 1942 à Paris, Mordka Feferman a été blessé de deux balles de revolvers par trois inspecteurs qui le poursuivaient. Il avala une capsule de cyanure et se tira une balle de revolver dans la tête. Transporté à l’Hôtel-Dieu à Paris (IVe arr.), il y mourut. Il portait sur lui une fausse carte d’identité au nom de Jacques Causteré, né le 15 mai 1919 à Pau (Basses-Pyrénées, Pyrénées-Atlantiques) et d’une carte d’adhérent du Rassemblement national populaire (RNP). Maurice Feld a été interpellé, jugé par le tribunal militaire allemand du Gross Paris, condamné à mort le 7 août 1942, et fusillé le 22 août 1942 au stand de tir du ministère de l’Air à Paris (XVe arr.).
Paulette Feferman mère de Mordka quitta avec ses deux filles son domicile pour la province. De retour à Paris, elle écrivit le 21 octobre 1944 au Préfet de police. Elle demandait où étaient passés les objets personnels de son fils qui avaient été emportés lors d’une perquisition.
Son frère Léon Feferman, vingt-et-un ans, fourreur qui vivait au 3 rue Poulet, témoigna et porta plainte le 20 novembre 1944. Lors de son audition par la commission rogatoire qui enquêta sur les agissements de l’inspecteur Gaston Barrachin, il déclara : « Mon frère Feferman Mordka […] qui faisait partie d’un groupe de résistance est décédé le 9 mai de la façon suivante : Poursuivi par des inspecteurs de police qui étaient chargés de l’arrêter et ayant reçu de ceux-ci dix-sept balles de pistolet, mon frère se trouvant alors dans l’impossibilité de fuir en raison des blessures qu’il avait reçues, s’est suicidé en avalant une pilule empoisonnée et en se tirant une balle dans la tête. »
« Au domicile qu’il occupait à l’époque, une perquisition a été opérée à la suite de laquelle tout ce que possédait mon frère a été volé, soit : deux complets-veston, des chaussures, du linge de corps que je ne saurais énumérer et divers objets personnels. »
« Moi-même, je vivais dans l’illégalité lorsque ces évènements sont arrivés et je ne connais pas les noms des policiers. […] J’ignore quel était le domicile de mon frère.  »
« Ces renseignements m’ont été communiqués par madame Ghersman et qui demeurait à l’époque rue des Petites-Écuries, je ne sais quel numéro et qui est actuellement rue du faubourg Saint-Denis, mais j’ignore le numéro de son domicile. »
« Je porte plainte contre les policiers, auteurs de la mort de mon frère et du vol commis à son domicile. »
Mordka Feferman craignait sans doute d’être battu, torturé, ce qui était dans son cas avéré, l’un de ses poursuivant était l’inspecteur Gaston Barrachin. Jean-Marc Berlière écrivit le concernant : « cet ancien garde républicain est un violent. Ses interrogatoires se terminent parfois tragiquement. Le groupe qu’il dirigeait fut l’un des plus actifs. Pourchassant inlassablement les « communo-terroristes », les interrogeant avec violence, il a commis de gros dégâts. Jugé en octobre 1945, Barrachin est condamné à mort et fusillé, non sans avoir tenté, aidé de sa fille, de se battre jusqu’au bout sur le terrain politique. »
Mordka Feferman a été homologué combattant des Forces françaises de l’intérieur (FFI) et Interné résistant. Il reçut à titre posthume la Médaille militaire, la Croix de guerre et la Médaille de la Résistance. Deux plaques commémoratives à sa mémoire ont été apposées à Paris.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article157475, notice FEFERMAN Mordka (Maurice) alias Louis par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason, version mise en ligne le 21 septembre 2020, dernière modification le 6 août 2021.

Par Jean-Pierre Besse, Daniel Grason

Arch. PPo
Plaque commémorative (Paris, IVe arr.)
Plaque commémorative (Paris, IVe arr.)
MémorialGenWeb
Plaque commémorative, 12 rue Poulet à Paris (Xe arr.)
Plaque commémorative, 12 rue Poulet à Paris (Xe arr.)
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Maurice Feferman est inhumé au cimetière de Bagneux, 31ème division.

SOURCES : Arch. PPo. 1 W 0735-30015, BA 1747, 77 W 5351-292132. – Bureau Résistance GR 16 P 219776. – David Diamant, Les Juifs dans la Résistance, 1940-1944, Le Pavillon, Roger Maria éditeur, 1971. – Boris Holban, Testament, Calman-Lévy, 1989. – Jean-Marc Berlière avec Laurent Chabrun, Les policiers français sous l’occupation, Éd. Perrin, 2001, p. 146, 167, 171, 177. – Jean-Marc Berlière, Franck Liaigre, Le Sang des communistes, Les bataillons de la jeunesse dans la lutte armée, automne 1941, Fayard, 2004. – Adam Rayski, Au stand de tir, le massacre des résistants, Paris 1942-1944, Mairie de Paris, s.d. — Notes de Jean-Pierre Ravery.

Photographie : Arch. PPo. GB 178

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