VILLARET René

Par Jean-Sébastien Chorin

Né le 16 septembre 1923 à Montpellier (Hérault), fusillé le 22 mai 1944 à la Doua (Villeurbanne, Rhône) ; boucher ; membre du maquis (AS) de La Vacquerie (Hérault) puis du maquis Bir Hakeim (AS).

Fils d’Antoine Villaret et de Marie-Louise Baptiste, René Villaret exerçait la profession de boucher et demeurait à Montpellier, 37 rue de la Cavalerie. Il rejoignit le maquis (Armée secrète) de La Vacquerie au mois de décembre 1943. Ce maquis fut ensuite absorbé par celui que Jean Capel avait fondé, le maquis Bir Hakeim, qui poursuivait son existence héroïque et tragique qui l’aménerait à participer à la Libération de Montpellier.
La Sipo-SD l’arrêta le 6 mars 1944 à Montpellier pour « détention illégale d’armes », rue de Verdun, alors qu’il s’apprêtait à prendre le train pour Toulouse (Haute-Garonne). René Villaret fut détenu à Montpellier, puis à la prison de Montluc (Lyon, Rhône) à partir du 6 avril 1944.
Le tribunal militaire allemand siégeant à Lyon le condamna à mort le 15 mai 1944. Il a été fusillé le 22 mai 1944 au stand de tir du terrain militaire de la Doua.
Enterré dans le charnier de la Doua, son corps fut retrouvé après la guerre et identifié par sa mère le 25 août 1945. Son nom figure sur le monument aux morts de Montpellier (Hérault).
Il écrivit une dernière lettre à sa mère le 22 mai 1944.

René Villaret à sa mère
Lyon, prison de Montluc (Rhône) —22 mai 1944
Lyon, le 22 mai 1944
Ma chère Maman,
Par cette lettre, je viens te faire savoir que ce matin, il m’arrive le plus grand bonheur que je n’ai jamais eu dans ma triste vie ; sois très courageuse et surtout pense à mes frères qui seront heureux de te revoir à leur retour. Vois-tu, chère mère, c’est dans un petit moment que devant moi vont s’ouvrir les portes du Paradis que je crois avoir gagné ; je me suis mis en paix avec notre bon Dieu et je viens de communier avec le plus grand calme. Oui, chère mère, passé au Tribunal militaire allemand, je suis condamné à la peine de mort et, crois-moi, j’ai appris cette condamnation avec sang-froid, en pensant au pauvre Charles et aussi à notre pauvre Papa. Je vais aller les rejoindre et de là-haut, je prierai pour vous tous. Malgré tout ce que mes frères en pensent, je leur pardonne leur petite méchanceté envers moi et je veillerai sur eux pour qu’ils soient très heureux dans leur petit foyer et, qu’ils fassent beaucoup d’enfants, qu’ils leur apprennent le bon chemin, celui de l’honneur et aussi celui du travail.
Pour moi, la vie a été, à des moments, le calvaire d’un gosse qui s’était égaré de ce bon chemin que, vous tous, vous efforciez à me faire suivre et que, je ne sais pas pourquoi, je n’ai pas suivi comme vous l’avez fait : cela était ma destinée, je l’ai suivie avec, des fois, beaucoup de peine en pensant à vous.
Je ne regrette rien de cette vie que je laisse pour rentrer dans une nouvelle, si ce n’est que j’aurais voulu pouvoir t’embrasser, chère maman, encore une toute dernière fois, ainsi que mes frères que, malgré tout, j’aimais être parmi eux.
Dans le portefeuille que l’on te fera parvenir, tu trouveras à l’intérieur quelques photos : fais-les tirer-en plusieurs exemplaires, et remets-en à mes amis de travail en leur serrant une bonne poignée de main, et en leur disant qu’il faut un jour ou l’autre quitter ce monde et que moi, elle, comme ils m’appelaient, je te laisse avec courage.
Ma chère Maman, que veux-tu que je te dise de plus, que je t’ai toujours aimée ; je te demande de me pardonner tout ce que je t’ai fait de misère depuis mon jeune âge, toi qui étais si bonne et si douce envers moi. Mille fois pardon, maman, et je suis très sincère en te demandant cela comme je viens de le demander au bon Dieu.
Embrasse bien tous mes frères et sœurs et neveux, tous mes plus proches amis. Reçois, ma chère mère, un gros baiser de ton fils qui s’en va, avec une seule pensée : que tu vives en femme heureuse les quelques années qui te retiennent en cette vie. Mille baisers de ton petit.
René
Ci-joint une mèche de mes cheveux.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article157713, notice VILLARET René par Jean-Sébastien Chorin, version mise en ligne le 25 mars 2014, dernière modification le 27 mars 2018.

Par Jean-Sébastien Chorin

SOURCES : DAVCC, Caen (Notes Thomas Pouty). – Arch. Dép. Rhône, 3335W22, 3335W13, 3460W3. – G. Krivopissko, La vie à en mourir, op. cit.. — Note d’André Balent.

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