BALTHAZAR August, Jozef, dit Gust. [Belgique]

Par Guy Vanschoenbeek

Gand (Gent, pr. Flandre orientale, arr. Gand), 10 octobre 1893 − Mariakerke-lez-Gand (aujourd’hui commune de Gand), 23 juillet 1952. Directeur du journal le Vooruit, administrateur de la Banque belge du travail et entreprises apparentées, militant puis dirigeant de la Jeune garde socialiste, conseiller communal puis échevin des Finances de Gand, conseiller provincial de Flandre orientale, député de l’arrondissement de Gand-Eeklo, ministre.

August Balthazar est né dans une famille ouvrière originaire de Wetteren (pr. Flandre orientale, arr. Dendermonde - Termonde). Il poursuit ses études moyennes à Gand. Vers 1909, il entre au service de l’imprimerie populaire socialiste. En 1913, il devient propagandiste du journal, le Vooruit (En avant). Militant dans la Jeune garde socialiste (JGS), il est membre du Bureau de la Fédération flamande des JGS, membre de la direction du mouvement à Gand, rédacteur du Jonge socialist (Jeune socialiste).

August Balthazar est membre du collectif de rédaction de La lutte des classes et donc partisan de la tendance marxiste de gauche de Henri De Man au sein du Belgische werklieden partij (BWP - Parti ouvrier belge), avec d’autres personnalités gantoises de la JGS comme Désiré Bouchery et H. Vandemeulebroucke*. Il crée également une école socialiste du dimanche.

Mobilisé au début de la Première Guerre mondiale, August Balthazar est blessé et transféré comme prisonnier au camp de Göttingen (Basse-Saxe) en Allemagne. Là, il parvient à étudier un peu et est envoyé dans une université suisse. Il y rencontre quelques activistes, notamment August Borms, et partage leurs points de vue, ce qui explique le profil flamingant de sa carrière politique future.

Après la Première Guerre mondiale, August Balthazar entre dans la politique active. En 1921, il est successivement élu conseiller communal de Gand de 1921 à 1946 et conseiller provincial de Flandre orientale de 1921 à 1929. En juillet 1923, il succède au socialiste Lambens, décédé, comme échevin de la ville de Gand. Après les élections de 1926 et 1932, il occupe le poste d’échevin des Finances. Il garde cette fonction jusqu’en 1938.

En 1925, August Balthazar est élu député de l’arrondissement de Gand-Eekloo. À la Chambre, il se distingue notamment comme un socialiste flamingant. Ainsi, en 1932, il soutient la critique du Frontpartij (parti du front) contre le projet de loi sur l’emploi des langues dans l’administration. Lorsque plus tard, il marche à l’ombre du flamingant mais moins virulent, Edouard Anseele, on le voit défiler lors de la grande manifestation de 1937 pour l’amnistie. La même année, il est d’ailleurs vice-président du premier Congrès socialiste flamand.

C’est surtout lors des Congrès du BWP-POB de 1935 et 1937 que August Balthazar met l’accent sur la nécessaire réorientation flamande. Il n’est donc pas étonnant qu’il joue un rôle important dans la mise sur pied de la fête socialiste des éperons d’or à Courtrai (Kortrijk, pr. Flandre occidentale, arr. Courtrai) en 1939.

Au sein du mouvement socialiste, l’intérêt de August Balthazar va surtout au développement du Vooruit, dont il devient directeur en 1927. Il restructure l’ancienne imprimerie populaire et amène le Vooruit littéralement sur de nouvelles voies, principalement par une campagne de promotion moderne (film sur le journal, 1933). Il est également administrateur de la Banque belge du travail (BBT) et d’industries textiles apparentées (FTR, Filsoietis, Sarga, Compagnie de Ruzizi). Cette dernière activité amènera la démission de Balthazar en tant qu’échevin des Finances en 1938, à cause d’une campagne menée à Gand par une coalition catholique-libérale contre l’investissement de l’argent de l’État dans la BBT (qui entretemps avait fait faillite).

Après le départ politique d’Edouard Anseele aîné et surtout après son décès en 1938, August Balthazar devient sans conteste le numéro un au sein de la Fédération gantoise du parti. C’est ainsi que ces années-là, il doit traiter l’épineux dossier de la restructuration ou de la liquidation de l’empire de la BBT et de la restructuration de la société coopérative, Vooruit, via la SBIIF (Société belge d’intérêts industriels et financiers).

Du 15 mai 1938 au 22 février 1939, August Balthazar succède à Henri De Man dans le gouvernement Spaak comme ministre des Travaux publics et de la Résorption du chômage. Du 3 septembre 1939 au 5 janvier 1940, il est ministre du Travail et de la Prévoyance sociale dans le cabinet Pierlot.

Après la défaite franco-belge, August Balthazar, après bien des détours, arrive à Londres, où il fait partie du gouvernement en exil sans pourtant y jouer un rôle de premier plan. À son retour à Gand vers 1944, il est presque immédiatement confronté à la JGS autour de Edouard Anseele junior*, qui, auréolé des honneurs de la résistance, n’a que du mépris pour les « londoniens ». On reproche à August Balthazar de ne pas vouloir démissionner à cause du cumul : mandat parlementaire et directeur du journal Vooruit. Balthazar répond également de façon trop évasive à la question que posent ceux qui sont restés au pays : qu’est-il advenu des fonds de la Westminster Bank destinés à éditer en Angleterre un journal flamand socialiste ? Derrière tout ceci, on trouve une vieille rivalité entre la « royauté » d’Edouard Anseele aîné et son véritable héritier : Edouard Anseele junior n’a pas vraiment digéré sa démission forcée comme échevin en 1934 et ne s’est d’ailleurs jamais résigné, dans les années 1930, à jouer le deuxième.

August Balthazar se retire sans fracas, n’adhère pas au nouveau Belgische socialistische partij (BSP) - Parti socialiste belge (PSB) et disparaît de la politique active. En 1948, il annonce à grand bruit un meeting « révélateur » qui au final ne dévoile rien du tout. De plus, il faut noter la présence de l’ex-échevin socialiste « collaborateur », Désiré Cnudde, ce qui n’améliore certainement pas la réputation de Balthazar dans les cercles socialistes. Ce qui est également remarquable lors de ce meeting est l’attitude réservée de August Balthazar en ce qui concerne la Question royale, où il est notamment en faveur d’un référendum. Après son départ du mouvement socialiste, son expérience le conduit à occuper un poste de cadre dans une entreprise graphique. Il décède à Mariakerke près de Gand le 23 juillet 1952.

Époux de Clémentine Balliu et père de deux enfants, Hilda et Frida, August Balthazar est une personnalité bien représentative du courant marxiste des jeunes au sein du BWP gantois avant 1914. Contrairement à d’autres tels que Désiré Bouchery ou H. Vandemeulebroucke qui doivent chercher refuge politique dans d’autres régions, Balthazar parvient à se maintenir dans l’ombre du « père » Anseele, à s’intégrer dans les hautes sphères du « système gantois » et devient même le dauphin avoué d’Edouard Anseele. Il faut noter ses positions vis-à-vis du mouvement flamand, où il devient plus autonome que son ancien maître. Ce qui lui est dramatique est son éloignement de Gand, dû aux circonstances de la Seconde Guerre mondiale, qui fait apparaître le conflit latent avec Edouard Anseele junior*. La fédération gantoise, dominée depuis trop longtemps par une personnalité, n’est pas mûre en 1944 pour une gestion bicéphale et encore moins pour une direction collégiale.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article158171, notice BALTHAZAR August, Jozef, dit Gust. [Belgique] par Guy Vanschoenbeek, version mise en ligne le 15 avril 2014, dernière modification le 30 novembre 2023.

Par Guy Vanschoenbeek

SOURCES : Diverses notices dans le journal Vooruit et les fonds d’archives à l’AMSAB à Gand − DE VULDERE R., Biografisch repertorium der belgische parlementairen, senatoren, en volkvertegenwoordigers, 1830-1965, RUG, Gent, 1965 − VAN MOLLE P., Le Parlement belge 1894-1969, Ledeberg-Gand, 1969, p. 6-7 − Encyclopedie van de Vlaamse Beweging, Tielt, 1975 − VANSCHOENBEEK G., Novocento in Gent. De wortels van de sociaal-democratie in Vlaanderen, Gent-Antwerpen, AMSAB-Uitgeverij Hadewijch, 1995.

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